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30/10/1995 | FRANCE | N°127937

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 30 octobre 1995, 127937


Vu la requête enregistrée le 22 juillet 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jacques Y..., demeurant ... et M. Bruno X... demeurant ..., au Bouscat (33100) ; MM. Y... et X... demandent que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 28 mars 1991 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande dirigée contre la décision du 31 mai 1990 du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle annulant la décision du 16 février 1990 de l'inspecteur du travail de Bordeaux qui avait refusé d'autoriser la sociét

é Barton et Guestier à procéder à leur licenciement pour motif ...

Vu la requête enregistrée le 22 juillet 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jacques Y..., demeurant ... et M. Bruno X... demeurant ..., au Bouscat (33100) ; MM. Y... et X... demandent que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 28 mars 1991 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande dirigée contre la décision du 31 mai 1990 du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle annulant la décision du 16 février 1990 de l'inspecteur du travail de Bordeaux qui avait refusé d'autoriser la société Barton et Guestier à procéder à leur licenciement pour motif économique ;
2°) annule cette décision du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ;
3°) ordonne à la société Barton et Guestier de les réintégrer dans leurs postes de travail ;
4°) condamne l'Etat à verser à chacun d'eux la somme de 50 000 F, à titre de dommages et intérêts ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Struillou, Auditeur,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MM. Y... et X... ont été dûment informés par le greffe du tribunal administratif de Bordeaux que leur demande, enregistrée sous le n° 90 01095 et tendant à l'annulation de la décision du 31 mai 1990 du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, était inscrite au rôle de l'audience publique du 7 mars 1991 ; que le greffe, qui par lettre du 14 février 1991 avait avisé les intéressés de ce que la demande de la société Barton et Guestier enregistrée sous le n° 90 00358 et dirigée contre la décision du 16 février 1990 par laquelle l'inspecteur du travail avait refusé l'autorisation de les licencier, était retirée du rôle de cette audience, n'était pas tenu de leur confirmer le maintien à ce rôle de leur propre demande ; que, par suite, le moyen tiré par MM. Y... et X... de ce qu'ils n'auraient pas été régulièrement avertis du jour où leur affaire serait appelée en audience ne peut qu'être écarté ;
Sur la légalité de la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du 31 mai 1990 :
Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des représentants du personnel, qui bénéficient dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent d'une protection exceptionnelle, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, le licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ;

Considérant que la société Barton et Guestier a décidé, pour des raisons économiques, de moderniser ses lignes de mise en bouteilles ; que cette décision, qui impliquait la suppression des postes de travail occupés par MM. Y... et X... et 26 autressalariés a été présentée au comité d'établissement lors d'une réunion tenue le 28 juin 1989 ; qu'il ressort des pièces du dossier que, si la société a mis en place un plan de reconversion du personnel, qui comportait, notamment, un système d'incitation financière au départ ainsi que la création d'une "cellule de reclassement" des salariés licenciés, elle n'établit pas avoir été dans l'impossibilité de reclasser en son sein MM. Y... et X... ; que d'ailleurs, le fait que ces derniers ont été écartés des mesures de reclassement interne mises en oeuvre par l'entreprise avant la consultation du comité d'établissement, est de nature à établir que leur licenciement n'a pas été dépourvu de tout lien avec les mandats électifs qu'ils détenaient ; que, dès lors, MM. Y... et X... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande d'annulation de la décision du 31 mai 1990 du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, autorisant leur licenciement pour motif économique ;
Sur les conclusions de MM. Y... et X... qui tendent à ce que la juridiction administrative ordonne leur réintégration :
Considérant que ces conclusions doivent être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
Sur les conclusions de MM. Y... et X... qui tendent à ce que l'Etat soit condamné à leur verser des dommages et intérêts :
Considérant que ces conclusions, présentées pour la première fois en appel, ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions de la société Barton et Guestier qui tendent à l'application des dispositions de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que ces conclusions doivent être regardées comme présentées en application des dispositions de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, seules applicables devant le Conseil d'Etat ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que MM. Y... et X..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, soient condamnés à payer à la société Barton et Guestier la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 28 mars 1991 et la décision du 31 mai 1990 du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de MM. Y... et X... est rejeté.
Article 3 : Les conclusions présentées par la société Barton et Guestier au titre de l'article 75-Ide la loi du 10 juillet 1991, sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à MM. Y... et X..., à la société Barton et Guestier et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Synthèse
Formation : 8 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 127937
Date de la décision : 30/10/1995
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-02 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES NON PROTEGES - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R222
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 30 oct. 1995, n° 127937
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Struillou
Rapporteur public ?: M. Arrighi de Casanova

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1995:127937.19951030
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