La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/02/1995 | FRANCE | N°143401

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 08 février 1995, 143401


Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE l'ISERE ; le PREFET DE L'ISERE demande au président de la section du Contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 13 novembre 1992 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté en date du 12 novembre 1992 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Ntumba X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Ntumba X... devant ledit tribunal ;
Vu les autres pièces du

dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme e...

Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE l'ISERE ; le PREFET DE L'ISERE demande au président de la section du Contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 13 novembre 1992 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté en date du 12 novembre 1992 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Ntumba X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Ntumba X... devant ledit tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990 et la loi du 26 février 1992 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de M. du Marais, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Ntumba X..., ressortissant zaïrois, à qui la qualité de réfugié a été refusée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 10 septembre 1987 confirmée par la commission des recours des réfugiés le 14 mai 1991, a fait l'objet le 12 juillet 1991 d'un premier refus de séjour ; que la demande d'admission exceptionnelle au séjour au titre de la circulaire du 23 juillet 1991 présentée par M. Ntumba X... a été rejetée par le PREFET DE L'ISERE par une décision du 4 juin 1992, confirmée le 4 septembre 1992 ; que l'intéressé s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un mois à compter de la notification de cette décision et pouvait, dès lors, faire l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière en application des dispositions de l'article 22I-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant que si M. Ntumba X... a entendu exciper de l'illégalité de la décision susmentionnée du 4 juin 1992, confirmée le 4 septembre 1992, il ne pouvait, en tout état de cause, se prévaloir des dispositions de la circulaire du 23 juillet 1991 qui est dépourvue de valeur réglementaire ;
Considérant que si M. Ntumba X... a soutenu, en outre, devant le tribunal administratif de Grenoble qu'à la date de l'arrêté attaqué, il vivait en concubinage avec une personne qui attendait un enfant, cette circonstance, à la supposer établie, ne permet pas de regarder cet arrêté comme portant au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE L'ISERE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur l'illégalité du refus de séjour du 4 juin 1992 et sur une méconnaissance de l'article 8 de la Convention précitée pour annuler son arrêté du 12 novembre 1992 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Ntumba X... ;
Considérant qu'il appartient toutefois au juge d'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M. Ntumba X... devant le tribunal administratif de Grenoble ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945, relatives à la reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière, telles qu'elles ont été modifiées notamment par les lois des 2 août 1989 et 10 janvier 1990, et notamment des dispositions des articles 22 et 22 bis qui ouvrent un recours suspensif devant le juge administratif, organisent les garanties dont bénéficie l'étranger pour pouvoir exercer utilement ledit recours et fixent les délais dans lesquels ces recours doivent être présentés et jugés, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des arrêtés de reconduite et, par suite, exclure l'application des dispositions précitées de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983, dont M. Ntumba X... ne peut, dès lors, utilement se prévaloir ;

Considérant que l'existence d'une décision ordonnant la reconduite de M. Ntumba X... vers son pays d'origine doit être regardée comme établie par les mentions figurant dans l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière ;
Mais considérant que la demande de M. Ntumba X... tendant à ce que lui soit reconnue la qualité de réfugié a été, comme il a été dit ci-dessus, rejetée par l'office français de protection des réfugiés et apatrides et par la commission des recours des réfugiés ; que si M. Ntumba X... fait état des risques qu'il courrait s'il devait être reconduit vers son pays d'origine, il n'apporte à l'appui de ses allégations aucune précision ni aucune justification ; qu'ainsi, il n'est pas fondé à soutenir que les stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales auraient été méconnues ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE L'ISERE est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Article 1er : Le jugement susvisé du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble en date du 13 novembre 1992 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Ntumba X... devant le tribunal administratif de Grenoble est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'ISERE, à M. Ntumba X... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 143401
Date de la décision : 08/02/1995
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Circulaire du 23 juillet 1991
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983 art. 8
Loi 89-548 du 02 août 1989
Loi 90-34 du 10 janvier 1990 art. 22, art. 22 bis
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945


Publications
Proposition de citation : CE, 08 fév. 1995, n° 143401
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Négrier
Rapporteur public ?: M. du Marais

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1995:143401.19950208
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award