Vu le recours enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 21 février 1992, présenté par le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA FORET ; celui-ci demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 29 novembre 1991 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé, à la demande du syndicat des exploitants de l'espèce caprine du département de la Vienne, l'article 7 de l'arrêté du 19 août 1987 du préfet de la Vienne fixant pour l'année 1987 l'assiette des cotisations du régime de protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles, le taux des cotisations de prestations familiales et d'assurance vieillesse agricole ainsi que les taux des cotisations complémentaires d'assurances sociales agricoles en tant qu'il concerne l'assiette des cotisations des éleveurs caprins ;
2°) rejette la demande présentée par le syndicat devant le tribunal administratif de Poitiers ;
3°) décide qu'il sera sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu le décret n° 52-645 du 3 juin 1952 modifié notamment par le décret n° 71462 du 11 juin 1971 ;
Vu le décret n° 60-1483 du 30 décembre 1960 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de Bellescize, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat du syndicat des exploitants de l'espèce caprine de la Vienne,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article 1106-6 du code rural relatif au régime agricole d'assurance maladie dans sa rédaction issue de la loi du 9 juillet 1984 : "Le montant des cotisations dues pour la couverture des risques obligatoirement assurés en application du présent chapitre au titre des bénéficiaires définis aux 1° à 5° du I de l'article 1106-1 varie suivant l'importance du revenu cadastral de l'exploitation. Ce montant est fixé par un décret pris sur le rapport du ministre de l'agriculture et du ministre de l'économie et des finances, après consultation de la section de l'assurance maladie, maternité, invalidité et de l'assurance vieillesse des membres non salariés des professions agricoles du conseil supérieur des prestations sociales agricoles" ; qu'aux termes du troisième alinéa du même article : "Le revenu cadastral pris en considération est le revenu cadastral réel de l'exploitation, après application du coefficient d'adaptation fixé par le décret prévu ci-dessus et, éventuellement, de coefficients par nature de culture ou par région naturelle fixés par arrêté du représentant de l'Etat dans le département" ; enfin, qu'aux termes du quatrième alinéa dudit article : "Toutefois, pour les personnes assujetties au titre d'une activité autre que la mise en valeur des terres et pour certaines catégories de producteurs définies par le décret mentionné aux alinéas précédents, le revenu cadastral pris en considération est un revenu cadastral théorique fixé par arrêté du ministre de l'agriculture ou, par délégation de celui-ci, par arrêté du représentant de l'Etat dans le département ; qu'aux termes de l'article 2, quatrième alinéa, du décret du 31 juillet 1987 relatif au financement du régime de protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles pour 1987 pris pour l'application de l'article 1106-6 du code rural : "Le revenu cadastral théorique s'applique aux productions végétales non spécialisées dont les terres sont cadastrées à un titre autre que celui qui correspond à la nature des cultures pratiquées, aux productions spécialisées et aux activités autres que la mise en valeur des terres" ; qu'il résulte de ces dispositions que les éleveurs de chèvres du département de la Vienne entrent dans la catégorie des producteurs spécialisés dont l'assiette des cotisations du régime agricole d'assurance maladie est constituée un revenu cadastral théorique fixé par arrêté du ministre de l'agriculture ou, par délégation de celui-ci, par arrêté du représentant de l'Etat dans le département ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que le préfet de la Vienne, auteur de l'arrêtécontesté du 19 août 1987 fixant pour l'année 1987 l'assiette des cotisations dues au régime de protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles, les taux des cotisations de prestations familiales et d'assurance vieillesse agricole ainsi que les taux des cotisations complémentaires d'assurances sociales agricoles, n'avait reçu aucune délégation du ministre de l'agriculture et de la forêt aux fins de fixer à l'article 7 dudit arrêté l'assiette des cotisations dues par les éleveurs caprins dans son département ; que, par suite, les dispositions de cet article sont illégales en tant qu'elles concernent l'assiette des cotisations dues au titre du régime agricole d'assurances maladie ;
Considérant que l'article 4 du décret du 3 juin 1952 applicable en matière d'allocations familiales agricoles, dans sa rédaction issue du décret n° 86-596 du 14 mars 1986, et auquel renvoie le décret n° 60-1483 du 30 décembre 1960 en matière de cotisations d'assurance vieillesse agricole, prévoit que "l'assiette des cotisations dues au titre de la mise en valeur des terres est constituée par le revenu cadastral réel corrigé ou par le revenu cadastral théorique prévus à l'article 1106-6 du code rural" ; que si en vertu des alinéas 2 et 3 de l'article 7 du décret du 3 juin 1952 le préfet a dans certains cas compétence pour fixer, à la place du ministre de l'agriculture, l'assiette et le taux des cotisations afférentes aux régimes de prestations familiales et d'assurance vieillesse dues au titre de la mise en valeur des terres, ces dispositions doivent être regardées comme ayant été abrogées implicitement par le décret du 11 juin 1971 ; qu'il suit de là que le préfet de la Vienne n'était pas davantage compétent pour fixer, sur le fondement des dispositions précitées du décret du 3 juin 1952, l'assiette des cotisations afférentes aux régimes de prestations familiales et d'assurance vieillesse dues par les éleveurs caprins ; que, dès lors, le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA FORET n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a annulé l'article 7 de l'arrêté du 19 août 1987 du préfet de la Vienne en tant qu'il fixe l'assiette des cotisations dues par les éleveurs caprins dans le département pour l'année 1987 ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA FORET est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat des éleveurs caprins de la Vienne et au ministre de l'agriculture et de la pêche.