Vu la requête, enregistrée le 8 janvier 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le MOUVEMENT DE DEFENSE DES AUTOMOBILISTES, dont le siège est ..., représenté par son secrétaire en exercice ; l'association demande au Conseil d'Etat l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 92-1228 du 23 novembre 1992 modifiant les articles R. 255 à R. 257 et R. 262 du code de la route ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
Vu la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;
Vu le code de la route ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lévis, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Descoings, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'association requérante ne saurait utilement invoquer à l'encontre du décret n° 92-1228 du 23 novembre 1992 attaqué, lequel concerne exclusivement la procédure relative aux sanctions administratives de retrait de points, la méconnaissance de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui n'est applicable qu'aux procédures contentieuses suivies devant des juridictions ;
Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente convention ont été violés a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles" ;
Considérant que le moyen tiré de ce que les décisions de retrait de points constitueraient des violations des droits et libertés reconnus par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, contre lesquelles n'existerait aucun "recours effectif", et qu'en conséquence, se trouveraient méconnues les stipulations précitées de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, est sans rapport avec le contenu desdites stipulations et, comme tel, inopérant ;
Considérant qu'il résulte des termes mêmes des articles L.11 et L.11-1 du code de la route, insérés audit code par la loi susvisée du 10 juillet 1989 dont le Conseil d'Etat ne saurait apprécier la constitutionnalité, que c'est à l'autorité administrative qu'il appartient de réduire de plein droit le nombre de points affecté au permis lorsqu'est établie la réalité de l'infraction ; qu'il s'ensuit que l'association requérante ne saurait utilement soutenir que la compétence de l'autorité administrative pour prendre des mesures de retrait de points et l'obligation d'y procéder méconnaîtraient le principe de séparation des pouvoirs entre autorités administratives et judiciaires et l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.257 du code de la route, dans sa rédaction résultant du décret attaqué : "Dans le cas où plusieurs contraventions sont commises simultanément, la perte de points qu'elle entraînent se cumule dans la limite de six points" ; que le retrait de points ne constituant pas une sanction pénale, le moyen tiré de ce que la disposition précitée serait contraire au principe de non-cumul des sanctions pénales doit, en tout état de cause, être écarté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association requérante n'est pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret attaqué ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à l'association requérante la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du MOUVEMENT DE DEFENSE DES AUTOMOBILISTES est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au MOUVEMENT DE DEFENSE DES AUTOMOBILISTES, au garde des sceaux, ministre de la justice, au ministre de l'intérieur, au ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme, au ministre de la défense et au Premier ministre.