Vu la requête, enregistrée le 26 janvier 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le TERRITOIRE DE LA POLYNESIE FRANCAISE ; le TERRITOIRE DE LA POLYNESIE FRANCAISE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'article 3 du décret n° 93-946 du 22 juillet 1993, promulgué par l'arrêté du Haut-commissaire de la République en Polynésie française du 2 novembre 1993, en tant qu'il concerne la Polynésie française ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 84-820 modifiée du 6 septembre 1984 portant statut du territorie de la Polynésie française ;
Vu la loi n° 86-1067 modifiée relative à la liberté de communication, notamment son article 34 dans sa rédaction issue de la loi n° 90-1170 du 29 décembre 1990 et son article 108 dans sa rédaction issue de la loi n° 93-1 du 4 janvier 1993 ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 84-819 du 29 août 1984 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Simon-Michel, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Rouvière, Boutet, avocat de la société Téléfénua,
- les conclusions de M. Combrexelle, Commissaire du gouvernement ;
Sur l'intervention de la société Téléfénua :
Considérant que la société Téléfénua a intérêt au maintien du décret attaqué ; qu'ainsi son intervention est recevable ;
Sur la légalité de l'article 3 du décret attaqué :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant que l'article 12 V de la loi susvisée du 4 janvier 1993 a introduit dans la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication un nouvel article 108 ainsi rédigé : "la présente loi à l'exception de son article 53 est applicable dans les territoires de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française, des îles Wallis et Futuna et dans la collectivité territoriale de Mayotte" ; que cette disposition législative, dont il n'appartient pas au Conseil d'Etat statuant au Contentieux de vérifier la régularité de la procédure au terme de laquelle elle a été adoptée par le législateur, a eu pour effet d'étendre dans les territoires et la collectivité qu'elle énumère et sous la réserve qu'elle édicte, la loi du 30 septembre 1986 dans sa rédaction issue des modifications antérieures à ladite loi du 4 janvier 1993 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dans sa rédaction issue de la loi du 29 septembre 1990 : "les communes ou groupements de communes établissent ou autorisent l'établissement sur leur territoire de réseaux distribuant par câble des services de radiodiffusion sonore ou de télévision ( ...). Dans les zones d'habitat dispersé dont les caractéristiques sont définies par décret, un tel réseau peut comporter, pour l'usage exclusif de la transmission interne à ce réseau des services de radiodiffusion sonore ou de télévision, une ou plusieurs liaisons radioélectriques ( ...)" ; qu'il résulte des termes mêmes de cet article que l'usage de liaisons radioélectriques par un réseau de distribution par câble de services de radiodiffusion sonore ou de télévision n'est autorisé qu'à des fins de transmission interne à ce réseau, c'est-à-dire entre deux têtes de réseau, sans que soit possible la réception directe et individuelle par les foyers abonnés des signaux transportés par ces liaisons radio-électriques ;
Considérant qu'aux termes des dispositions litigieuses du 3ème alinéa de l'article 1er du décret du 24 juillet 1992, issues de l'article 3 du décret du 22 juillet 1993 : "Toutefois, dans les départements et territoires d'outre-mer et dans les collectivités territoriales de Saint-Pierre et Miquelon et de Mayotte, des liaisons radio-électriques peuvent être établies à condition que les foyers situés dans des immeubles d'habitation collective reçoivent les signauxtransportés par ces liaisons à travers un réseau collectif de distribution par câble" ; que ces dispositions ont pour objet, dans les agglomérations concernées et sous la réserve qu'elles édictent pour les immeubles d'habitation collective, de permettre la réception directe et individuelle des signaux transportés par des liaisons radio-électriques par les foyers abonnés à un réseau de distribution par câble de services de radiodiffusion sonore ou de télévision ; qu'ainsi ces dispositions sont contraires à l'article 34 précité de la loi du 30 septembre 1986 ; que, dès lors, le TERRITOIRE DE LA POLYNESIE FRANCAISE est fondé à demander l'annulation de l'article 3 du décret du 22 juillet 1993 en tant qu'il concerne la Polynésie française et de l'arrêté du Haut-commissaire de la République en Polynésie française du 2 novembre 1993 procédant à sa promulgation ;
Article 1er : L'intervention de la société Téléfénua est admise.
Article 2 : L'article 3 du décret du 22 juillet 1993 en tant qu'il concerne la Polynésie française et l'arrêté du Haut-commissaire de la République en Polynésie française en date du 2 novembre 1993 promulguant ledit article sont annulés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au président du gouvernement du TERRITOIRE DE LA POLYNESIE FRANCAISE, à la société Téléfénua, au ministre de la culture, au ministre des technologies de l'information et de La Poste, au ministre de l'outre-mer et au Premier ministre.