Vu la requête, enregistrée le 3 août 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Kamel X..., demeurant Bat. D4, rue Vauvenargues à Salon-de-Provence (13300) ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 30 juin 1992 par lequel le tribunal administratif de Marseille a, à la demande du préfet des Bouches-du-Rhône, annulé l'avis du 25 février 1991 par lequel la commission du séjour des étrangers des Bouches-du-Rhône s'est prononcée en faveur de l'octroi d'une carte de résident à M. X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par le préfet des Bouches-du-Rhône devant le tribunal administratif de Marseille ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fougier, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Sanson, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail en date du 17 mars 1988 : "Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord" ; que les articles 1er et 10 de cet accord fixent les conditions dans lesquelles il est délivré aux ressortissants tunisiens une carte de résident de plein droit ; que ces stipulations font dès lors obstacle à l'application aux ressortissants tunisiens de celles des dispositions de l'article 15 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, qui ont le même objet ;
Considérant qu'aux termes de l'article 18 bis de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 : "Il est institué, dans chaque département, une commission de séjour des étrangers ... Cette commission est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser : le renouvellement d'une carte de séjour temporaire, -la délivrance d'une carte de résident à un étranger mentionné à l'article 15 de la présente ordonnance,- la délivrance d'un titre de séjour à un étranger mentionné à l'article 25 (1° à 6°) ..." ; que l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 n'a pas entendu écarter les ressortissants tunisiens du bénéfice des dispositions de l'article 18 bis rappelées ci-dessus, dans les cas où ces ressortissants entrent dans le champ d'application soit des dispositions auxquelles se réfère l'article 18 bis soit des stipulations de l'accord franco tunisien ayant le même objet que ces dispositions ;
Considérant qu'il ressort du dossier que le préfet des Bouches-du-Rhône, qui envisageait de rejeter la demande de M. X..., ressortissant tunisien, tendant à la délivrance d'une carte de résident en qualité de conjoint d'une Française, a saisi la commission du séjour des étrangers de ce département ; que cette commission a, le 25 févier 1991, donné un avis favorable à la délivrance de ce titre de séjour ;
Mais considérant que M. X..., qui ne disposait pas d'un titre de séjour en cours de validité, et qui était marié depuis moins d'un an à une ressortissante française, ne remplissait pas, à la date de l'avis litigieux, la condition prévue à l'article 10 a) de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ; que, par suite, le préfet n'était pas tenu, en application de l'article 18 bis, de soumettre son cas à la commission de séjour des étrangers et n'était pas lié par son avis ; qu'il n'avait dès lors pas intérêt, et n'était en conséquence pas recevable à demander au tribunal administratif de Marseille d'annuler ledit avis ;
Considérant que de ce qui précède il résulte que M. X... est fondé à demander l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a, sur la demande du préfet des Bouches-du-Rhône, annulé l'avis de la commission de séjour des étrangers de ce département en date du 25 février 1991 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille, en date du 30 juin 1992, est annulé.
Article 2 : Le recours du préfet des Bouches-du-Rhône devant le tribunal administratif de Marseille est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Kamel X... et au ministre de l'intérieur.