Vu la requête, enregistrée le 26 juin 1990, au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Renato X... demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 27 mars 1990, par lequel le tribunal administratif de Papeete a rejeté sa demande en annulation de la décision du 5 juillet 1989 du Haut-Commissaire de la République en Polynésie française lui refusant le mainitien de l'allocation au jeune enfant ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser ladite allocation augmentée des intérêts moratoires ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 50-772 du 30 juin 1950 ;
Vu le décret n° 67-600 du 23 juillet 1967 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Bergeal, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Scanvic, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 5 du décret du 23 juillet 1967 susvisé relatif au régime de rémunération des magistrats et des fonctionnaires de l'Etat en service dans les territoires d'outre-mer : "Le régime des prestations familiales auquel les magistrats et fonctionnaires visés à l'article 1er sont soumis est celui en vigueur dans le territoire en cause. Toutefois, lorsque les intéressés proviendront de la métropole, d'un département ou d'un territoire d'outre-mer où ils résident habituellement et où ils auraient vocation à bénéficier d'un régime d'allocations plus favorable, ils recevront, à titre personnel, les prestations pour charge de famille prévues par ce régime. Ceux provenant de métropole recevront, à titre personnel, les prestations pour charges de famille qu'ils percevraient s'ils étaient en service à Paris ..." ;
Considérant que le versement de prestations de cette nature accordés aux fonctionnaires de l'Etat en service dans les territoire d'outre-mer constituent un élément de leur rémunération statutaire et ne sauraient, par suite, être regardés comme des prestations familiales au sens des articles L.511-1 et suivants du code de la sécurité sociale ; que le juge administratif est, dès lors, seul compétent pour connaître du refus de l'octroi d'un tel avantage ; que c'est, par suite, à tort que le tribunal administratif de Papeete a rejeté comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître la demande de M. X..., fonctionnaire affecté en Polynésie française, tendant à l'annulation du refus du Haut-Commissaire en date du 5 juillet 1989 de lui maintenir le bénéfice de l'allocation au jeune enfant ; qu'ainsi le jugement du tribunal administratif de Papeete, en date du 27 mars 1990, doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Papeete ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision attaquée :
Considérant que l'allocation pour jeune enfant est versée au ménage ou à la personne qui remplit, d'une part, les conditions d'ouverture du droit aux prestations familiales et, d'autre part des conditions relatives à l'âge des enfants, et qu'elle continue à être servie au delà du troisième mois de l'enfant, lorsque les ressources du ménage n'excèdent pas un plafond variable selon le nombre des enfants à charge ; qu'aux termes de l'article R. 531-10 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée, issue du décret n° 89-999 du 22 décembre 1989 : "les ressources prises en considération s'entendent du revenunet imposable de l'année civile antérieure à l'exercice au cours duquel le droit à l'allocation est ouvert ou maintenu" ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du décret du 23 juillet 1967 que la condition de ressources doit être appréciée par rapport au montant des ressources dont les fonctionnaires concernés auraient bénéficié, s'ils étaient en service à Paris, ces ressources étant définies comme il est indiqué par l'article R. 531-10 précité ; que ces ressources doivent, dès lors, comprendre les rémunérations de ces fonctionnaires, avant application du coefficient de majoration propre à chaque territoire prévu à l'article 1er du décret du 23 juillet 1967 ;
Considérant qu'en refusant à M. X... l'allocation pour jeune enfant au motif que sa rémunération, calculée en tenant compte du coefficient de majoration, excédait le plafond de ressources applicable, le Haut-Commissaire a commis une erreur de droit ; qu'il s'ensuit que M. X... est fondé à demander l'annulation de la décision du 5 juillet 1989 lui refusant le bénéfice de l'allocation pour jeune enfant ;
Sur les conclusions tendant au versement de l'allocation pour jeune enfant :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Papeete tendait exclusivement à l'annulation de la décision susmentionnée du Haut-Commissaire de la République ; que sont, par suite, irrecevables les conclusions, présentées pour la première fois devant le Conseil d'Etat par M. X..., et tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser l'allocation pour jeune enfant ;
Article 1er : La décision du 5 juillet 1989 du Haut-Commissaire de la République en Polynésie française est annulée.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X..., au Haut-Commissaire de la République en Polynésie française et au ministre des départements et territoires d'outre-mer.