Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 janvier 1993 et 14 mai 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. André X..., demeurant Mas Parer, Ville d'Amont à Banyuls-sur-Mer (66650) ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 26 novembre 1991 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a, après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de Paris du 4 mars 1988, limité à 20 000 F le montant de l'indemnité due par l'Etat à M. X... du fait de la perte de traitement qu'il a subie du fait de son refus d'être affecté dans l'enseignement secondaire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-481 du 11 juin 1983 ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 84-721 du 17 juillet 1984 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Olson, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Nicolay, de Lanouvelle, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la loi du 11 juin 1983, en ses articles 8 et 9 dont les dispositions sont reprises à l'article 74 de la loi du 11 janvier 1984, a déterminé les conditions dans lesquelles les agents non titulaires de l'Etat ayant la qualité de personnels civils de coopération culturelle, scientifique et technique en fonction auprès d'Etats étrangers avaient vocation à être titularisés dans des emplois permanents à temps complet des administrations, services et établissements publics de l'Etat ; qu'aux termes de l'article 9-2° de ladite loi : "Les enseignants non titulaires chargés de fonctions dans des établissements d'enseignement supérieur au titre de la loi n° 72-659 du 13 juillet 1972 précitée, qui ont exercé leurs fonctions pendant deux ans à temps plein dans l'enseignement supérieur, ont vocation à être titularisés, soit dans un corps de l'enseignement supérieur sur des emplois réservés à cet effet, soit dans un corps de l'enseignement secondaire, soit dans un corps technique ou administratif des administrations de l'Etat, sous réserve de remplir les conditions exigées pour l'accès à chacun de ces corps ( ...)" ; qu'aux termes de l'article 17 de cette loi : "Les agents non titulaires qui peuvent se prévaloir des dispositions de la présente loi ne peuvent être licenciés que pour insuffisance professionnelle ou pour motif disciplinaire jusqu'à l'expiration des délais d'option qui leur sont ouverts par les décrets prévus à l'article 15" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. X... a exercé de 1977 à 1984 les fonctions de maître assistant à l'institut des sciences de la terre d'Oran (Algérie) ; qu'il a été remis à la disposition des autorités françaises par les autorités algériennes à date du 1er septembre 1984 ; que, contrairement à ce que soutient M. X..., l'administration pouvait légalement l'affecter à un emploi d'agent non titulaire de l'enseignement secondaire en vue de lui permettre de solliciter ultérieurement sa titularisation dans le corps des adjoints d'enseignement, dans les conditions découlant du décret susvisé du 17 juillet 1984 ; que, par suite, un refus opposé à une telle affectation par l'agent considéré était de nature à lui faire perdre le bénéfice des dispositions susmentionnées de la loi du 11 juin 1983 ;
Considérant, toutefois, que M. X... ne pouvait être regardé comme ayant perdu le bénéfice desdites dispositions qu'après que l'administration, d'une part, l'ait régulièrement affecté, d'autre part, l'ait averti des conséquences de son éventuel refus ; que, faute de s'être prononcée sur le point de savoir si l'administration s'était acquittée de cette obligation, soit par la lettre datée du 9 novembre 1984 qu'elle a fait parvenir à l'intéressé, soit par tout autre document versé au dossier soumis aux juges du fond, la Cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit en se bornant à relever que, dès lors que M. X... n'avait pas donné suite à la lettre susmentionnée, il devait être regardé comme ayant rompu le lien qui l'unissait au service, et comme ayant, par suite, perdu le bénéfice de la loi du 11 juin 1983 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à demander l'annulation de l'article 3 de l'arrêt attaqué par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté le surplus des conclusions de sa demande d'appel ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyerl'affaire devant la cour administrative d'appel de Paris ;
Sur les conclusions incidentes présentées par le ministre de l'éducation nationale :
Considérant que, pour les motifs susénoncés, l'administration était tenue de rémunérer M. X... à compter du 1er septembre 1984, date de sa mise à la disposition des autorités françaises, jusqu'à ce qu'il reçoive une affectation ou jusqu'à ce qu'il refuse une telle affectation en étant informé des conséquences de son refus ; qu'il suit de là que les conclusions incidentes présentées par le ministre de l'éducation nationale tendant à ce que l'Etat soit déchargé du versement de toute indemnité à M. X... ne peuvent qu'être rejetées ;
Article 1er : L'article 3 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 26 novembre 1991 est annulé.
Article 2 : Les conclusions incidentes présentées par le ministre de l'éducation nationale sont rejetées.
Article 3 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Paris.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. André X... et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'insertion professionnelle.