La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/01/1996 | FRANCE | N°150501

France | France, Conseil d'État, 2 ss, 31 janvier 1996, 150501


Vu la requête, enregistrée le 2 août 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. X... DAHMANE, demeurant ... ; M. DAHMANE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 23 septembre 1992 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'une part de la décision en date du 26 février 1992 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté la demande par laquelle M. DAHMANE sollicitait l'abrogation de l'arrêté d'expulsion du 13 août 1986 pris à son encontre, d'autre part dudit arrêté et à c

e qu'il soit sursis à l'exécution de cet arrêté ;
2°) annule pour exc...

Vu la requête, enregistrée le 2 août 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. X... DAHMANE, demeurant ... ; M. DAHMANE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 23 septembre 1992 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'une part de la décision en date du 26 février 1992 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté la demande par laquelle M. DAHMANE sollicitait l'abrogation de l'arrêté d'expulsion du 13 août 1986 pris à son encontre, d'autre part dudit arrêté et à ce qu'il soit sursis à l'exécution de cet arrêté ;
2°) annule pour excès de pouvoir ces décisions ;
3°) ordonne qu'il soit sursis à l'exécution dudit arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, et notamment son article 8 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-984 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme de Margerie, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Delarue, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'article R. 193 du code des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel dispose que "toute partie doit être avertie, par une notification faite conformément aux articles R. 139 et R. 140, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience. Dans les deux cas, l'avertissement est donné sept jours au moins avant l'audience. Toutefois, en cas d'urgence, ce délai pourra être réduit à deux jours par une décision expresse du président de la formation de jugement qui sera mentionnée sur la convocation" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'avis d'audience devant le tribunal administratif de Lyon, par lequel l'avocat du requérant était informé de celle-ci, a été établi la veille de cette audience ; qu'il en résulte que le jugement par lequel le tribunal administratif a rejeté la demande de M. DAHMANE a été rendu à la suite d'une procédure irrégulière et doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la requête présentée par M. DAHMANE devant le tribunal administratif de Lyon ;
Considérant que l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée dispose que "sous réserve des dispositions de l'article 25, l'expulsion peut être prononcée par arrêté du ministre de l'intérieur si la présence sur le territoire français d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public. L'arrêté d'expulsion peut à tout moment être abrogé par le ministre de l'intérieur" ;
Considérant que la décision du 26 février 1992 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé d'abroger l'arrêté d'expulsion en date du 13 août 1986 pris à l'encontre du requérant a été signée par M. Robert Y..., administrateur civil, chef du bureau des étrangers à statuts spéciaux au ministère de l'intérieur, titulaire d'une délégation de signature accordée par arrêté du ministre de l'intérieur en date du 7 octobre 1991 publiée au Journal officiel du 18 octobre 1991 ; qu'ainsi le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée doit être écarté ;
Considérant que si l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 interdit au ministre de l'intérieur de prononcer l'expulsion de certaines catégories d'étrangers, cette disposition ne saurait être utilement invoquée à l'appui d'une demande tendant à l'abrogation d'une mesure d'expulsion antérieurement prise ; qu'il appartient seulement au ministre, saisi d'une telle demande, d'apprécier en vertu de l'article 23 précité, si la présence de l'intéressé sur le territoire français constitue à la date à laquelle il se prononce une menace grave pour l'ordre public ;
Considérant qu'en estimant, par la décision attaquée, que M. DAHMANE, condamné à plusieurs reprises à des peines de prison pour vols, vols avec effraction, vol avecviolence et en réunion, de nouveau incarcéré à la date où il statuait et entré irrégulièrement sur le territoire national, constituait une menace grave pour l'ordre public, le ministre de l'intérieur n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant que si M. DAHMANE soutient que la mesure attaquée a porté une atteinte excessive à sa vie familiale en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, qui a épousé le 28 novembre 1991 une ressortissante française et a reconnu le même jour un enfant né en 1988, n'avait aucune communauté de vie avec son épouse et que l'enfant reconnu par le requérant était placé depuis sa naissance en nourrice ; qu'ainsi la mesure attaquée, eu égard à la gravité de la menace que sa présence sur le territoire français ferait peser sur l'ordre public, n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels le refus d'abrogation de l'arrêté d'expulsion pris à son encontre lui a été opposé ;
Considérant enfin que le moyen tiré d'une violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Article 1er : Le jugement du 23 septembre 1992 du tribunal administratif de Lyon est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. DAHMANE devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. DAHMANE est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X... DAHMANE et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2 ss
Numéro d'arrêt : 150501
Date de la décision : 31/01/1996
Type d'affaire : Administrative

Analyses

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - DROITS GARANTIS PAR LA CONVENTION - DROIT AU RESPECT DE LA VIE FAMILIALE (ART - 8) - CONTROLE DU JUGE.

ETRANGERS - EXPULSION - ABROGATION.

PROCEDURE - JUGEMENTS - TENUE DES AUDIENCES - AVIS D'AUDIENCE.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 23, art. 25


Publications
Proposition de citation : CE, 31 jan. 1996, n° 150501
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme de Margerie
Rapporteur public ?: M. Delarue

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1996:150501.19960131
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award