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05/05/1995 | FRANCE | N°90580

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 05 mai 1995, 90580


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 août 1987 et 21 octobre 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Anne-Marie X... demeurant ... ; Mme X... demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement n° 15009 en date du 29 juin 1987 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à ce que le ministère de l'éducation nationale soit condamné, d'une part à l'indemniser du préjudice qu'elle soutient avoir subi du fait de sa mise en congé sans solde pour une durée de trois ans à compter du 1er

mai 1982, d'autre part à lui verser le montant des rémunérations a...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 août 1987 et 21 octobre 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Anne-Marie X... demeurant ... ; Mme X... demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement n° 15009 en date du 29 juin 1987 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à ce que le ministère de l'éducation nationale soit condamné, d'une part à l'indemniser du préjudice qu'elle soutient avoir subi du fait de sa mise en congé sans solde pour une durée de trois ans à compter du 1er mai 1982, d'autre part à lui verser le montant des rémunérations acquises pour compter de sa réintégration, soit le 1er mai 1985 ; elle conclut à ce que l'Etat lui verse une somme de 350 000 F en réparation de sa mise en congé sans solde irrégulièrement prononcée, et à ce que lui soit également versée une somme de 130 000 F au titre des rémunérations acquises mais non perçues ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 59-1405 du 9 décembre 1959 modifié notamment par le décret n° 70-168 du 2 mars 1970 ;
Vu le décret n° 68-986 du 14 novembre 1968 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Desrameaux, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Ryziger, avocat de Mme Anne-Marie X...,
- les conclusions de M. Aguila, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions dirigées contre le jugement attaqué en tant qu'il rejette la demande présentée par Mme X... tendant à l'allocation d'une indemnité à raison de son congé non rémunéré de 1982 à 1985 :
Considérant que Mme X... a présenté au tribunal administratif de Besançon le 16 décembre 1985 une demande, enregistrée sous le n° 14751, tendant au versement d'une somme de 200 000 F en réparation du préjudice qu'elle estimait avoir subi du fait de la décision la plaçant en position de congé non rémunéré pour une durée de trois ans à compter du 1er mai 1982 ; que la demande susanalysée a été rejetée par un jugement distinct du jugement attaqué, rendu par le même tribunal également le 29 juin 1987 ; que ce jugement n'a pas été frappé d'appel et est, par suite, devenu définitif ; qu'ainsi le ministre de l'éducation nationale est fondé à soutenir que la chose jugée par le jugement du tribunal administratif de Besançon n° 14751 fait obstacle à ce que puissent être présentées devant le Conseil d'Etat, à l'occasion de l'appel dirigé contre le jugement n° 15009 du même tribunal, des conclusions ayant le même objet et la même cause juridique que celles qui ont été rejetées par le jugement non attaqué ; qu'il suit de là que les conclusions susanalysées ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions dirigées contre le jugement attaqué en tant qu'il rejette la demande tendant au paiement de la rémunération de la requérante, postérieurement au 1er mai 1985 :
Considérant que Mme X... produit devant le Conseil d'Etat, juge d'appel, la copie de quatre demandes dont elle a saisi l'administration au cours de l'année 1985, et qui tendaient à obtenir le versement de sa rémunération à compter de la fin de son congé non rémunéré ; qu'il est constant que l'administration, qui ne conteste pas l'existence desdites demandes, n'a pas statué sur celles-ci ; qu'ainsi du silence gardé par l'administration sur lesdites demandes est née une décision implicite de rejet ; que, dès lors, la fin de non-recevoir opposée par le ministre devant les premiers juges tirée du défaut de demande préalable liant le contentieux n'était pas fondée ; qu'il suit de là que le jugement susvisé doit être annulé en tant qu'il a rejeté en opposant cette fin de non-recevoir, les demandes présentées par Mme X... tendant au paiement de sa rémunération, postérieurement à sa réintégration ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur ladite demande ;

Considérant qu'aux termes de l'article 31 du décret susvisé du 9 décembre 1959, tel que modifié par le décret du 2 mars 1970 : "Les agents bénéficiaires de congés pour convenances personnelles sont réintégrés au plus tard huit mois après la date d'expiration de leurs congés ( ...). Ils recoivent une nouvelle affectation dans les conditions fixées à l'article 46 ( ...)" ;que l'article 46 du même décret dispose que : "Pour son reclassement, il est proposé successivement à l'intéressé trois affectations dans un emploi exigeant une compétence professionnelle de la nature de celle que nécessitait son emploi antérieur ou d'une nature voisine. Il peut être également tenu compte, pour la détermination des affectations proposées, de la compétence acquise par l'intéressé ( ...) depuis qu'il s'est trouvé privé de son affectation antérieure. L'un au moins des trois emplois ainsi proposés doit se trouver dans le même département que l'emploi antérieur ( ...)" ;
Considérant, en premier lieu, que, dès lors que le congé de Mme X... avait pris fin le 1er mai 1985, elle devait être réintégrée au plus tard le 1er janvier 1986 ; qu'il résulte de l'instruction qu'une proposition d'affectation au sein de l'université de Besançon a été faite à Mme X... le 13 février 1986 et que l'intéressée a décliné cette proposition comme elle en avait le droit ; que si trois autres propositions de postes classés en catégorie 8B lui ont ensuite été faites, respectivement au sein des universités de Paris IV, Paris XI et AixMarseille II, les fonctions correspondantes étaient de nature entièrement différente de celle de son emploi antérieur ; que dès lors ces trois propositions ont été faites à Mme X... en méconnaissance des dispositions de l'article 46 précité du décret du 9 décembre 1959 modifié ;
Considérant, en second lieu, qu'il ressort également de l'instruction que, par lettre en date du 7 mai 1987, Mme X... a fait savoir au ministre de l'éducation nationale qu'elle refusait d'accepter tout poste relevant de la catégorie 8B à laquelle elle n'avait pourtant pas cessé d'appartenir ; que, dès lors, elle ne pouvait plus, pour compter de la même date, être regardée comme étant involontairement privée de l'exercice de ses fonctions ; qu'il suit de là que Mme X... n'est en droit de prétendre au versement d'une indemnité correspondant au montant de la rémunération qui lui aurait été versée que pour la période allant du 1er janvier 1986 au 7 mai 1987, pendant laquelle elle a été involontairement privée de l'exercice de ses fonctions du fait de la carence fautive de l'administration sous déduction éventuelle des sommes que l'intéressée aurait pu percevoir au cours de cette période au titre d'un nouvel emploi rétribué ;
Considérant que l'état de l'instruction ne permet pas de déterminer le montant de l'indemnité due à Mme X... ; qu'il y a lieu de la renvoyer devant le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche pour qu'il soit procédé à la liquidation de cette indemnité sur la base des indications qui précèdent ;
Article 1er : Le jugement n° 15009 du tribunal administratif de Besançon du 29 juin 1987 est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de Mme X... tendant au versement d'une indemnité en réparation du préjudice résultant pour elle de la non perception de sa rémunération postérieurement à sa réintégration.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à Mme X... une indemnité correspondant au montant de la rémunération qui aurait dû lui être versée entre le 1er janvier 1986 et le 7 mai 1987 sous déduction, le cas échéant, des rémunérations qu'elle aurait pu percevoir au titre d'un autre emploi rétribué.
Article 3 : Mme X... est renvoyée devant le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche pour qu'il soit procédé à la liquidation de l'indemnité à laquelle elle a droit sur les bases ci-dessus définies.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Anne-Marie X... et au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.


Synthèse
Formation : 4 ss
Numéro d'arrêt : 90580
Date de la décision : 05/05/1995
Type d'affaire : Administrative

Analyses

36-06 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - NOTATION ET AVANCEMENT.


Références :

Décret 59-1405 du 09 décembre 1959 art. 31, art. 46
Décret 70-168 du 02 mars 1970


Publications
Proposition de citation : CE, 05 mai. 1995, n° 90580
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Desrameaux
Rapporteur public ?: M. Aguila

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1995:90580.19950505
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