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12/04/1995 | FRANCE | N°124998

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 12 avril 1995, 124998


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 12 avril 1991 et 12 août 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. René A... demeurant ... - 62124 Bertincourt et pour Mme Isabelle Z..., demeurant ... ; M. A... et Mme Z... demandent que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 7 février 1991 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande dirigée contre l'arrêté du 20 octobre 1987, par lequel le préfet du Pas-de-Calais a autorisé M. François-Xavier X... à exploiter 9 hectares 3 ares 90 centiares de

terres sises sur le territoire de la commune de Ruyaulcourt, ensembl...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 12 avril 1991 et 12 août 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. René A... demeurant ... - 62124 Bertincourt et pour Mme Isabelle Z..., demeurant ... ; M. A... et Mme Z... demandent que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 7 février 1991 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande dirigée contre l'arrêté du 20 octobre 1987, par lequel le préfet du Pas-de-Calais a autorisé M. François-Xavier X... à exploiter 9 hectares 3 ares 90 centiares de terres sises sur le territoire de la commune de Ruyaulcourt, ensemble la décision implicite confirmative du ministre de l'agriculture et la décision expresse notifiée le 16 mai 1988 ;
2°) annule pour excès de pouvoir ces décisions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Philippe Boucher, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de M. A... et de Mme Z... et de Me Cossa, avocat de M. François-Xavier X...,
- les conclusions de M. Daël, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 188-5 du code rural, dans sa rédaction résultant de la loi du 4 juillet 1980 modifiée par la loi du 1er août 1984, la commission départementale des structures agricoles, compétente pour examiner les demandes d'autorisation de cumul d'exploitations, "est tenue de se conformer aux orientations définies dans le schéma directeur départemental des structures agricoles, et notamment : 1°) d'observer l'ordre des priorités établi entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de la demande ; 2°) de tenir compte, en cas d'agrandissement ou de réunion d'exploitations, de la situation des terres concernées par rapport au siège de l'exploitation du ou des demandeurs, de la superficie des biens faisant l'objet de la demande et des superficies déjà mises en valeur par le ou les demandeurs ainsi que par le preneur en place ; 3°) de prendre en considération la situation personnelle du ou des demandeurs : âge, situation familiale et professionnelle, et, le cas échéant, celle du preneur en place, ainsi que le nombre et la nature des emplois salariés en cause ; 4°) de tenir compte de la structure parcellaire des exploitations concernées, soit par rapport au siège de l'exploitation, soit pour éviter que des mutations en jouissance ne remettent en cause des aménagements obtenus à l'aide de fonds publics ... le représentant de l'Etat dans le département statue par décision motivée sur la demande d'autorisation" ; qu'en vertu des dispositions de l'article 1er du schéma directeur départemental des structures agricoles du département du Pas-de-Calais, établi par un arrêté du ministre de l'agriculture en date du 17 décembre 1985, les orientations de la politique d'aménagement des structures d'exploitation dans ce département ont notamment pour objectif d'éviter le démantèlement des exploitations qui ont été reconstituées et restructurées avec des aides publiques ;
Considérant que les décisions par lesquelles, le 7 mai et le 16 septembre 1987, le préfet du Pas-de-Calais a refusé à M. X... l'autorisation d'exploiter 9 hectares 3 ares 90 centiares de terres précédemment mises en valeur par M. A... n'ont créé aucun droit au profit de celui-ci ni au profit de sa fille, Mme Z..., à laquelle il souhaitait céder son bail ; que, par suite, le préfet, saisi d'une nouvelle demande de M. X..., a pu, sans méconnaître aucun droit acquis, même en l'absence de modification des circonstances de fait et de droit, revenir sur sa décision initiale et accorder l'autorisation par un arrêté du 20 octobre 1987 ;
Considérant que si le préfet doit, en vertu des dispositions précitées, motiver sa décision, il ne saurait être tenu de se prononcer expressément sur chacun des éléments dont lesdites dispositions prescrivent de tenir compte ; qu'en l'espèce, l'arrêté attaqué, qui indique qu'eu égard à l'âge et à la situation familiale du demandeur, l'opération est conforme aux priorités du schéma directeur départemental des structures, qui recommandent de permettre aux exploitations d'une superficie inférieure à la surface minimum d'installation d'atteindre ce seuil, est suffisamment motivé ;

Considérant que pour apprécier la situation du demandeur, le préfet et la commission départementale, qui étaient d'ailleurs exactement informés de l'activité agricole de l'épouse de M. X..., n'avaient pas à tenir compte des superficies exploitées par cette dernière, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les deux exploitations, juridiquement distinctes, seraient en réalité exploitées en commun par les deux agriculteurs ; que les éléments de nature à justifier l'octroi ou le refus d'une autorisation d'exploiter devant être appréciés à la date à laquelle la décision préfectorale intervient, l'administration n'avait pas davantage à tenir compte des superficies qui pourraient à l'avenir être transmises à M. X... par ses parents et ceux de son épouse ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'une des parcelles faisant l'objet de la reprise, cadastrée ZI 42, jouxte une autre parcelle qui appartient à M. A... et lui avait été attribuée dans le cadre d'un remembrement ; que les requérants soutiennent qu'en délivrant dans ces circonstances l'autorisation litigieuse, le préfet a méconnu tant les dispositions précitées du 4°) de l'article 188-5 du code rural que celles de l'article 1er du schéma directeur départemental des structures ;
Considérant, d'une part, que si les opérations de remembrement doivent être regardées comme "des aménagements obtenus à l'aide de fonds publics" au sens de l'article 188-5 du code rural, la reprise de la parcelle ZI 42, dont M. A... n'était que locataire, est sans incidence sur les aménagements que les opérations de remembrement avaient apportés à la structure de la propriété de M. A... ; que, par suite, la décision attaquée ne méconnaît pas les dispositions susmentionnées du code rural ;
Considérant, d'autre part, que le financement des opérations de remembrement ne constitue pas une aide publique à la reconstitution et à la restructuration des exploitations agricoles ; que les requérants n'établissent pas, par ailleurs, que l'exploitation de M. A... aurait été "reconstituée et restructurée avec des aides publiques" ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la reprise envisagée soit de nature à démanteler l'exploitation de M. A..., qui conservera, à l'issue de l'opération, une superficie de 82 hectares, soit plus de trois fois la superficie minimum d'installation fixée à 25 hectares dans cette région agricole du département ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... et Mme Y... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande ;
Article 1er : La requête de M. A... et de Mme Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. René A... et Mme Isabelle Y..., à M. X... et au ministre de l'agriculture et de la pêche.


Synthèse
Formation : 5 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 124998
Date de la décision : 12/04/1995
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

03-03-03-01-03 AGRICULTURE, CHASSE ET PECHE - EXPLOITATIONS AGRICOLES - CUMULS - CUMULS D'EXPLOITATIONS - MOTIFS DE LA DECISION - Respect des orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles (article 188-5 du code rural) - Notion de remise en cause des aménagements obtenus à l'aide de fonds publics.

03-03-03-01-03 Les opérations de remembrement sont des aménagements obtenus à l'aide de fonds publics au sens des dispositions du 4° de l'article 188-5 du code rural.


Références :

Arrêté du 17 décembre 1985
Arrêté du 20 octobre 1987
Code rural 188-5
Loi 80-502 du 04 juillet 1980
Loi 84-741 du 01 août 1984


Publications
Proposition de citation : CE, 12 avr. 1995, n° 124998
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: M. Boucher
Rapporteur public ?: M. Daël

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1995:124998.19950412
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