Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 janvier 1991 et 27 mai 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Raymond X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 16 novembre 1990 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 7 juillet 1989 par laquelle le maire de Saint-Germain-de-Salles (Allier) lui a refusé la location de la salle des fêtes de la commune pour une réunion publique qui devait avoir lieu le 12 juillet 1989 ;
2°) d'annuler la décision susmentionnée ;
3°) d'ordonner la suppression de passages injurieux figurant dans une pièce produite par la commune ;
4°) d'ordonner une expertise ;
5°) de lui allouer une somme de 10 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et les usagers ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Philippe Boucher, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Descoings, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant que, pour refuser de louer à M. Raymond X... la salle des fêtes communale, le maire de Saint-Germain-de-Salles (Allier) s'est fondé sur le fait que la réunion projetée par le requérant était susceptible d'entraîner des troubles à l'ordre public ; que, même si cette réunion devait rassembler, comme l'indique le maire dans la décision attaquée, "différentes personnes mêlées de près ou de loin aux difficultés internes d'une entreprise de la commune", il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle constituait une menace pour l'ordre public ; que M. X... est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a refusé d'annuler la décision du maire de Saint-Germain-de-Salles ;
Sur la demande de suppression de passages injurieux :
Considérant qu'aux termes de l'article 41, 4ème alinéa de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, dans sa rédaction issue de la loi du 15 juin 1982, "Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant au fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts" ; que si M. X... demande qu'il soit fait application de cette disposition à l'une des pièces produites par la commune, ces conclusions ne sont assorties d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'il suit de là que la demande de M. X... ne peut qu'être rejetée ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'aux termes de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. X... tendant à ce que la commune de Saint-Germain-de-Salles soit condamnée à lui verser la somme de dix mille francs au titre des dispositions susmentionnées ;
Article 1er : La décision du maire de Saint-Germain-de-Salles en date du 7 juillet 1989 ensemble le jugement du 16 novembre 1990 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand sont annulés.
Article 2 : La commune de Saint-Germain-de-Salles est condamnée à verser à M. X... la somme de 10 000 F.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Raymond X..., à la commune de SaintGermain-de-Salles et au ministre de l'intérieur.