Vu la requête enregistrée le 8 février 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Joël X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat annule la décision en date du 4 décembre 1991 par laquelle le directeur central du commissariat de l'armée de terre a refusé de lui verser au taux chef de famille l'indemnité pour charges militaires qu'il a perçue au taux célibataire pendant son séjour en Tunisie du 1er septembre 1984 au 31 août 1986 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 13 juillet 1972 ;
Vu le décret n° 59-1193 du 13 octobre 1959 modifié ;
Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Rousselle, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Denis-linton, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X..., lieutenant-colonel de l'armée de l'air, conteste la prescription opposée par l'administration à la demande qu'il a présentée le 7 octobre 1991 pour que lui soit versée, au taux chef de famille, l'indemnité pour charges militaires qu'il a perçue au taux célibataire pendant son séjour en Tunisie, du 1er septembre 1984 au 31 août 1986 ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : "Sont prescrites au profit de l'Etat ... toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis." ; que l'article 2 de la même loi précise que : "La prescription est interrompue par : ...tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ..." ; que le fait générateur des créances dont se prévaut M. X... est constitué par le service fait par lui dans son administration ; que le délai de prescription n'a pu être interrompu par le recours juridictionnel formé par un autre fonctionnaire s'étant trouvé dans une situation comparable, la créance dont se prévalait ce dernier ayant pour origine un fait générateur distinct ; que, dans ces conditions, il appartenait à M. X... pour échapper au délai de la prescription quadriennale de demander le paiement de sa créance avant le 31 décembre 1990 ; qu'il résulte des pièces du dossier qu'il n'a présenté une telle demande que le 7 octobre 1991, soit après l'expiration du délai de la prescription quadriennale ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. X... n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1968 précitée, aux termes duquel : "en aucun cas, la prescription ne peut être invoquée par l'administration pour s'opposer à l'exécution d'une décision passée en force de chose jugée", dès lors qu'il est constant qu'aucune décision ayant l'autorité de la chose jugée n'a été rendue en sa faveur ;
Considérant, enfin, que les dispositions de l'article 2 du décret du 28 novembre 1983 susvisé, aux termes desquelles "lorsqu'une décision juridictionnelle devenue définitive émanant des tribunaux administratifs ou du Conseil d'Etat a prononcé l'annulation d'un acte non réglementaire, par un motif tiré de l'illégalité du règlement dont cet acte fait application, l'autorité compétente est tenue, nonobstant l'expiration des délais de recours, de faire droit à toute demande ayant un objet identique et fondée sur le même motif, lorsque l'acte concerné n'a pas créé de droits au profit des tiers" ne sauraient faire obstacle au droit que tient l'administration des dispositions législatives précitées d'opposer à ses éventuels créanciers la prescription quadriennale pour la partie de la créance qui encourt la prescription ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par l'administration, que la requête de M. X... doit être rejetée ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Joël X... et au ministre de la défense.