Vu l'ordonnance du 17 juin 1992, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 19 juin 1992, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R.81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête présentée à cette cour par la commune de Saint-Martin d'Hères (Isère) ;
Vu la requête, enregistrée le 9 juin 1992 au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon, présentée pour la commune de Saint-Martin d'Hères ; la commune de Saint-Martin d'Hères demande :
1°) d'annuler le jugement du 6 avril 1992 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 18 septembre 1990 par laquelle le préfet de l'Isère a refusé de prendre en compte les résidences universitaires sises sur son territoire pour le calcul de sa dotation de compensation au titre des années 1986 à 1990 ;
2°) d'annuler ladite décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes, et notamment son article L.234-10 ;
Vu la loi n° 49-458 du 2 avril 1949 accordant le bénéfice du maintien dans les lieux à certains clients des hôtels, pensions de famille et meublés, modifiée ;
Vu la loi n° 82-526 du 22 juin 1982 relative aux droits et obligations des locataires et des bailleurs ;
Vu le décret n° 85-1513 du 31 décembre 1985 pris pour l'application de l'article L.234-10 du code des communes et relatif à la dotation de compensation de la dotation globale de fonctionnement des communes ;
Vu le décret n° 87-292 du 28 avril 1987 modifiant le décret n° 85-1513 du 31 décembre 1985 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Chantepy, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la commune de Saint-Martin d'Hères,
- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 234-10 du code des communes, alors en vigueur : "Il est institué une dotation de compensation destinée à tenir compte de certaines charges particulières des communes. Cette dotation est répartie entre l'ensemble des communes : .../ ... 3° pour 60 p. 100 de son montant, en fonction de l'importance du parc des logements sociaux et dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat" ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 31 décembre 1985, alors en vigueur, tel que modifié par le décret du 28 avril 1987 : "Sont considérés comme logements sociaux, au sens du 3° du premier alinéa de l'article L.234-10 du code des communes, les logements satisfaisant à l'une des conditions suivantes : 1° Logements à usage locatif définis ci-après : ... 4°. Logements appartenant à l'Etat" ;
Considérant, en premier lieu, qu'un logement qui fait l'objet d'un contrat d'occupation passé entre un bailleur et un preneur, par lequel le premier s'engage à mettre le logement à disposition du second, en contrepartie du paiement d'un loyer, doit être regardé comme un logement à usage locatif, au sens des dispositions précitées ; qu'il ressort des pièces du dossier que les étudiants hébergés dans les résidences universitaires, gérées par le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires et situées sur le territoire de la commune de Saint-Martin d'Hères (Isère), sont liés à cet établissement public par un "contrat de location" ; que, par celui-ci, le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires s'engage à mettre à leur disposition une chambre meublée en échange du versement d'un loyer mensuel et d'un dépôt de garantie ; que ce contrat comporte les clauses habituelles d'un bail, en ce qui concerne, notamment, les conditions d'entrée dans les lieux et d'occupation du logement, l'obligation faite au locataire de souscrire une assurance et les causes de résiliation de la location ; que ni le fait qu'un tel contrat ne peut être conclu qu'avec un étudiant titulaire d'une carte délivrée par le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires et que ce dernier puisse refuser l'admission d'un étudiant dans la résidence universitaire, ni le fait que le montant du loyer prévu dans le contrat est fixé, pour l'année universitaire, par une décision unilatérale du centre, soumise à l'approbation de l'autorité de tutelle, ne constituent des restrictions au libre engagement des parties d'une nature telle qu'elles ôteraient à l'acte passé entre l'étudiant et le centre son caractère de contrat de location ; qu'ainsi, les résidences universitaires de Saint-Martin d'Hères sont des logements à usage locatif, au sens des dispositions ci-dessus rappelées du décret du 31 décembre 1985 modifié ; qu'il ressort, en second lieu, des pièces du dossier que ces résidences universitaires sont propriété de l'Etat ; qu'elles sont, par conséquent, au nombre des logements sociaux visés au 3° de l'article L.234-10 du code des communes ; que la commune de Saint-Martin d'Hères est dès lors fondée à soutenir que c'est à tort que le préfet de l'Isère a refusé de les inclure dans les logements sociaux pour le calcul de sa dotation de compensation ; que, toutefois, à la date du 23 juillet 1990 à laquelle la commune a contesté ce refus, les décisions attributives de cette dotation pour les années 1986 à 1988 étaient devenues définitives ; que les conclusions de la commune ne sont donc à la fois recevables et fondées qu'en ce qui concerne la dotation des années 1989 et 1990 ;
Article 1er : Le jugement du 6 avril 1992 du tribunal administratif de Grenoble, et la décision du 18 septembre 1990, par laquelle le préfet de l'Isère a refusé de prendre en compte les résidences universitaires sises sur le territoire de la commune de Saint-Martin d'Hères pour le calcul de la dotation de compensation prévue par l'article L.234-10 du code des communes, sont annulés en tant qu'ils concernent la dotation des années 1989 et 1990.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune de Saint-Martin d'Hères est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la commune de Saint-Martin d'Hères et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.