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13/09/1995 | FRANCE | N°139447

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 13 septembre 1995, 139447


Vu 1°), sous le n° 139 447, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 20 juillet 1992 et le 20 novembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION "COLLECTIF POUR LA DEFENSE DU DROIT ET DES LIBERTES", ayant son siège ..., représentée par ses représentants légaux en exercice ; l'ASSOCIATION "COLLECTIF POUR LA DEFENSE DU DROIT ET DES LIBERTES" demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 92-456 du 22 mai 1992 pris pour l'application du décret du 30 octobre 1935 modifié par la loi n° 91-13

82 du 30 décembre 1991 et relatif au refus de paiement des chèques ...

Vu 1°), sous le n° 139 447, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 20 juillet 1992 et le 20 novembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION "COLLECTIF POUR LA DEFENSE DU DROIT ET DES LIBERTES", ayant son siège ..., représentée par ses représentants légaux en exercice ; l'ASSOCIATION "COLLECTIF POUR LA DEFENSE DU DROIT ET DES LIBERTES" demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 92-456 du 22 mai 1992 pris pour l'application du décret du 30 octobre 1935 modifié par la loi n° 91-1382 du 30 décembre 1991 et relatif au refus de paiement des chèques et à l'interdiction d'émettre des chèques ;
Vu 2°), sous le n° 139519, la requête, enregistrée le 20 juillet 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Olivier X..., demeurant ... ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le décret-loi du 30 octobre 1935 modifié par la loi n° 91-1382 du 30 décembre 1991 ;
Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de la Verpillière, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'ASSOCIATION "COLLECTIF POUR LA DEFENSE DU DROIT ET DES LIBERTES",
- les conclusions de M. Sanson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées de l'ASSOCIATION "COLLECTIF POUR LA DEFENSE DU DROIT ET DES LIBERTES" et de M. X... sont dirigées contre un même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des requêtes :
- Sur les moyens dirigés contre l'ensemble du décret :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le décret attaqué reprend les dispositions qui ont été soumises au Conseil d'Etat ou qui ont été adoptées par lui ; que le gouvernement pouvait légalement ne pas édicter les dispositions de l'article 10 du projet soumis au Conseil d'Etat, lesquelles n'étaient pas inséparables du reste du texte ; qu'ainsi les requérants, qui ne peuvent utilement invoquer les dispositions, sans application en l'espèce, de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne sont pas fondés à soutenir que le décret aurait été incompétemment pris, faute de consultation régulière du Conseil d'Etat ;
- Sur l'article 8 du décret attaqué :
Considérant qu'en vertu du premier alinéa de l'article 65-3 ajouté au décret du 30 octobre 1935 par l'article 6 de la loi n° 91-1382 du 30 décembre 1991 le banquier tiré qui a refusé le paiement d'un chèque pour défaut de provision suffisante doit enjoindre au titulaire du compte de restituer à tous ses banquiers les formules de chèques en sa possession et de ne plus émettre de chèques, sous les réserves mentionnées audit article 65-3 ; que l'article 6 du décret attaqué dispose que l'injonction ainsi prévue est adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; que, dès réception de cette injonction, les obligations légales pesant sur le titulaire du compte se trouvent précisées ; qu'en disposant dans son article 8 que "lorsqu'un incident de paiement survient sur le même compte après un précédent incident non régularisé, une nouvelle injonction est adressée au moyen d'une lettre simple", les auteurs du décret attaqué se sont bornés à prescrire une simple mesure d'information du tireur qui lui permet de connaître le nombre et l'importance des chèques impayés qui doivent donner lieu à régularisation ; qu'ils n'ont pas excédé leur compétence ; que le décret attaqué n'a pas davantage contrevenu aux prescriptions de l'article 73 du décret du 30 octobre 1935, dans leur rédaction issue de l'article 15 de la loi du 30 décembre 1991, qui font obligation au banquier tiré de payer, nonobstant l'absence, l'insuffisance ou l'indisponibilité de la provision tout chèque émis au moyen d'une formule dont il n'a pas obtenu la restitution dans les conditions prévues à l'article 65-3 précité "sauf s'il justifie qu'il a mis en oeuvre les diligences prévues par cet article" ; qu'en effet, l'envoi de la lettre recommandée prescrit par l'article 6 du décret attaqué tient lieu des diligences ainsiexigées ;
- Sur l'article 9 du décret attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article 9 du décret attaqué : "Les injonctions prévues par le présent chapitre sont adressées par le tiré au titulaire de compte alors même que le compte sur lequel le chèque ou les chèques ont été tirés a été clôturé. Cette obligation cesse à l'issue d'un délai d'un an à compter de la date de clôture de compte" ;
Considérant que ces dispositions, qui sont au nombre des mesures d'application de la loi du 30 décembre 1991 qu'il appartient à un décret en Conseil d'Etat de déterminer sur le fondement de l'article 24 de cette loi, ont pour objet, dans un souci de protection des bénéficiaires de chèques, de faire application de la procédure d'injonction prévue pour l'émission de chèques sans provision au cas d'émission de chèques sur un compte clôturé ; que, cependant, en raison de la rupture dans cette dernière hypothèse de tout lien contractuel entre le tireur et le tiré, l'obligation qui en résulte pour le banquier tiré est limitée dans le temps à une durée d'un an ; que cette limitation ne contrevient pas aux dispositions de l'article 65-3 ajoutées au décret du 30 octobre 1935 par l'article 6 de la loi du 30 décembre 1991, lesquelles ne s'appliquent que lorsque le paiement du chèque est refusé pour défaut de provision suffisante et non lorsque le compte a été clôturé ;
- Sur l'article 17 du décret attaqué :
Considérant que le premier alinéa de l'article 17 du décret attaqué dispose que la Banque de France annule la déclaration d'incident de paiement sur la demande du banquier tiré, notamment lorsque le refus de paiement "résulte d'une erreur du tiré" ; que s'il est soutenu par M. X... qu'en pareil cas le titulaire du compte pourrait ne pas être informé faute pour le décret attaqué de l'autoriser à vérifier auprès de la Banque de France sa situation personnelle, un tel moyen est inopérant à l'encontre du décret attaqué, lequel n'était pas tenu de mettre en oeuvre un droit d'accès des tireurs au fichier national des chèques irréguliers ; qu'au demeurant l'exercice de ce droit résulte de l'application des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ;
Considérant que le quatrième alinéa de l'article 17 du décret attaqué laisse au banquier tiré, lorsqu'il est saisi par le titulaire du compte d'une demande d'annulation de la déclaration d'incident de paiement, un délai de dix jours pour saisir la Banque de France de la demande d'annulation ; que, dans son principe, l'institution d'un délai n'excède pas les mesures que le gouvernement était habilité à prendre par décret en Conseil d'Etat pour assurer l'application de la loi du 30 décembre 1991 ; qu'eu égard aux vérifications auxquelles il incombe au banquier tiré de procéder, la durée du délai qui a été retenue n'est ni manifestement erronée, ni constitutive d'une rupture d'égalité entre les charges pesant respectivement sur le tireur titulaire du compte et le banquier tiré ;
- Sur l'article 36 du décret attaqué :

Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 65-3 ajouté au décret du 30 octobre 1935 par l'article 6 de la loi du 30 décembre 1991 : "A défaut du paiement du chèque dans le délai de trente jours à compter de sa première présentation ou de constitution de la provision dans le même délai, le tiré adresse un certificat de non-paiement au porteur du chèque qui lui en fait la demande ..." ; que si l'article 36 du décret attaqué prévoit que le banquier tiré doit délivrer le certificat de non-paiement "au plus tard quinze jours après lademande du porteur" du chèque, ces dispositions sont au nombre de celles que le pouvoir réglementaire pouvait légalement édicter, conformément à l'article 24 de la loi précitée par décret en Conseil d'Etat, pour assurer l'application des dispositions susrappelées de l'article 65-3 du décret du 30 octobre 1935 modifié ;
- Sur l'article 40 du décret attaqué :
Considérant que l'article 40 du décret attaqué punit de l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe "quiconque, par quelque moyen que ce soit, directement ou indirectement, exige ou provoque, pour le paiement d'une somme supérieure à 100 F, la remise d'un ou plusieurs chèques d'un montant inférieur ou égal à 100 F" ;
Considérant que ces dispositions ont pour but de sanctionner les abus pouvant naître de l'obligation faite au banquier tiré par l'article 73-1 du décret du 30 octobre 1935 de payer, nonobstant l'absence ou l'insuffisance de provision, tout chèque d'un montant inférieur ou égal à 100 F ; qu'elles ne portent pas une atteinte illégale au principe de la liberté du commerce et de l'industrie ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSOCIATION "COLLECTIF POUR LA DEFENSE DU DROIT ET DES LIBERTES" et M. X... ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret n° 92-456 du 22 mai 1992 ;
Article 1er : Les requêtes de l'ASSOCIATION "COLLECTIF POUR LA DEFENSE DU DROIT ET DES LIBERTES" et de M. X... sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION "COLLECTIF POUR LA DEFENSE DU DROIT ET DES LIBERTES", à M. Olivier X..., au Premier ministre, au garde des sceaux, ministre de la justice et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 6 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 139447
Date de la décision : 13/09/1995
Type d'affaire : Administrative

Analyses

14-02 COMMERCE, INDUSTRIE, INTERVENTION ECONOMIQUE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REGLEMENTATION DES ACTIVITES ECONOMIQUES.


Références :

Décret du 30 octobre 1935 art. 65-3, art. 73, art. 73-1
Décret 92-456 du 22 mai 1992 décision attaquée confirmation
Loi 78-17 du 06 janvier 1978
Loi 91-1382 du 30 décembre 1991 art. 6, art. 15, art. 24


Publications
Proposition de citation : CE, 13 sep. 1995, n° 139447
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. de la Verpillière
Rapporteur public ?: M. Sanson

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1995:139447.19950913
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