Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE ANONYME "BRASSERIE FISCHER", ayant son siège à Schiltigheim (67300) ; la société demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement, en date du 6 septembre 1994, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a sursis à statuer sur la demande de la société tendant à l'annulation de la décision du préfet du Bas-Rhin, en date du 28 juin 1993, refusant d'autoriser le transfert d'une licence de débit de boissons ;
2°) d'annuler ladite décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des débits de boissons et des mesures contre l'alcoolisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Silicani, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Frydman, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a sursis à statuer sur la demande de la SOCIETE ANONYME "BRASSERIE FISCHER" tendant à l'annulation de la décision du 28 juin 1993 par laquelle le préfet du Bas-Rhin a refusé d'autoriser le transfert d'une licence de débits de boissons détenue par ladite société et exploitée à Strasbourg, sous l'enseigne "La Baraka", jusqu'à ce que le juge judiciaire se soit prononcé sur la question de la validité de la licence en cause ;
Considérant qu'aux termes de l'article 33 du code local des professions, seul applicable aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, en vertu des dispositions de l'article L.98 du code des débits de boissons et des mesures contre l'alcoolisme : "Quiconque veut exploiter une hôtellerie, un débit de boissons ou un commerce au détail d'eau-de-vie ou de spiritueux, doit obtenir une autorisation à cet effet ... Avant d'accorder la licence, les autorités communales et la police locale seront appelées à donner leur avis" ; qu'ainsi, cette procédure ne prévoit pas, contrairement à celle résultant des dispositions des articles L.31 et L.32 du code des débits de boissons, applicable aux autres départements français, l'intervention du procureur de la République ; que, par suite, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, le juge administratif est compétent pour apprécier la validité de la licence dont le transfert est demandé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE ANONYME "BRASSERIE FISCHER" est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a sursis à statuer sur sa demande jusqu'à ce que le juge judiciaire se soit prononcé sur la validité de la licence dont elle demandait le transfert ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par la SOCIETE ANONYME "BRASSERIE FISCHER" devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la demande :
Considérant qu'aux termes de l'article L.44 du code des débits de boissons et des mesures contre l'alcoolisme : "Tout débit de boissons de deuxième, de troisième et de quatrième catégorie qui a cessé d'exister depuis plus d'un an est considéré comme supprimé et ne peut plus être transmis. - Toutefois, en cas de faillite ou de liquidation judiciaire, le délai d'un an est étendu, s'il y a lieu, jusqu'à clôture des opérations ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le débit de boissons dénommé "La Baraka" avait cessé d'être exploité depuis le 27 mai 1991 ; que la SOCIETE ANONYME "BRASSERIE FISCHER", titulaire de la licence, n'étant l'objet d'aucune procédure de mise en faillite ou de liquidation judiciaire, la prolongation du délai d'un an prévue par les dispositions précitées ne trouvait pas à s'appliquer ; qu'à l'issue du délai d'un an, le préfet du Bas-Rhin était, dès lors, tenu de refuser l'autorisation de transfert demandée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande présentée parla SOCIETE ANONYME "BRASSERIE FISCHER" devant le tribunal administratif, tendant à l'annulation de la décision du préfet du Bas-Rhin en date du 28 juin 1993, ne peut qu'être rejetée ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg, en date du 6 septembre 1994, est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la SOCIETE ANONYME "BRASSERIE FISCHER" devant le tribunal administratif et le surplus de ses conclusions devant le Conseil d'Etat sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE ANONYME "BRASSERIE FISCHER" et au ministre de l'économie et des finances.