Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 26 septembre 1991 et 21 janvier 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION "FRONT NATIONAL POUR L'UNITE FRANCAISE" ayant son siège ..., représentée par son président ; l'ASSOCIATION "FRONT NATIONAL POUR L'UNITE FRANCAISE" demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement, en date du 9 juillet 1991, par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire d'Aixen-Provence, en date du 22 mai 1990, par lequel ce dernier a interdit la tenue d'une réunion du Front national ;
2°) d'annuler ledit arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu les lois du 30 juin 1881 et du 28 mars 1907 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et notamment son article 75-I ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Philippe Boucher, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Le Griel, avocat de l'ASSOCIATION "FRONT NATIONAL POUR L'UNITE FRANCAISE" et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la commune d'Aix-en-Provence,
- les conclusions de M. Descoings, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité de l'arrêté du maire d'Aix-en-Provence en date du 22 mai 1990 :
Considérant que s'il incombe au maire, en vertu des dispositions de l'article L. 131-2 du code des communes, de prendre les mesures qu'exige le maintien de l'ordre, il lui appartient, dans l'exercice de ses pouvoirs, de concilier son action avec le respect de la liberté de réunion garantie par les lois du 30 juin 1881 et du 28 mars 1907 susvisées ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la réunion publique projetée par l'ASSOCIATION "FRONT NATIONAL POUR L'UNITE FRANCAISE" pour le 23 mai 1990 au palais des congrès de la ville d'Aix-en-Provence fût de nature à menacer l'ordre public dans des conditions telles qu'il ne pût être paré à tout danger par des mesures de police appropriées dont il n'est pas établi qu'elles ne pouvaient être prises en l'espèce ; que, dès lors, l'association requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire d'Aix-en-Provence en date du 22 mai 1990, interdisant la réunion qu'elle avait prévue ; Sur les conclusions de la commune d'Aix-en-Provence tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'ASSOCIATION "FRONT NATIONAL POUR L'UNITE FRANCAISE", qui n'est pas la partie perdante, dans la présente instance, soit condamnée à payer à la commune d'Aix-enProvence la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 9 juillet 1991 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du maire d'Aix-en-Provence en date du 22 mai 1990 est annulé.
Article 3 : Les conclusions de la commune d'Aix-en-Provence tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION "FRONT NATIONAL POUR L'UNITE FRANCAISE", à la commune d'Aix-en-Provence et au ministre de l'intérieur.