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17/11/1995 | FRANCE | N°160452

France | France, Conseil d'État, 10 / 7 ssr, 17 novembre 1995, 160452


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 28 juillet 1994 et 23 novembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION PENNOISE POUR LA PROTECTION DES SITES dont le siège est chemin de Bellepeire, Plan de campagne, (13170) Les X... Mirabeau, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège et l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DES BARNOUINS, dont le siège social est chemin de bonne brise (13170) Les X... Mirabeau, agissant poursuites et diligences de ses représentants lé

gaux domiciliés en cette qualité audit siège ; les associations...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 28 juillet 1994 et 23 novembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION PENNOISE POUR LA PROTECTION DES SITES dont le siège est chemin de Bellepeire, Plan de campagne, (13170) Les X... Mirabeau, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège et l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DES BARNOUINS, dont le siège social est chemin de bonne brise (13170) Les X... Mirabeau, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ; les associations demandent que le Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le décret du 31 mai 1994 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de construction du prolongement de la ligne TGV Sud-Est, de Valence jusqu'à Marseille et Montpellier ;
2°) de surseoir à l'exécution dudit décret ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité du 25 mars 1957 instituant la communauté économique européenne ;
Vu la Convention de Berne du 19 septembre 1979 ;
Vu la directive n° 79-409 du 2 avril 1979 du Conseil des communautés européennes modifiée ;
Vu la directive n° 85-337 du 27 juin 1985 du Conseil des communautés européennes ;
Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu le code du domaine de l'Etat ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code rural et le code forestier ;
Vu la loi du 2 mai 1930 ;
Vu la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 ;
Vu la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 ;
Vu la loi n° 83-630 du 12 juillet 1983 ;
Vu la loi du 29 juillet 1983 ;
Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 ;
Vu le décret n° 84-617 du 17 juillet 1984 ;
Vu le décret n° 85-453 du 23 avril 1985 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Rousselle, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Combrexelle, Commissaire du gouvernement ;

En ce qui concerne la légalité externe du décret attaqué du 31 mai 1994 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de construction du prolongement de la ligne du train à grande vitesse (TGV-Sud-Est) de Valence jusqu'à Marseille et Montpellier :
Sur les irrégularités qui entacheraient la création et le fonctionnement du "collège d'experts" :
Considérant que par une décision en date du 2 juin 1992, le ministre chargé de l'équipement et des transports a créé un "collège d'experts" dont les attributions visaient à piloter "la phase de transparence et de préparation à l'enquête publique sur le projet TGV Méditerranée", qui devait permettre notamment "de valider et d'approfondir les études statistiques réalisées ... ; de favoriser une approche de développement économique et social, d'aménagement du territoire" et qui avait pour mission "d'expertiser les études réalises par la SNCF dans ces domaines, de suivre les réponses de la SNCF de commander des études complémentaires à des cabinets spécialisés" ; que cette décision n'aurait pu légalement avoir pour objet et n'a pas eu pour effet de modifier les conditions d'élaboration de l'étude d'impact, non plus que la procédure de déclaration d'utilité publique prévue aux articles R. 11-1 à R. 11-18 du code de l'expropriation ; que la mission confiée au collège d'experts est distincte, par son objet et ses modalités, de la procédure d'expropriation ; que ce collège d'experts, qui a pu être légalement institué par le ministre chargé de l'équipement et des transports, n'a pas dessaisi à son profit la commission d'enquête ni vicié les conditions dans lesquelles s'est déroulée la procédure d'enquête publique ;
Sur le moyen tiré de l'absence de délibération du conseil d'administration de la Société Nationale des Chemins de Fer Français :
Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la loi du 26 juillet 1983 : "Aucune décision relative aux grandes orientations stratégiques, économiques, financières ou technologiques de l'entreprise, notamment sur le contrat de plan ne peut intervenir sans que le conseil d'administration ... en ait préalablement délibéré ;
Considérant que les requérants soulèvent le moyen tiré de ce que le conseil d'administration de la Société Nationale des Chemins de Fer Français n'aurait pas délibéré ; que ce conseil a suffisamment délibéré, le 23 septembre 1992, sur les grandes orientations liées aux travaux déclarés d'utilité publique ; qu'ainsi le moyen manque en fait ;
Sur le défaut de consultation des commissions des opérations immobilières :

Considérant que si l'article R. 10 du code du domaine de l'Etat précise que notamment "les acquisitions d'immeubles ou de droits immobiliers d'une valeur totale ou supérieure à une somme fixée par arrêté du ministre des finances et poursuivies par voie d'expropriation pour cause d'utilité publique ..." doivent être soumises pour avis à des commissions régionales ou départementales des opérations immobilières de l'architecture et des espaces protégés", lesdites commissions instituées par le décret du 28 août 1969 modifiées, ont été supprimées par l'article 1er du décret du 14 mars 1986 ; que le moyen susanalysé ne peut, dès lors, qu'être écarté ; qu'au surplus les services des domaines des départements concernés ont été consultés, comme le prévoient les articles 3 et 6 dudit décret du 14 mars 1986 ;
Sur l'ouverture de l'enquête publique :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-8 du code de l'urbanisme, "La déclaration d'utilité publique d'une opération qui n'est pas compatible avec les dispositions d'un plan d'occupation des sols rendu public ou approuvé ne peut intervenir que si : - l'enquête publique concernant cette opération, ouverte par le représentant de l'Etat dans le département a porté à la fois sur l'utilité publique de l'opération et sur la mise en comptabilité du plan qui en est la conséquence ; - l'acte déclaratif d'utilité publique est pris après que les dispositionsproposées par l'Etat pour assurer la mise en compatibilité du plan ont fait l'objet d'un examen conjoint de l'Etat, de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale, de la région, du département et des organismes mentionnés aux articles L. 121-6 et L. 121-2 et après avis du conseil municipal ou de l'organe délibérant de l'établissement public compétent en la matière" ;
Considérant que la réunion de la concertation tenue par le préfet de la Drome avec les représentants des collectivités locales a permis l'examen conjoint prescrit par ces dispositions ;
Sur la composition du dossier soumis à enquête publique :
Considérant, d'une part, que les chambres d'agriculture ont présenté leurs observations sur l'utilité publique de l'opération, comme le prévoit l'article R. 11-14-9 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 4 du décret du 17 juillet 1984 pris pour l'application de l'article 14 de la loi du 30 décembre 1982 : "l'évaluation des grands projets d'infrastructure comporte : ... 3°) Les motifs pour lesquels, parmi les partis envisagés par le maître d'ouvrage, le projet présenté a été retenu - 4°) Une analyse des incidences de ce choix sur les équipements de transport existant ou en cours de réalisation, ainsi que sur leurs conditions d'exploitation et un exposé sur sa compatibilité avec les schémas directeurs d'infrastructures applicables ... L'évaluation des grands projets d'infrastructure comporte également une analyse des différentes données de nature à permettre de dégager un bilan prévisionnel, tant des avantages et inconvénients entraînés, directement ou non, par la mise en service de ces infrastructures dans les zones intéressées que des avantages et inconvénients résultant de leur utilisation par les usagers ... Les diverses variantes envisagées par le maître d'ouvrage d'un projet font l'objet d'évaluations particulières selon les mêmes critères. L'évaluation indique les motifs pour lesquels le projet présenté a été retenu ..." ;
Considérant que les motifs pour lesquels le projet présent a été retenu, l'analyse des incidences de ce choix et des différentes données de nature à permettre de dégager de ce choix et des différentes données de nature à permettre de dégager un bilan prévisionnel ainsi que l'évaluation des différentes variantes du projet figurent dans l'évaluation socio-économique du projet (volume 4 E du dossier d'enquête, point 3-2), qui renvoie explicitement à la notice (partie B du volume 1) et aux études de détail du chapitre 4 F du volume 2A-D1 de l'étude d'impact ;
Considérant que le dossier soumis à enquête publique ne méconnaît pas, dans ces conditions, les dispositions de l'article 4 du décret du 17 juillet 1984 ;
Sur le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 12 octobre 1977 "le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. L'étude d'impact présente successivement : 1° une analyse de l'état initial du site et de son environnement portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes et loisir affectés par les aménagements ou ouvrages ; 2°) une analyse des effets sur l'environnement et en particulier sur les sites et les paysages, la faune et la flore, les milieux naturels et les équilibres biologiques, et le cas échéant, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'hygiène et la salubrité publique ; 3°) les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d'environnement, parmi les partis envisagés, le projet présenté a été retenu ; 4°) les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes" ;

Considérant que le volume 2A-D1 comporte une étude d'impact approfondie de la ligne nouvelle et notamment une description de l'aire d'étude, de l'état initial du site et de son environnement et une comparaison des variantes de tracés avec leurs effets sur l'environnement ; que le volume 2B-DA est consacré à l'analyse de la solution retenue et comprend une étude détaillée des impacts généraux et des mesures prévues s'agissant des paysages, milieux physiques et milieux naturels, de l'agriculture, de l'urbanisme et du patrimoine, du bruit, des vibrations, de l'effet de souffle et de l'alimentation électrique, de l'hydraulique, du coût des mesures envisagées et des incidences des choix retenus ; qu'en particulier, postérieurement aux observations émises par certains services ministériels, les conséquences hydrologiques de l'opération envisagée, ont fait l'objet dans l'étude d'impact d'une analyse approfondie et diversifier secteur par secteur ; que l'étude d'impact comporte des éléments suffisamment précis au regard des exigences de l'article 2 du décret susvisé s'agissant du tracé dans le secteur des Pennes-Mirabeau et de la zone du tunnel qui y est prévue et des atteintes à l'environnement et aux sites qui en résulteront ;
Sur le moyen tiré des erreurs et omissions alléguées dans le dossier d'enquête :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : "L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement : I- Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages : 1°) une notice explicative ; 2°) le plan de situation ; 3°) le plan général des travaux ; 4°) les caractéristiques principales des ouvrages les plus importants ; 5°) l'appréciation sommaire des dépenses ; 6°) l'étude d'impact définie à l'article 2 du décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977, lorsque les ouvrages ou travaux n'en sont pas dispensés ou, s'il y a lieu, la notice exigée en vertu de l'article 4 du même décret ; 7°) l'évaluation mentionnée à l'article 5 du décret n° 84-617 du 17 juillet 1984 pris pour l'application de l'article 14 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, lorsque les travaux constituent un grand projet d'infrastructures tel que défini à l'article 3 du même décret" ;
Considérant qu'au stade de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique, les documents soumis à l'enquête n'ont pas pour objet de déterminer avec précision les parcelles éventuellement soumises à l'expropriation, mais de permettre aux intéressés de connaître la nature et la localisation des travaux envisagés ; qu'il ressort des pièces du dossier, que ces indications ressortaient suffisamment du plan général ; que si les plans utilisés ne mentionnaient pas précisément, certaines habitations, ni de façon précise la "ZNIEFF" de la commune des Pennes, de telles imprécisions ne peuvent avoir entaché le document soumis à enquête d'une irrégularité de nature à vicier la procédure ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du dossier soumis à l'enquête ne saurait être retenu ;
Sur les irrégularités qui auraient entaché le recueil des observations :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, dans quelques communes concernées, des irrégularités ont affecté le recueil des observations du public au regard desarticles R. 11-4-8 et R. 11-14-9 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, et des conditions fixées par l'arrêté d'ouverture de l'enquête publique, soit quant aux jours et heures auxquels les registres ont été mis à la disposition du public, soit quant à la tenue même de ces registres ; que, toutefois, celles-ci ne sauraient être regardées, dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu des mesures prises par l'administration pour tenter de remédier à ces irrégularités comme affectant la légalité du décret attaqué ; que la circonstance notamment que certaines personnes aient porté leurs observations sur des feuilles distinctes du registre prévu à cet effet dans l'une des salles de la commune les X... Mirabeau, n'est pas de nature à avoir vicié la procédure ;
Sur la méconnaissance de l'article 8 de la loi du 12 juillet 1983 :
Considérant qu'en vertu des prescriptions dudit article, dans sa rédaction applicable pendant la période où la commission d'enquête a effectué ses travaux, le maître d'ouvrage prend en charge les frais de l'enquête, l'indemnité des enquêteurs étant assurée par l'Etat ; qu'il ne ressort des pièces du dossier ni que la SNCF ait pris en charge les frais de l'enquête de façon insuffisante, ni que les membres de la commission d'enquête n'aient pas obtenu l'indemnité due par l'Etat ; qu'ainsi le moyen manque en fait ;
Sur la violation alléguée du principe de la neutralité de l'enquête :
Considérant que si la SNCF a apporté un appui logistique à la commission d'enquête, notamment en procédant au tri et au classement des très nombreuses observations adressées à la commission, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ait sélectionné ces observations dans un sens favorable au projet, ni plus généralement qu'elle ait pesé sur l'impartialité des membres de la commission ;
Sur le moyen tiré de la tardiveté du départ du rapport d'enquête :
Considérant que si l'article R. 14-4 du code de l'expropriation prévoit que les conclusions de la commission d'enquête sont transmises au préfet "dans le délai d'un mois à compter de la date de la clôture de l'enquête", ce délai n'est pas prescrit à peine de nullité ;
Sur les moyens tirés de ce que le dossier soumis à enquête publique ne satisferait pas aux objectifs fixés par la directive du 27 juin 1985 du conseil des communautés européennes :
Considérant, d'une part, que dans la mesure où le dossier soumis à enquête est conforme aux dispositions du décret du 12 octobre 1977 modifié, pris pour l'application de l'article 2 de la loi du 17 juillet 1976 relative à la protection de la nature, lesquelles ne méconnaissent pas les objectifs fixés par ladite directive, l'exception d'illégalité dudit décret n'est pas fondée ;

Considérant, d'autre part, et en tout état de cause, que le moyen tiré de ce que le dossier ne comprendrait pas un résumé non technique des informations et l'évaluation des effets indirectes du projet manque en fait ;
En ce qui concerne la légalité interne du décret attaqué :
Sur la violation de l'article L. 123-8 du code de l'urbanisme :
Considérant que la circonstance que les enquêtes sur la mise en compatibilité des plans d'occupation des sols des communes concernées aient porté sur une bande de 100 m de large alors que le dossier d'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique portait sur une bande d'une largeur de 500 mètres est par elle-même sans incidence sur la légalité du décret attaqué, dès lors qu'elle n'entraîne pas une modification des plans d'occupation des sols ;
Sur l'absence d'utilité publique du projet :
Considérant qu'aux termes de l'article 14 de la loi d'orientation des transports intérieurs du 30 décembre 1982 : " - Les choix relatifs aux infrastructures, équipements et matériels de transport et donnant lieu à financement public, en totalité ou partiellement, sont fondés sur l'efficacité économique, et sociale de l'opération. Ils tiennent compte des besoins des usagers, des impératifs de sécurité, des objectifs du plan de la Nation et de la politique d'aménagement du territoire, des nécessités de la défense, de l'évolution prévisible des flux de transports nationaux et internationaux, du coût financier et, plus généralement, des coûts économiques réels et des coûts sociaux." ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le choix de privilégier la ligne à grande vitesse envisagée au détriment d'autres choix tels que celui consistant à améliorer les lignes existantes soit entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant, en second lieu, qu'une opération ne peut être déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de T.G.V dit "Méditerranée" qui a pour objet de prolonger la ligne actuelle de Paris jusqu'à Marseille et Montpellier s'inscrit dans un cadre plus général visant à faciliter les liaisons avec les villes du Sud-Est et à favoriser le développement économique de ces régions et à améliorer l'aménagement du territoire ; qu'il amorce la réalisation d'un axe méditerranéen à grande vitesse reliant l'Espagne et l'Italie entre elles et ces deux pays au réseau express européen en cours d'élaboration ; que ce projet revêt ainsi un caractère d'utilité publique ; qu'eu égard tant à l'importance de l'opération qu'aux précautions prises à la suite de l'enquête publique, les inconvénients inhérents aux atteintes portées à l'environnement, aux sites et paysages et aux exploitations agricoles ne peuvent être regardés comme excessifs par rapport à l'intérêt qu'elle présente ; que plus précisément lesdites précautions portent en particulier sur le passage dans la zone industrielle et nucléaire du Tricastin, dont le tracé a été modifié pour en diminuer les risques, sur les conséquences hydrologiques du tracé et sur les risques d'aggravation des inondations qu'il comporte, qui a donné lieu à un engagement officiel commun des ministres de l'équipement et des transports et de l'environnement le 4 février 1994 soit antérieurement au décret, suivant lequel le risque supplémentaire d'inondation sera nul sur les nuisances sonores, qui seront limitées, et enfin sur les atteintes au patrimoine culturel qui seront réduites ; que, dans ces conditions, ni les coûts ni les inconvénients du projet ne sont de nature à lui retirer son caractère d'utilité publique ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il n'appartient pas au Conseil d'Etat statuant au Contentieux d'apprécier l'opportunité du tracé retenu, ni en soit, ni par rapport à d'autres tracés envisageables ;
Considérant, en quatrième lieu, que les dispositions attaquées de la déclarationd'utilité publique ne constituent pas un acte réglementaire ; que, par suite, la requérante ne peut utilement invoquer la méconnaissance par le décret attaqué des dispositions de la directive n° 79409 du 2 avril 1979 du conseil des communautés européennes ; que, d'autre part, si les obligations internationales de la convention de Berre du 19 septembre 1979, notifiée par la France et rendue applicable par le décret du 22 août 1990 d'une part, et de la convention de Ramsar du 2 février 1971, également ratifiée et rendue applicable par le décret du 20 janvier 1987, d'autre part, imposant à la France la conservation de la flore et de la faune sauvages et de leurs habitants et la protection particulière de certaines espèces, notamment par des zones de protection spéciale, ainsi que la conservation des zones humides et des oiseaux d'eau, les stipulations desdites conventions créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés ; que l'association requérante n'est donc pas fondée à se prévaloir de la méconnaissance de ces engagements internationaux pour demander l'annulation du décret attaqué ;
Considérant, enfin, que la circonstance que la commission d'enquête a émis un avis partiellement défavorable est sans influence sur la légalité du décret attaqué ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les associations requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation du décret du 31 mai 1994 ; que dès lors, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution, la requête doit être rejetée ;
Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION PENNOISE POUR LA PROTECTION DES SITES et de l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DES BARNOUINS est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION PENNOISE POUR LA PROTECTION DES SITES, à l' ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DES BARNOUINS, au ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 10 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 160452
Date de la décision : 17/11/1995
Type d'affaire : Administrative

Analyses

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - NOTIONS GENERALES - NOTION D'UTILITE PUBLIQUE - EXISTENCE - INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT.

TRANSPORTS - TRANSPORTS FERROVIAIRES - LIGNES DE CHEMIN DE FER.


Références :

CEE Directive 79-409 du 02 avril 1979 Conseil
CEE Directive 85-337 du 27 juin 1985 Conseil
Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique R11-14-9, R11-3, R14-4
Code de l'urbanisme L123-8
Code du domaine de l'Etat R10, L121-6, L121-2
Convention du 21 février 1971 Ramsar
Convention du 19 septembre 1979 Berne
Décret 77-1141 du 12 octobre 1977 art. 2
Décret 84-617 du 17 juillet 1984 art. 4
Décret 87-126 du 20 février 1987
Décret 90-756 du 22 août 1990
Loi 76-629 du 10 juillet 1976 art. 2
Loi 82-1153 du 30 décembre 1982 art. 14
Loi 83-630 du 12 juillet 1983 art. 8
Loi 83-630 du 26 juillet 1983 art. 7


Publications
Proposition de citation : CE, 17 nov. 1995, n° 160452
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Rousselle
Rapporteur public ?: M. Combrexelle

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1995:160452.19951117
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