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24/02/1995 | FRANCE | N°161930

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 24 février 1995, 161930


Vu la requête enregistrée le 27 septembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Paolo X..., demeurant à la Maison d'arrêt de la Santé à Paris (75013) ; M. X... demande que le Conseil d'Etat annule le décret du 7 septembre 1994 accordant son extradition aux autorités italiennes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code pénal ;
Vu la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ;
Vu la loi du 10 mars 1927 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n

° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avo...

Vu la requête enregistrée le 27 septembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Paolo X..., demeurant à la Maison d'arrêt de la Santé à Paris (75013) ; M. X... demande que le Conseil d'Etat annule le décret du 7 septembre 1994 accordant son extradition aux autorités italiennes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code pénal ;
Vu la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ;
Vu la loi du 10 mars 1927 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Errera, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de M.Persichetti,
- les conclusions de M. Delarue, Commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité externe :
Considérant que le décret attaqué a été signé par le Premier ministre et contresigné par le ministre d'Etat, garde des Sceaux, ministre de la justice ; que la circonstance que l'ampliation remise au requérant ne comporte pas lesdites signatures est sans influence sur la régularité du décret ;
Considérant que le décret attaqué vise la demande du gouvernement italien, mentionne l'ordre décerné par le Parquet général de la cour d'appel de Rome aux fins d'exécution du reliquat restant à exécuter sur la peine de 22 ans et demi de réclusion prononcée contre le requérant par la cour d'assises de Rome le 16 février 1991 pour participation à bande armée, complicité de détention et port illégaux d'armes à feu et attentat terroriste ; qu'il mentionne également l'absence de prescription de la peine et constate que les obligations contenues aux articles 2 et 3 de la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ont été respectées ; qu'il satisfait ainsi aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 13 de la loi du 10 mars 1927 que dans les 24 heures de la réception par le procureur général de la République des pièces produites à l'appui de la demande d'extradition, le titre en vertu duquel l'arrestation provisoire a eu lieu est notifié à l'étranger ; que la circonstance que ce titre a été notifié au requérant après l'expiration du délai imparti par les dispositions susmentionnées est sans influence sur la régularité du décret attaqué ;
Considérant que la demande d'extradition des autorités italiennes était accompagnée, conformément aux prescriptions de l'article 12 de la convention précitée, de l'expédition authentique et de la traduction intégrale de l'ordre d'exécution de la peine susmentionnée, de l'exposé des faits et des textes applicables ainsi que des extraits de l'arrêt précité de la cour d'assises de Rome concernant M. X... ; que la circonstance que la traduction intégrale dudit arrêt ne soit parvenue que postérieurement aux autorités judiciaires françaises a été sans influence sur la régularité du décret attaqué ; que le moyen selon lequel la traduction des pièces transmises n'aurait pas mis les autorités françaises en mesure de statuer sur le bien-fondé de la demande d'extradition manque en fait ;

Sur la légalité interne :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention précitée : "L'extradition ne sera pas accordée si l'infraction pour laquelle elle est demandée est considérée par la Partie requise comme une infraction politique ou comme un fait connexe à une telle infraction" ; que l'Etat requis n'est pas lié, dans l'appréciation qu'il effectue sur ce point, par la définition de l 'infraction dans le droit de l'Etat requérant ; que M. X... a été condamné pour participation à bande armée, complicité de détention et de port illégaux d'armes à feu et attentat aux fins de terrorisme ; que la première de ces infractions s'analyse, en droit français, en association de malfaiteurs, infraction dépourvue de caractère politique ; que l'attentat aux fins de terrorisme au cours duquel un haut fonctionnaire italien a été assassiné, ne saurait, eu égard à la gravité de cet acte, revêtir la qualification d'infraction politique ; qu'enfin, la seconde des infractions précitées était, en l'espèce, connexe à l'attentat aux fins de terrorisme ; qu'ainsi le décret attaqué a respecté les prescriptions de l'article 3-1 de la convention européenne d'extradition ;
Considérant, en second lieu, que l'attentat aux fins de terrorisme et la complicité de détention et de port illégaux d'armes à feu sont punissables en droit français ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il ne résulte pas du dossier qu'en accordant l'extradition du requérant pour ces deux infractions, les auteurs du décret attaqué aient méconnu les dispositions du deuxième alinéa de l'article 16 de la loi du 10 mars 1927 selon lesquelles l'avis de la chambre d'accusation est défavorable si elle estime qu'il y a erreur évidente ;
Considérant que le moyen selon lequel les charges réunies contre le requérant l'auraient été dans des conditions contraires à l'ordre public français n'est assorti d'aucune précision de nature à permettre de statuer sur son bien-fondé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que tous les faits pour lesquels l'extradition de M. X... a été demandée étaient de nature à permettre légalement son extradition ; que M. X... n'est, dès lors, pas fondé à demander l'annulation du décret attaqué accordant son extradition aux autorités italiennes ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Paolo X... et au ministre d'Etat, garde des Sceaux, ministre de la justice.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

335-04-03-02 ETRANGERS - EXTRADITION - DECRET D'EXTRADITION - LEGALITE INTERNE -Absence d'extradition pour une infraction politique (article 3-1 de la convention européenne d'extradition) - Notion d'infraction politique - Appréciation portée par la partie requise.

335-04-03-02 Dans l'appréciation que l'Etat requis porte sur le caractère politique de l'infraction pour laquelle l'extradition est demandée, cet Etat n'est pas lié par la définition de l'infraction dans le droit de l'Etat requérant. Application à l'infraction de droit italien de participation à bande armée, qui s'analyse en droit français en association de malfaiteurs, infraction dépourvue de caractère politique.


Références :

Convention européenne du 13 décembre 1957 extradition art. 2, art. 3, art. 12
Décret du 07 septembre 1994 extradition décision attaquée confirmation
Loi du 10 mars 1927 art. 13, art. 16
Loi 79-587 du 11 juillet 1979


Publications
Proposition de citation: CE, 24 fév. 1995, n° 161930
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: M. Errera
Rapporteur public ?: M. Delarue
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, Avocat

Origine de la décision
Formation : 2 / 6 ssr
Date de la décision : 24/02/1995
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 161930
Numéro NOR : CETATEXT000007869270 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1995-02-24;161930 ?
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