Vu le recours, enregistré le 14 janvier 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE CHARGE DU BUDGET ; le MINISTRE CHARGE DU BUDGET demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt du 14 novembre 1990 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes :
1°) a rejeté son recours dirigé contre le jugement du 21 janvier 1987 du tribunal administratif de Nantes accordant à la S.C.A. "Cultures Blanchaud", venant aux droits de la S.A. Sicaly, la décharge de la taxe professionnelle à laquelle elle avait été assujettie au titre des années 1978 à 1983 dans les rôles de la commune de Chace ;
2°) l'a condamné à payer à la S.C.A. "Cultures Blanchaud" une somme de 5 000 F, au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Vestur, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Gatineau, avocat de la S.C.A. "Cultures Blanchaud",
- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1450 du code général des impôts : "Les exploitants agricoles .... sont exonérés de la taxe professionnelle" ;
Considérant que la cour administrative d'appel de Nantes a relevé, dans les motifs de son arrêt, que la S.A. Sicaly, reprise par la S.C.A. "Cultures Blanchaud" à compter du 31 décembre 1983, avait pour activité la fabrication, à partir de fumier, de paille et d'engrais, de compost destiné à être vendu à des producteurs de champignons, mais que les trois quarts au moins de sa production comportaient une phase dite "d'ensemencement" au cours de laquelle du "blanc de champignon" était incorporé au compost afin de permettre le développement des germes de champignon au terme d'une période de dix-huit jours dite "d'incubation" ; que la Cour a déduit de cette constatation que, malgré la durée limitée de la phase "d'incubation" et quelle que soit l'importance des moyens de production mis en oeuvre par l'exploitant, la production de compost ensemencé, en tant qu'elle s'insère dans l'exploitation du cycle biologique aboutissant à la production de champignons, comporte des actes de production agricole et que, dès lors, la S.A. Sicaly avait, au titre de cette activité, prépondérante par rapport à celle de vente en vrac de compost non ensemencé, la qualité d'exploitant agricole et était donc en droit de bénéficier de l'exonération de taxe professionnelle prévue par l'article 1450 précité ; qu'en statuant ainsi, la Cour a donné aux faits qu'elle a souverainement appréciés, une exacte qualification juridique ;
Considérant qu'il ressort de ce qui précède que le MINISTRE CHARGE DU BUDGET n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué qui a confirmé le jugement par lequel le tribunal administatif de Nantes a déchargé la S.A. Sicaly de la taxe professionnelle à laquelle elle avait été assujettie au titre des années 1978 à 1983, dans les rôles de la commune de Chace ;
En ce qui concerne les frais irrépétibles :
Considérant, en premier lieu, que l'article R. 222, alors en vigueur, du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel laissait à l'appréciation du juge le soin de fixer le montant de la somme à allouer au titre des frais exposés et non compris dans les dépens et ne subordonnait pas le prononcé d'une condamnation au remboursement de ces frais à la production de justificatifs ; que le ministre, n'est par suite, pas fondé à soutenir qu'en l'absence de tels justificatifs, la cour administrative d'appel aurait méconnu les dispositions dudit article R. 222 en condamnant l'Etat à payer à la S.C.A. "Cultures Blanchaud" une somme de 5 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à verser à la S.C.A. "Cultures Blanchaud" la somme qu'elle réclame, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE CHARGE DU BUDGET est rejeté.
Article 2 : L'Etat paiera à la S.C.A. "Cultures Blanchaud" une somme de 11 860 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la S.C.A. "Cultures Blanchaud" et au ministre de l'économie et des finances.