Vu 1°, sous le n° 141843, la requête, enregistrée le 2 octobre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la CHAMBRE NATIONALE DES HUISSIERS DE JUSTICE, établissement d'utilité publique, sise ... ; la CHAMBRE NATIONALE DES HUISSIERS DE JUSTICE demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir les alinéas 4 et 5 de l'article 54 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 instituant de nouvelles règles relatives aux procédures civiles d'exécution pour l'application de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution ;
Vu 2°, sous le n° 141905, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 octobre 1992 et 8 février 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CONFEDERATION SYNDICALE DES HUISSIERS DE JUSTICE, ayant son siège ... et l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DES CONSOMMATEURS PAR LA RATIONALISATION DU REGLEMENT DES PETITS LITIGES ayant son siège ... ; la CONFEDERATION SYNDICALE DES HUISSIERS DE JUSTICE et l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DES CONSOMMATEURS PAR LA RATIONALISATION DU REGLEMENT DES PETITS LITIGES demandent au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 instituant de nouvelles règles relatives aux procédures civiles d'exécution pour l'application de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution ;
Vu 3°, sous le n° 141906, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 octobre 1992 et 8 février 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CHAMBRE DEPARTEMENTALE DES HUISSIERS DE JUSTICE, ayant son siège ... ; la CHAMBRE DEPARTEMENTALE DES HUISSIERS DE JUSTICE demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 instituant de nouvelles règles relatives aux procédures civiles d'exécution pour l'application de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la Constitution ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales et, notamment, son article L.258 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Marchand, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, avocat de la CONFEDERATION SYNDICALE DES HUISSIERS DE JUSTICE et de l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DES CONSOMMATEURS PAR LA RATIONALISATION DU REGLEMENT DES PETITS LITIGES,
- les conclusions de M. Sanson, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de la CHAMBRE NATIONALE DES HUISSIERS DE JUSTICE, de la CHAMBRE DEPARTEMENTALE DES HUISSIERS DE JUSTICE DE PARIS, de la CONFEDERATION SYNDICALE DES HUISSIERS DE JUSTICE et de l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DES CONSOMMATEURS PAR LA RATIONALISATION DU REGLEMENT DES PETITS LITIGES sont dirigées contre un même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la légalité externe :
Considérant, en premier lieu, que si le décret attaqué ne vise pas l'avis de la CHAMBRE NATIONALE DES HUISSIERS DE JUSTICE, l'absence de la mention de cette consultation est sans influence sur la légalité dudit décret ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 22 de la Constitution : "Les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par le ministre chargé de leur exécution" ; que le décret attaqué n'implique aucune mesure d'exécution entrant dans la compétence du ministre des affaires sociales et n'avait donc pas à être contresigné par ce ministre ; que le moyen tiré de l'absence de contreseing de ce dernier doit être écarté ;
Sur la légalité interne :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 9 juillet 1991 : "Le procureur de la République veille à l'exécution des jugements et des autres titres exécutoires" ; qu'aux termes de l'article 12 de la même loi : "Le procureur de la République peut enjoindre à tous les huissiers de justice de son ressort de prêter leur ministère ( ...)", et qu'aux termes de l'article 39 de la même loi : "( ...) à la demande de l'huissier de justice chargé de l'exécution, porteur d'un titre exécutoire et au vu d'un relevé certifié sincère des recherches infructueuses qu'il a tentées pour l'exécution, le procureur de la République entreprend les diligences nécessaires pour connaître l'adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur, ainsi que l'adresse du débiteur et l'adresse de son employeur, à l'exclusion de tout autre renseignement. A l'issue d'un délai fixé par décret en Conseil d'Etat, l'absence de réponse du procureur de la République vaut réquisition infructueuse" ;
Considérant qu'en disposant par l'article 54 : "Au vu des documents produits, le procureur de la République peut aussi ne pas donner suite à la requête et enjoindre à l'huissier de justice de procéder aux recherches complémentaires et aux constatations matérielles qui lui paraîtraient nécessaires ( ...)", les auteurs du décret attaqué n'ont pas méconnu les prescriptions de l'article 39 de la loi qui ne peuvent être regardées comme privant le ministère public du droit d'analyser les démarches déjà entreprises par l'huissier de justice et, dans le cadre de sa mission générale de contrôle et de surveillance de l'exécution des jugements et titres exécutoires et de ceux qui sont chargés d'y procéder, de décider de l'opportunité d'enjoindre à l'huissier de procéder à des recherches complémentaires ou autres constatations matérielles qui lui paraîtraient nécessaires ;
Considérant, en second lieu, que les dispositions du décret attaqué n'ont ni pour objet ni pour effet de modifier les règles qui découlent de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Considérant, en troisième lieu, que l'article 18 de la loi du 9 juillet 1991 dispose : "Seuls peuvent procéder à l'exécution forcée et aux mesures conservatoires les huissiers de justice chargés de l'exécution" ; que l'article 81 de la même loi dispose : "La loi détermine les personnes habilitées à procéder à l'exécution forcée et aux mesures conservatoires au même titre que les huissiers de justice mentionnés à l'article 18" ; qu'aux termes de l'article L 258 du livre des procédures fiscales, les poursuites "sont opérées par huissier de justice ou par tout agent de l'administration habilité à exercer des poursuites au nom du comptable" ; qu'il résulte de la combinaison de l'ensemble de ces dispositions législatives que les articles 294, 295 et 296 du décret attaqué ont pu légalement organiser les conditions dans lesquelles les agents des services du trésor public habilités peuvent procéder aux poursuites aux fins de recouvrer les créances de l'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics dotés d'un comptable public ; que dès lors la CHAMBRE NATIONALE DES HUISSIERS DE JUSTICE, la CHAMBRE DEPARTEMENTALE DES HUISSIERS DE JUSTICE DE PARIS, la CONFEDERATION SYNDICALE DES HUISSIERS DE JUSTICE et l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DES CONSOMMATEURS PAR LA RATIONALISATION DU REGLEMENT DES PETITS LITIGES ne sont pas fondées à demander l'annulation du décret attaqué ;
Article 1er : Les requêtes de la CHAMBRE NATIONALE DES HUISSIERS DE JUSTICE, de la CHAMBRE DEPARTEMENTALE DES HUISSIERS DE JUSTICE DE PARIS, de la CONFEDERATION SYNDICALE DES HUISSIERS DE JUSTICE et de l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DES CONSOMMATEURS PAR LA RATIONALISATION DU REGLEMENT DES PETITS LITIGES sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la CHAMBRE NATIONALE DES HUISSIERS DE JUSTICE, à la CHAMBRE DEPARTEMENTALE DES HUISSIERS DE JUSTICE DE PARIS, à la CONFEDERATION SYNDICALE DES HUISSIERS DE JUSTICE, à l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DES CONSOMMATEURS PAR LA RATIONALISATION DU REGLEMENT DES PETITS LITIGES, au ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et au Premier ministre.