Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 7 avril 1993, présentée par M. Pierre X..., demeurant ..., agissant en tant que président de la fondation pour les études de défense nationale et par M. Z... HAMON, demeurant ... ; MM. X... et Y... demandent que le Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir :
1°) le décret du 26 février 1993 portant abrogation du décret du 17 juillet 1972 qui avait reconnu comme établissement d'utilité publique la fondation pour les études de défense nationale ;
2°) le décret du 26 février 1993 portant reconnaissance comme établissement d'utilité publique de la fondation pour les études de défense ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Pêcheur, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Scanvic, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la requête par le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire :
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre le décret du 26 février 1993 abrogeant le décret du 17 juillet 1972 portant reconnaissance de la Fondation pour les études de défense nationale comme établissement d'utilité publique :
Sur la compétence du Premier ministre :
Considérant qu'en vertu de l'article 21 de la Constitution, le Premier ministre, notamment, dirige l'action du Gouvernement et assure l'exécution des lois ; qu'il est constant que le décret du 17 juillet 1972 n'avait pas été délibéré en Conseil des ministres ; que, par suite, la circonstance que le Chef de l'Etat avait pourtant signé ce décret n'entraînait pas comme conséquence que ce texte dût être modifié ou abrogé par décret du Président de la République ; que, dès lors, le décret attaqué, pris sous la seule signature du Premier ministre, n'est entaché d'aucune incompétence ;
Sur la légalité interne du décret attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article 18 de la loi du 23 juillet 1987 : "La fondation est l'acte par lequel une ou plusieurs personnes physiques ou morales décident l'affectation irrévocable de biens, droits ou ressources à la réalisation d'une oeuvre d'intérêt général et à but non lucratif. Lorsque l'acte de fondation a pour but la création d'une personne morale, la fondation ne jouit de la capacité juridique qu'à compter de la date d'entrée en vigueur du décret en Conseil d'Etat accordant la reconnaissance d'utilité publique. Elle acquiert alors le statut de fondation reconnue d'utilité publique. La reconnaissance d'utilité publique peut être retirée dans les mêmes formes" ;
Considérant, en premier lieu, que le décret attaqué, pris sur le fondement de l'article précité, était motivé par l'insuffisance des ressources propres de la Fondation pour les études de défense nationale ; qu'il ressort des pièces du dossier que ladite Fondation était, en raison de l'insuffisance de sa dotation, étroitement dépendante des contributions de l'Etat, d'ailleurs en diminution sensible ; qu'en se fondant sur ce motif, lequel ne repose pas sur des faits matériellement inexacts et n'est pas entaché d'erreur de droit, pour retirer la reconnaissance d'utilité publique de la Fondation dont s'agit, le Gouvernement s'est livré à une appréciation qui n'est pas entachée d'erreur manifeste ;
Considérant, en second lieu, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret susmentionné du 26 février 1993 ;
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre le décret du 26 février 1993 portant reconnaissance de la "Fondation pour les études de défense" comme établissement d'utilité publique :
Considérant que les requérants se bornent à poursuivre l'annulation de ce décret par voie de conséquence de l'annulation du décret de même date abrogeant le décret du 17 juillet 1972 portant reconnaissance de la Fondation pour les études de défense nationale comme établissement d'utilité publique ; que ces conclusions, qui ne sont assorties d'aucun moyen spécifique dirigé contre le décret attaqué, ne sont en tout état de cause pas recevables ;
Article 1er : La requête de M. X... et M. Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Pierre X..., au Premier ministre et au ministre de l'intérieur.