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21/06/1995 | FRANCE | N°115596

France | France, Conseil d'État, 10 ss, 21 juin 1995, 115596


Vu 1°, sous le n° 115 596, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 21 mars 1990 et le 9 juillet 1990, présentés pour M. Albert Y..., demeurant ... à paris (75016) ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
- d'annuler le jugement en date du 18 décembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de M. X..., l'arrêté du maire de Paris en date du 7 novembre 1988 lui accordant un permis de démolir les locaux du dernier étage et une partie de la toiture d'un immeuble situé ... ;<

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Vu 1°, sous le n° 115 596, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 21 mars 1990 et le 9 juillet 1990, présentés pour M. Albert Y..., demeurant ... à paris (75016) ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
- d'annuler le jugement en date du 18 décembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de M. X..., l'arrêté du maire de Paris en date du 7 novembre 1988 lui accordant un permis de démolir les locaux du dernier étage et une partie de la toiture d'un immeuble situé ... ;
- de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu 2°, sous le n° 115 597, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 21 mars 1990 et le 9 juillet 1990, présentés pour la Société civile immobilière ETOILE VICTOR HUGO, dont le siège est ..., représentée par son gérant en exercice ; la Société civile immobilière ETOILE VICTOR HUGO demande au Conseil d'Etat :
- d'annuler le jugement en date du 18 décembre 1989 par lequel le tribunal administratif Paris a annulé, à la demande de M. X..., l'arrêté du maire de Paris en date du 12 décembre 1988 lui accordant un permis de construire en vue de la modification du dernier étage et de la toiture d'un immeuble situé ... ;
- de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 11 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Simon-Michel, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Copper-Royer, avocat de M. Albert Y... et de la Société civile immobilière ETOILE VICTOR HUGO, de la SCP Gatineau, avocat de M. Thierry X... et de Me Foussard, avocat de la ville de Paris,
- les conclusions de M. Scanvic, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de M. Y... et de la Société civile immobilière ETOILE VICTOR HUGO sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y lieu de les joindre pour statuer par une même décision ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 430-1 du code de l'urbanisme : "La demande de permis de démolir est présentée soit par le propriétaire du bâtiment ou son mandataire, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à exécuter les travaux ..." et qu'aux termes de l'article R. 421-1-1 du même code : "La demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y... et la Société civile immobilière ETOILE VICTOR HUGO ont sollicité respectivement un permis de démolir et un permis de construire en vue d'effectuer des travaux au dernier étage d'un immeuble placé sous le régime de la copropriété et situé ... ; que les pétitionnaires ont joint à leurs demandes le procès-verbal d'une délibération de l'assemblée générale des copropriétaires tenue le 24 septembre 1987 aux termes de laquelle étaient acceptés notamment "le prolongement du grand escalier du 6ème au 7ème étage, ( ...) une intervention sur les éléments qui assurent le clos, le couvert et l'étanchéité, la couverture-terrasse du bâtiment et d'une manière générale tout ce qui forme l'ossature du bâtiment dans son ensemble, lasurélévation ou la suppression des conduits de fumée, coffres et gaines ainsi que des têtes et souches de cheminées, la création de balustrades de protection, la modification de certaines fenêtres et châssis" ; qu'au vu de cette délibération et sans avoir l'obligation de se livrer à des investigations complémentaires, l'administration a estimé à bon droit que M. Y... et la Société civile immobilière ETOILE VICTOR HUGO pouvaient être regardés comme ayant été autorisés à effectuer les travaux décrits dans leur demande de permis et comprenant, notamment, une légère surélévation de la toiture de l'immeuble ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la méconnaissance des articles précités du code de l'urbanisme pour annuler les arrêtés du maire de Paris en date des 7 novembre et 12 décembre 1988 délivrant à M. Y... un permis de démolir et à la Société civile immobilière ETOILE VICTOR HUGO un permis de construire ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... tant devant le tribunal administratif que devant le Conseil d'Etat ;
Sur la légalité du permis de démolir :
Considérant, en premier lieu, que si M. X... fait valoir que la délibération de l'assemblée générale des copropriétaires ne serait pas valable faute que son procès-verbal ait été signé par le président de cette assemblée, le maire de Paris ne pouvait ni s'immiscer dans cette contestation d'ordre privé ni surseoir à l'intervention des décisions qu'il était tenu de prendre sur les demandes dont il était saisi ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de la délibération précitée du 24 septembre 1987 a été acceptée par l'assemblée des copropriétaires la "privatisation" du grand escalier à partir du 6ème étage et du palier du 7ème étage ; que, par suite, le moyen tiré de ce que ladite délibération n'aurait pas autorisé la "privatisation" des parties communes manque en fait ;
Considérant, en troisième lieu, que si M. X... soutient que les plans fournis par les pétitionnaires à l'appui de leur demande indiquaient à tort que les travaux de prolongement de l'escalier principal et de l'ascenseur étaient déjà effectués, ce moyen ne peut être utilement invoqué à l'encontre du permis de démolir ;
Considérant, en quatrième lieu, que l'inexactitude qui entacherait le visa de la demande de permis de démolir est sans influence sur la légalité dudit permis ;
Considérant, en dernier lieu, que M. X... ne peut invoquer utilement, à l'encontre du permis de démolir, ni la méconnaissance de l'article UH 15 du plan d'occupation des sols de la ville de Paris, ni par la voie de l'exception, l'illégalité de cet article, dès lors que ledit permis n'a pas été délivré en application de cet article ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé le permis de démolir en date du 7 novembre 1988 ;
Sur la légalité du permis de construire :
Considérant qu'en vertu de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, les règles des plans d'occupation des sols concernant le droit d'implanter des constructions, leur destination et leur nature, l'aspect extérieur des constructions, leurs dimensions et l'aménagement de leurs abords, "peuvent prévoir des normes de construction différentes de celles qui résultent de l'application du coefficient d'occupation des sols, soit en raison de prescriptions d'urbanisme ou d'architecture, soit en raison de l'existence de projets tendant à renforcer la capacité des équipements collectifs" ; que, toutefois, lorsqu'un plan d'occupation des sols contient des règles qui, en application des dispositions précitées, autorisent des dépassements de coefficient d'occupation des sols, il doit prévoir des "normes de construction" et fixer en particulier, directement ou indirectement, un plafond aux dépassements de coefficient d'occupation des sols autorisés ;
Considérant que l'article UH 15 du plan d'occupation des sols de la ville de Paris qui autorise, sans limitation, un dépassement de coefficient d'occupation des sols, notamment pour des raisons d'architecture ou d'urbanisme, sous la seule réserve que les autres règles relatives aux conditions d'occupation des sols, à la nature de l'occupation et de l'utilisation des sols soient respectées, est de ce fait entaché d'illégalité ; que, par voie de conséquence, l'arrêté en date du 12 décembre 1988 par lequel le maire de Paris a accordé, sur le fondement de cet article UH 15, un permis de construire à la Société civile immobilière ETOILE VICTOR HUGO est lui-même entaché d'excès de pouvoir ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Société civile immobilière ETOILE VICTOR HUGO n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé le permis de construire en date du 12 décembre 1988 ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'aux termes de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ..." ; qu'il y a lieu, en application de ces dispositions, de faire droit aux conclusions présentées par M. X... sous le n° 115 597 en condamnant la Société civile immobilière ETOILE VICTOR HUGO et la ville de Paris à lui verser respectivement la somme de 10 000 F et la somme de 5 000 F ; qu'en revanche, ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par M. X... sous le n° 115 596 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 18 décembre 1989 est annulé en tant qu'il annule l'arrêté du maire de Paris en date du 7 novembre 1988 accordant à M. Y... un permis de démolir.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris et tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Paris du 7 novembre 1988 accordant un permis de démolir à M. Y... est rejetée.
Article 3 : La Société civile immobilière ETOILE VICTOR HUGO et la ville de Paris sontcondamnées à verser respectivement à M. X... les sommes de 10 000 F et de 5 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La requête de la Société civile immobilière ETOILE VICTOR HUGO et le surplus des conclusions de M. X... tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetés.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Albert Y..., à la Société civile immobilière ETOILE VICTOR HUGO, à la ville de Paris, à M. X... et au ministre de l'aménagement du territoire, de l'équipement et des transports.


Synthèse
Formation : 10 ss
Numéro d'arrêt : 115596
Date de la décision : 21/06/1995
Type d'affaire : Administrative

Analyses

68-04-01 URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - AUTRES AUTORISATIONS D'UTILISATION DES SOLS - PERMIS DE DEMOLIR.


Références :

Code de l'urbanisme R430-1, R421-1-1, L123-1
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 21 jui. 1995, n° 115596
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Simon-Michel
Rapporteur public ?: M. Scanvic

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1995:115596.19950621
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