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15/11/1995 | FRANCE | N°159374;160931

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 15 novembre 1995, 159374 et 160931


Vu 1°), sous le n° 159374, le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 17 juin 1994 ; le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement, en date du 24 mars 1994, par lequel le tribunal administratif de Besançon a annulé pour excès de pouvoir, à la demande de la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Jura, l'arrêté en date du 28 mai 1993 par lequel le préfet du Jura a fixé le tarif d'enlèvement des cadavres d'animaux dans le dé

partement du Jura jusqu'au 31 mai 1994 ;
- ordonne qu'il soit surs...

Vu 1°), sous le n° 159374, le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 17 juin 1994 ; le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement, en date du 24 mars 1994, par lequel le tribunal administratif de Besançon a annulé pour excès de pouvoir, à la demande de la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Jura, l'arrêté en date du 28 mai 1993 par lequel le préfet du Jura a fixé le tarif d'enlèvement des cadavres d'animaux dans le département du Jura jusqu'au 31 mai 1994 ;
- ordonne qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement ;
- rejette la demande présentée au tribunal administratif par la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Jura ;
Vu 2°), sous le n° 160931, l'ordonnance en date du 10 août 1994, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 16 août 1994, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête présentée à cette cour par la SOCIETE JEAN MONNARD ;
Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy le 20 juin 1994, présentée par la SOCIETE JEAN MONNARD dont le siège social est à Saint-Amour (39160), représentée par son président-directeur-général en exercice, et tendant, d'une part, à l'annulation du jugement en date du 24 mars 1994, par lequel le tribunal administratif de Besançon a annulé pour excès de pouvoir, à la demande la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Jura, l'arrêté en date du 28 mai 1993 par lequel le préfet du Jura a fixé le tarif d'enlèvement des cadavres d'animaux dans le département du Jura jusqu'au 31 mai 1994 et, d'autre part, à la condamnation de la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Jura à lui payer une somme de 8 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code rural ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Courson, Auditeur,
- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Jura,
- les conclusions de M. Touvet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE et la requête de la SOCIETE JEAN MONNARD sont dirigés contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il soit statué par une seule décision ;
Sur la légalité de l'arrêté du préfet du Jura en date du 28 mai 1993 :
Considérant qu'aux termes de l'article 266 du code rural : "L'enlèvement et la destruction des cadavres et déchets d'origine animale constituent un service d'utilité publique. Autour de chaque établissement d'équarrissage dont l'ouverture a été autorisée, un périmètre est délimité par arrêté préfectoral ( ...). Dans chaque département, la totalité du territoire doit être couverte par l'aire d'activité d'un ou de plusieurs équarrisseurs ( ...). Sous réserve des dispositions de l'article 265, il est interdit d'enfouir, de jeter en quelque lieu que ce soit, ou d'incinérer les cadavres d'animaux ou lots de cadavres d'animaux pesant au total plus de 40 kg. Leur propriétaire ou leur détenteur doit les mettre, en entier et non dépouillés, à la disposition de l'équarrisseur établi dans le même périmètre. ( ...) Ces mesures s'appliquent sans limitation de poids aux viandes, abats et denrées animales, sous toutes leurs formes, impropres à la consommation, saisis par les services d'inspection vétérinaire à l'intérieur des périmètres cités ci-dessus, ainsi qu'aux sous-produits d'abattage non récupérés à l'exception, d'une part des viandes et abats saisis comme impropres à la consommation humaine, mais dont l'utilisation à l'état cru ou après transformation peut être autorisée en vue d'assurer l'alimentation des animaux ou pour la préparation de produits destinés à l'opothérapie et, d'autre part, des sous-produits destinés aux industries de transformation ( ...)" ; qu'aux termes de l'article 274 du même code : "Le préfet fixe chaque fois qu'il est nécessaire le prix de chacune des catégories de cadavres et des sous-produits divers en provenance des abattoirs et des établissements où sont entreposées, préparées ou exposées pour la vente des denrées animales ou d'origine animale et destinées à l'équarrissage, ainsi que, le cas échéant, les modalités financières d'enlèvement des mêmes produits lorsque les conditions économiques interdisent une exploitation normale de l'équarrissage ( ...). Chaque équarrisseur est tenu de présenter ...(à l'appui de sa demande) ... tous les documents comptables relatifs à l'activité du ou des établissements où sont traitées les matières premières collectées dans son périmètre" ( ...) ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu subordonner l'exercice de la faculté donnée au préfet, par l'article 274 précité du code rural, de fixer les modalités financières d'enlèvement des produits destinés à l'équarrissage, à la condition que l'exploitation, appréciée globalement, de cette activité, qui ne se limite pas à l'enlèvement et au recyclage des cadavres d'animaux mais englobe la collecte et le traitement de l'ensemble des produits auxquels s'applique l'article 266 dudit code, ne puisse s'exercer dans des conditions normales ; que, par suite, la circonstance que les seules activités de collecte et de recyclage des cadavres par la SOCIETE JEAN MONNARD, à laquelle a été confié l'équarrissage dans le département du Jura, serait déficitaire n'est pas de nature à justifier légalement la fixation, par le préfet, de modalités financières d'enlèvement des produits destinés à l'équarrissage sur le fondement de l'article 274 du code rural ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE et la SOCIETE JEAN MONNARD ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a annulé l'arrêté du préfet du Jura du 28 mai 1993 fixant un tarif pour l'enlèvement des cadavres par ladite société ;
Sur les conclusions de la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Jura tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner l'Etat et la SOCIETE JEAN MONNARD à payer à la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Jura la somme de 10 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions de la SOCIETE JEAN MONNARD tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Jura qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la SOCIETE JEAN MONNARD la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE et la requête de la SOCIETE JEAN MONNARD sont rejetés.
Article 2 : L'Etat et la SOCIETE JEAN MONNARD sont condamnés à payer à la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Jura la somme de 10 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE JEAN MONNARD, à la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Jura et au ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - COMPETENCE - COMPETENCE EN MATIERE DE DECISIONS NON REGLEMENTAIRES - PREFET - Fixation des modalités financières d'enlèvement des produits destinés à l'équarrissage (article 274 du code rural) - Condition.

01-02-03-03, 03-05-03 Le législateur a entendu subordonner l'exercice de la faculté donnée au préfet, par l'article 274 du code rural, de fixer les modalités financières d'enlèvement des produits destinés à l'équarrissage, à la condition que l'exploitation, appréciée globalement, de cette activité, qui ne se limite pas à l'enlèvement et au recyclage des cadavres d'animaux mais englobe la collecte et le traitement de l'ensemble des produits auxquels s'applique l'article 266 dudit code, ne puisse s'exercer dans des conditions normales. Par suite, la circonstance que les seules activités de collecte et de recyclage des cadavres par la société à laquelle a été confié l'équarrissage dans un département serait déficitaire n'est pas de nature à justifier légalement la fixation, par le préfet, de modalités financières d'enlèvement des produits destinés à l'équarrissage sur le fondement de l'article 274 du code rural.

AGRICULTURE - CHASSE ET PECHE - PRODUITS AGRICOLES - ELEVAGE ET PRODUITS DE L'ELEVAGE - Equarrissage - Fixation par le préfet des modalités financières d'enlèvement des cadavres d'animaux en cas de conditions économiques interdisant une exploitation normale (art - 274 du code rural) - Condition.


Références :

Code rural 266, 274
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation: CE, 15 nov. 1995, n° 159374;160931
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: M. Courson
Rapporteur public ?: M. Touvet

Origine de la décision
Formation : 3 / 5 ssr
Date de la décision : 15/11/1995
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 159374;160931
Numéro NOR : CETATEXT000007882185 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1995-11-15;159374 ?
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