La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/10/1995 | FRANCE | N°150703

France | France, Conseil d'État, Assemblee, 27 octobre 1995, 150703


Vu le recours enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 9 août 1993, présenté au nom de l'Etat par le ministre du logement ; le ministre demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt en date du 14 juin 1993 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 6 novembre 1992 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé la décision du 16 août 1988 de la commission de recours amiable de la caisse d'allocations familiales du Var rejetant la demande de remise de dette, correspondant à un trop-perçu d'ai

de personnalisée au logement, présentée par M. Alessandro X....

Vu le recours enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 9 août 1993, présenté au nom de l'Etat par le ministre du logement ; le ministre demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt en date du 14 juin 1993 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 6 novembre 1992 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé la décision du 16 août 1988 de la commission de recours amiable de la caisse d'allocations familiales du Var rejetant la demande de remise de dette, correspondant à un trop-perçu d'aide personnalisée au logement, présentée par M. Alessandro X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu la loi n° 94-624 du 21 juillet 1994 relative à l'habitat ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Austry, Auditeur,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 351-6 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêt attaqué : "Un fonds national de l'habitation est institué. Il est chargé du financement de l'aide personnalisée au logement ... et des dépenses de gestion y afférentes ainsi que des dépenses du conseil national de l'aide personnalisée au logement. Ce fonds est administré par un conseil de gestion présidé par le ministre chargé de la construction et de l'habitation. La composition, les modes de désignation et les modalités de fonctionnement du conseil de gestion mentionné ci-dessus sont fixés par décret" ; qu'aux termes de l'article R. 351-37 du même code : "Le conseil de gestion ... se prononce sur les demandes de remise de dettes formulées par les bénéficiaires de l'aide personnalisée. Il peut déléguer ce pouvoir aux sections départementales des aides publiques au logement mentionnées à l'article R. 351-48. Celles-ci peuvent subdéléguer ce pouvoir dans des conditions fixées par directive du Fonds national de l'habitation ..." ; qu'il résulte de ces dispositions que le Fonds national de l'habitation, organisme d'Etat chargé du financement de l'aide personnalisée au logement, seul habilité par l'article L. 351-6 précité du code de la construction et de l'habitation à se prononcer sur les demandes de remises de dette présentées à titre gracieux par les bénéficiaires de l'aide personnalisée au logement après constatation d'un trop-perçu à leur bénéfice, s'est vu reconnaître par l'article R. 351-37 du même code le pouvoir de déléguer cette compétence aux sections départementales des aides publiques au logement des conseils départementaux de l'habitat en les autorisant à subdéléguer elles-mêmes ce pouvoir dans les conditions que ce Fonds fixe par directives ; que, cependant, le Fonds ne peut autoriser lesdites sections à subdéléguer à un organisme de droit privé le pouvoir de se prononcer sur ces demandes que si une disposition législative expresse prévoit une telle possibilité ;

Considérant que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Lyon a estimé que le Fonds national de l'habitation, organisme d'Etat chargé du financement de l'aide personnalisée au logement, n'avait pu légalement, par sa directive du 30 octobre 1987, autoriser les sections des aides publiques au logement des conseils départementaux de l'habitat à subdéléguer aux caisses d'allocations familiales, organismes de droit privé, le pouvoir, que le législateur a conféré à une autorité administrative relevant de l'Etat, de se prononcer sur les demandes de remise de dettes présentées par des bénéficiaires de ladite aide ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, l'article L. 351-8 du code de la construction et de l'habitation, qui se borne à prévoir que l'aide personnalisée au logement est liquidée et payée pour le compte du Fonds national de l'habitation et selon ses directives par les organismes ou services désignés par décret parmi ceux qui sont chargés de gérer les prestations familiales, n'a pu avoir pour effet de permettre à ces organismes ou services d'accorder des remises de dette à la demande des bénéficiaires de l'aide personnalisée au logement ; que, par suite, la cour, en jugeant que la décision par laquelle la commission de recours amiable de la caisse d'allocations familiales a statué sur la demande de remise de dette présentée par M. X... émanait d'une autorité incompétente, n'a pas commis d'erreur de droit ;
Considérant, il est vrai, qu'aux termes du II de l'article 37 de la loi susvisée du 21 juillet 1994 : "Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les décisions des organismes payeurs relatives aux demandes de remise de dette présentées à titre gracieux par les bénéficiaires de l'aide personnalisée au logement après constatation d'un trop-perçu de leur part sont validées en tant que ces organismes avaient reçu subdélégation des sections départementales des aides publiques au logement pour statuer sur lesdites demandes en application des directives des 30 octobre 1987 et 21 octobre 1992 du Fonds national de l'habitation" ;
Mais considérant que la décision d'une juridiction qui a statué en dernier ressort présente, même si elle peut faire l'objet ou est effectivement l'objet d'un pourvoi en cassation, le caractère d'une décision passée en force de chose jugée ; qu'il suit de là que les dispositions précitées de la loi du 21 juillet 1994, qui n'étaient pas en vigueur à la date de l'arrêt attaqué, ne sauraient en affecter le bien-fondé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre du logement n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ;
Article 1er : Le recours du ministre du logement est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre du logement et à M. Alessandro X....


Synthèse
Formation : Assemblee
Numéro d'arrêt : 150703
Date de la décision : 27/10/1995
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

- RJ1 ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDATION LEGISLATIVE - Réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée - Notion - Arrêt de cour administrative d'appel faisant l'objet d'un pourvoi en cassation (1).

01-11, 54-06-06-01 La décision d'une juridiction qui a statué en dernier ressort présente, même si elle peut faire l'objet ou est effectivement l'objet d'un pourvoi en cassation, le caractère d'une décision passée en force de chose jugée pour l'application des lois de validation faisant réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée.

- RJ1 LOGEMENT - AIDES FINANCIERES AU LOGEMENT - AIDE PERSONNALISEE AU LOGEMENT - Décisions incompétemment prises sur des demandes de remise de dette - Validation législative (article 37 II de la loi n° 94-624 du 21 juillet 1994) - Portée - Validation sans effet sur un arrêt de cour administrative d'appel antérieur à la date de la loi - même s'il fait l'objet d'un pourvoi en cassation (1).

38-03-04 Aux termes du II de l'article 37 de la loi du 21 juillet 1994 : "Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les décisions des organismes payeurs relatives aux demandes de remise de dette présentées à titre gracieux par les bénéficiaires de l'aide personnalisée au logement après constatation d'un trop-perçu de leur part sont validées en tant que ces organismes avaient reçu subdélégation des sections départementales des aides publiques au logement pour statuer sur lesdites demandes en application des directives des 30 octobre 1987 et 21 octobre 1992 du Fonds national de l'habitation". Mais la décision d'une juridiction qui a statué en dernier ressort présente, même si elle peut faire l'objet ou est effectivement l'objet d'un pourvoi en cassation, le caractère d'une décision passée en force de chose jugée. Il suit de là que les dispositions de la loi du 21 juillet 1994 ne sauraient affecter le bien-fondé d'un arrêt de cour administrative d'appel rendu avant leur entrée en vigueur.

- RJ1 PROCEDURE - JUGEMENTS - CHOSE JUGEE - CHOSE JUGEE PAR LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE - Notion de décisions de justice passées en force de chose jugée au sens d'une loi de validation - Existence - Arrêt de cour administrative d'appel alors même qu'il fait l'objet d'un pourvoi en cassation (1).


Références :

Code de la construction et de l'habitation L351-6, R351-37, L351-8
Loi 94-624 du 21 juillet 1994 art. 37

1.

Cf. décisions du même jour Ministre du logement c/ M. et Mme Hervé, n° 156020 ;

Ministre du logement c/ Mme Georgeot, n° 157536 ;

Ministre du logement c/ Mme Busson, n° 157537 ;

Ministre du logement c/ M. Weinert, n° 157538 ;

Ministre du logement c/ M. Naceur Boualleg, n° 157539


Publications
Proposition de citation : CE, 27 oct. 1995, n° 150703
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Denoix de Saint Marc
Rapporteur ?: M. Austry
Rapporteur public ?: M. Arrighi de Casanova

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1995:150703.19951027
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award