Vu la requête enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 28 novembre 1994, présentée par Mme Colette Y..., demeurant ... ; Mme Y... demande que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 18 octobre 1994 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa protestation tendant à l'annulation des élections qui se sont déroulées les 20 et 27 mars 1994 dans le canton de Dijon 3 et à ce que M. X... soit déclaré inéligible en qualité de conseiller général pour une durée de un an ;
2° annule ces élections et déclare M. X... inéligible en qualité de conseiller général pendant un an ;
3° condamne M. X... à lui verser la somme de 10 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Gervasoni, Auditeur,
- les observations de Me Ricard, avocat de M. Jean-Marc X...,
- les conclusions de M. Toutée, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, en premier lieu, que la campagne publicitaire qui s'est déroulée au cours du mois de mars 1994 pour la promotion de la marque Volvo dont M. X... est concessionnaire à Dijon, et dont les affiches comportaient un bandeau mentionnant : "NUDANT - ..., VOLVO" ne constitue pas une dépense électorale ; qu'ainsi son coût n'avait pas à figurer dans le compte de campagne et ne constituait pas un don d'une personne morale soumis aux plafonds fixés par l'article L. 52-8 du code électoral dans sa rédaction applicable lors de l'élection ; qu'une telle campagne n'entre pas, par sa nature et par son objet, dans le champ de l'article L. 52-1 du code électoral qui interdit, dans les trois mois qui précèdent l'élection, l'utilisation à des fins de propagande électorale de "tout procédé de publicité commerciale" ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que la réception donnée à l'Hôtel de Ville le 25 février 1994 à l'occasion de la remise des insignes de l'ordre national du mérite à M. X... par le député-maire de Dijon, n'a eu aucun caractère inhabituel, ni par son ampleur ni par la couverture qui en a été faite par la presse ; qu'ainsi elle ne constitue pas une dépense de campagne et ne peut être regardée comme un don d'une personne morale de droit public interdit par l'article L. 52-8 du code électoral dans sa rédaction applicable à l'élection ;
Considérant, en troisième lieu, qu'à supposer même que les allégations de Mme Y... relatives à l'omission ou à la sous-évaluation d'autres postes de dépenses, pour un montant d'environ 26 000 F soient fondées, il n'en résulterait pas que M. X... ait dépassé le plafond fixé pour la circonscription à 131 305 F, son compte approuvé par la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques faisant apparaître un total de dépenses de 39 298 F ; qu'il suit de là que, sans qu'il soit besoin d'examiner le bien fondé desdites allégations, le moyen tiré du dépassement du plafond doit être écarté ;
Considérant, enfin, que ni la campagne publicitaire ni la réception susmentionnées ne constituent des manoeuvres ou irrégularités de nature à avoir altéré la sincérité du scrutin ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme Y... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa protestation tendant à l'annulation des élections qui se sont déroulées les 20 et 27 mars 1994 dans le canton de Dijon 3 et à ce que M. X... soit déclaré inéligible pour une durée de un an ;
Sur les conclusions de Mme Y... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 susvisée font obstacle à ce que M. X..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante soit condamné à verser à Mme Y... la somme qu'elle demande ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner Mme Y... à payer à M. X... la somme de 8 000 F au titre des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : La requête de Mme Y... est rejetée.
Article 2 : Mme Y... versera à M. X... une somme de 8 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Colette Y..., à M. Jean-Marc X... et au ministre de l'intérieur.