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24/01/1996 | FRANCE | N°153746

France | France, Conseil d'État, 4 / 1 ssr, 24 janvier 1996, 153746


Vu la requête, enregistrée le 23 novembre 1993 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour MM. X..., père et fils, demeurant ... de Serres à Limoges (87100) ; MM. X... demandent au Conseil d'Etat :
1° d'annuler l'ordonnance en date du 12 octobre 1993 par laquelle le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté comme irrecevable leur demande tendant à l'annulation d'une décision en date du 18 janvier 1993 par laquelle l'inspecteur d'académie de la Haute-Vienne a refusé d'affecter M. X... en classe de seconde ;
2° d'annuler ladite décision d

e l'inspecteur d'académie de la Haute-Vienne ;
Vu les autres pièces ...

Vu la requête, enregistrée le 23 novembre 1993 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour MM. X..., père et fils, demeurant ... de Serres à Limoges (87100) ; MM. X... demandent au Conseil d'Etat :
1° d'annuler l'ordonnance en date du 12 octobre 1993 par laquelle le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté comme irrecevable leur demande tendant à l'annulation d'une décision en date du 18 janvier 1993 par laquelle l'inspecteur d'académie de la Haute-Vienne a refusé d'affecter M. X... en classe de seconde ;
2° d'annuler ladite décision de l'inspecteur d'académie de la Haute-Vienne ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1958, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le décret n° 90-484 du 14 juin 1990, relatif à l'orientation et à l'affectation des élèves ;
Vu la loi n° 91-637 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Girardot, Auditeur,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de MM. X..., père et fils,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre de l'éducation nationale, la circonstance que l'inspecteur d'académie de la Haute-Vienne a, par une décision en date du 25 octobre 1993, décidé d'affecter M. X... dans un établissement public d'enseignement secondaire n'a pas rendu sans objet les conclusions de la requête dirigées contre la décision du 18 janvier 1993 qui a fait obstacle à l'inscription de M. X... au cours de l'année scolaire 1992-1993 ;
Considérant que la lettre du 18 janvier 1993 par laquelle l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'éducation nationale de la Haute-Vienne a demandé à M. X... de se mettre en rapport avec les services de la préfecture et de fournir une photocopie de sa carte de séjour "en l'absence de laquelle aucune affectation ne pourra être prononcée" constituait une décision de refus d'affectation et faisait grief au requérant ; qu'ainsi, MM. X... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté comme irrecevables les conclusions dirigées contre ladite lettre ; qu'il suit de là que l'ordonnance susvisée du 12 octobre 1993 doit être annulée ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par MM. X... devant le tribunal administratif de Limoges ;
Considérant qu'aux termes de l'article 10 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 dans sa rédaction issue de la loi du 17 juillet 1984 : "Doivent être titulaires d'une carte de séjour temporaire : Les étrangers qui sont venus en France soit en qualité de visiteurs, soit comme étudiants, ..." ; qu'aux termes de l'article 12 de la même ordonnance : "La carte de séjour délivrée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention étudiant" ; que ces dispositions, auxquelles la circulaire du ministre de l'éducation nationale en date du 16 juillet 1984 ne saurait en tout état de cause faire échec, impliquent nécessairement qu'un étranger puisse être admis, au moins à titre provisoire, dans un établissement d'enseignement avant d'avoir obtenu un premier titre de séjour ; qu'ainsi, la décision de l'inspecteur d'académie de la Haute-Vienne en date du 18 janvier 1993 refusant d'affecter M. X... dans un établissement d'enseignement secondaire aussi longtemps qu'il n'aurait pas fourni une photocopie de sa carte de séjour méconnaît les dispositions susrappelées et doit être annulée ;
Sur les conclusions présentées devant le tribunal administratif de Limoges et tenant à ce que l'Etat soit condamné à verser à MM. X... une somme de 5 000 F :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à verser à MM. X... la somme de 5 000 F qu'ils demandent au titre des sommes exposées et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : L'ordonnance du président du tribunal administratif de Limoges en date du 12 octobre 1993 est annulée.
Article 2 : La décision de l'inspecteur d'académie de la Haute-Vienne en date du 18 janvier 1993 est annulée.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 5 000 F à MM. X... au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à MM. X... et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.


Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ENSEIGNEMENT - QUESTIONS PROPRES AUX DIFFERENTES CATEGORIES D'ENSEIGNEMENT - ENSEIGNEMENT DU SECOND DEGRE - Refus d'affecter un élève étranger dans un établissement d'enseignement secondaire au motif qu'il n'est pas muni d'un titre de séjour - Illégalité au regard des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 subordonnant la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" à la preuve que l'intéressé suit un enseignement en France.

30-02-02, 335-01-01 Les dispositions de l'article 12 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 subordonnant la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" à la preuve que l'intéressé suit un enseignement en France impliquent nécessairement qu'un étranger venu en France comme étudiant puisse être admis, au moins à titre provisoire, dans un établissement d'enseignement avant d'avoir obtenu un premier titre de séjour. Est par suite contraire à ces dispositions la décision d'un inspecteur d'académie refusant d'affecter un étranger dans un établissement d'enseignement secondaire tant qu'il n'aura pas fourni une photocopie de sa carte de séjour.

ETRANGERS - SEJOUR DES ETRANGERS - TEXTES APPLICABLES - Dispositions subordonnant la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" à la preuve que l'intéressé suit un enseignement en France (article 12 - 2ème alinéa de l'ordonnance du 2 novembre 1945) - Conséquences - Impossibilité de subordonner l'affectation d'un étranger dans un établissement d'enseignement secondaire à la présentation d'un titre de séjour.


Références :

Circulaire du 16 juillet 1984
Loi du 17 juillet 1984
Loi 91-637 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 10, art. 12


Publications
Proposition de citation: CE, 24 jan. 1996, n° 153746
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Labetoulle
Rapporteur ?: M. Girardot
Rapporteur public ?: M. Schwartz
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, Avocat

Origine de la décision
Formation : 4 / 1 ssr
Date de la décision : 24/01/1996
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 153746
Numéro NOR : CETATEXT000007875773 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1996-01-24;153746 ?
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