La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/05/1995 | FRANCE | N°144478

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 26 mai 1995, 144478


Vu 1°, sous le n° 144 478, la requête, enregistrée le 19 janvier 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le COMITE ANTI-POLLUTION "VIVRE EN MAURIENNE", dont le siège est Villebernon à Saint-Michel-deMaurienne (73140) ; le comité demande l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 17 novembre 1992 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de construction de la section Aiton-Le Freney de l'autoroute A 43 ;
Vu 2°, sous le n° 149 950, la requête, enregistrée le 15 juillet 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présent

ée par la FEDERATION RHONE-ALPES DE LA PROTECTION DE LA NATURE (Frapna...

Vu 1°, sous le n° 144 478, la requête, enregistrée le 19 janvier 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le COMITE ANTI-POLLUTION "VIVRE EN MAURIENNE", dont le siège est Villebernon à Saint-Michel-deMaurienne (73140) ; le comité demande l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 17 novembre 1992 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de construction de la section Aiton-Le Freney de l'autoroute A 43 ;
Vu 2°, sous le n° 149 950, la requête, enregistrée le 15 juillet 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la FEDERATION RHONE-ALPES DE LA PROTECTION DE LA NATURE (Frapna-Savoie), dont le siège social est ... d'Or à Chambéry (73000), représentée par son président en exercice ; la FEDERATION RHONE-ALPES DE LA PROTECTION DE LA NATURE demande l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 17 novembre 1992 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de construction de la section Aiton-Le Freney de l'autoroute A 43 ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le traité de Rome instituant la communauté économique européenne ;
Vu la directive n° 85-337 de la communauté économique européenne du 27 juin 1985 ;
Vu la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 ;
Vu la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 ;
Vu la loi n° 83-630 du 12 juillet 1983 ;
Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 ;
Vu le décret n° 84-617 du 17 juillet 1984 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fougier, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Sanson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre un même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il soit statué par une même décision ;
Sur les interventions :
Considérant que l'association "Valorisation de la Maurienne" et l'association de défense d'intérêt général d'Aiguebelle ont intérêt à l'annulation du décret attaqué ; qu'ainsi, leurs interventions, présentées au soutien de la requête du COMITE ANTI-POLLUTION "VIVRE EN MAURIENNE", sont recevables ;
Sur les moyens de légalité externe :
En ce qui concerne l'absence d'enquête hydraulique :
Considérant que l'enquête hydraulique, régie par le décret du 1er août 1905 portant exécution de l'article 12 de la loi du 8 avril 1898, et l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique répondent à des objectifs distincts et obéissent à des législations différentes ; qu'il suit de là que l'administration n'était pas tenue de procéder à l'enquête hydraulique avant l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique ;
En ce qui concerne la composition du dossier soumis à enquête :
Considérant que l'évaluation économique et sociale du projet, réalisée en application des dispositions des articles 3 et 14 de la loi du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, comprend l'ensemble des analyses prévues par l'article 4 du décret du 17 juillet 1984 ; que la circonstance qu'elle ne procède pas à la comparaison économique du projetavec d'autres projets possibles relevant de modes de transport différents ne permet pas de la regarder comme insuffisante au regard des exigences de l'article 14 de la loi du 30 décembre 1982 ;
Considérant que l'étude d'impact figurant au dossier d'enquête a été établie conformément aux prescriptions de l'article 2 du décret du 12 octobre 1977 ; qu'en particulier, elle comporte une analyse des effets sur l'environnement de la réalisation du projet, notamment en ce qui concerne l'impact sur le paysage, les risques de pollution de l'eau, les nuisances phoniques et l'incidence de coupures biologiques ; qu'elle énumère les mesures envisagées pour réduire les conséquences dommageables du projet ainsi que leur mise en oeuvre appropriée compte-tenu de ses conditions ultérieures de réalisation ; que si les associations requérantes allèguent qu'aucune étude n'a été faite de l'impact du trafic autoroutier sur la pollution atmosphérique, le ministre de l'équipement, des transports et du tourisme fait valoir, sans être utilement contredit, que le trafic prévu n'induira pas de nuisances supplémentaires mesurables ;

Considérant qu'il ressort clairement de l'article 189 du traité du 25 mars 1957 que si les directives lient les Etats membres "quant au résultat à atteindre" et si, pour atteindre le résultat qu'elles définissent, les autorités nationales sont tenues d'adapter la législation et la réglementation des Etats membres aux directives qui leur sont destinées, ces autorités restent seules compétentes pour décider de la forme à donner à l'exécution des directives et pour fixer elles-mêmes, sous le contrôle des juridictions nationales, les moyens propres à leur faire produire des effets en droit interne ; qu'ainsi, quelles que soient d'ailleurs les précisions qu'elles contiennent à l'intention des Etats membres, les directives ne sauraient être invoquées par les ressortissants de ces Etats à l'encontre d'un acte administratif non réglementaire ; qu'il suit de là que les associations requérantes ne peuvent utilement soutenir que l'étude d'impact jointe au dossier d'enquête méconnaît les dispositions de la directive du 27 juin 1985 susvisée ;
En ce qui concerne le rapport de la commission d'enquête :
Considérant qu'en vertu du sixième alinéa de l'article 4 de la loi du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l'environnement, le rapport de la commission d'enquête "doit faire état des contre-propositions qui auront été produites durant l'enquête ainsi que des réponses éventuelles du maître d'ouvrage" ; qu'il ressort des énonciations du rapport de la commission d'enquête ainsi que des cinq sous-rapports qui l'accompagnent qu'il a été satisfait à ces exigences ;
Sur la légalité interne :
Considérant qu'une opération ne peut être légalement déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;
Considérant que la construction de la section Aiton-Le Freney de l'autoroute A 43 a pour objet de permettre un écoulement du trafic des véhicules par la vallée de la Maurienne correspondant au développement des échanges entre la France et l'Italie dans le cadre du marché unique européen ; que ce projet revêt un caractère d'utilité publique ; qu'eu égard aux précautions prises, en particulier pour limiter les atteintes portées à l'environnement, les inconvénients de toute nature que comporte ce projet ne peuvent être regardés comme excessifs par rapport à l'intérêt qu'il présente ;
Considérant que, pour les mêmes motifs, les associations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le décret attaqué méconnaîtrait les dispositions de la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature ;
Considérant, enfin, que si les associations requérantes prétendent qu'un autre tracé aurait présenté des inconvénients moindres que le tracé retenu, il n'appartient pas au Conseil d'Etat statuant au Contentieux d'apprécier l'opportunité du tracé choisi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les associations requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation du décret attaqué ;
Article 1er : Les interventions de l'association "Valorisation de la Maurienne" et de l'association de défense d'intérêt général d'Aiguebelle sont admises.
Article 2 : Les requêtes du COMITE ANTI-POLLUTION "VIVRE EN MAURIENNE" et de la FEDERATION RHONE-ALPES DE PROTECTION DE LA NATURE sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au COMITE ANTI-POLLUTION "VIVRE EN MAURIENNE", à la FEDERATION RHONE-ALPES DE PROTECTION DE LA NATURE, à l'association "Valorisation de la Maurienne", à l'association de défense d'intérêt général d'Aiguebelle, au ministre de l'aménagement du territoire, de l'équipement et des transports et au Premier ministre.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

34 EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE.


Références :

Décret du 01 août 1905
Décret 77-1141 du 12 octobre 1977 art. 2
Décret 84-617 du 17 juillet 1984 art. 4
Loi du 08 avril 1898 art. 12
Loi 76-629 du 10 juillet 1976
Loi 82-1153 du 30 décembre 1982 art. 3, art. 14
Loi 83-630 du 12 juillet 1983 art. 4


Publications
Proposition de citation: CE, 26 mai. 1995, n° 144478
Inédit au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Fougier
Rapporteur public ?: M Sanson

Origine de la décision
Formation : 6 / 2 ssr
Date de la décision : 26/05/1995
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 144478
Numéro NOR : CETATEXT000007883677 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1995-05-26;144478 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award