Vu la requête enregistrée le 6 mai 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Amrik Y... demeurant à Kot Sadig, Jalandhar, Etat du Punjab (Inde) ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir la décision implicite lui refusant un visa d'entrée sur le territoire français ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme de Margerie, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Delarue, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et des libertés d'autrui" :
Considérant que le ministre des affaires étrangères soutient que pour refuser à M. Y..., ressortissant indien, le visa d'entrée sur le territoire français que celui-ci avait demandé le 26 novembre 1993 pour y rejoindre son épouse, Mme X..., de nationalité française, avec laquelle il s'était marié le 8 juillet 1993, les autorités consulaires françaises se sont fondées sur le fait que M. Y... n'obtiendrait pas un titre de séjour en France, car il y avait précédemment fait un séjour irrégulier et avait été l'objet d'une reconduite à la frontière ; que, dans ces conditions, le refus de visa, qui ne se réfère à aucun autre élément, a porté au droit de M. Y... au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ce refus lui a été opposé et a, par suite, méconnu les dispositions de l'article 8 de la convention précitée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Y... est fondé à demander l'annulation de la décision implicite lui refusant un visa d'entrée sur le territoire français ;
Article 1er : La décision implicite refusant à M. Y... un visa d'entrée sur le territoire français est annulée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Amrik Y... et au ministre des affaires étrangères.