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28/02/1996 | FRANCE | N°145713

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 28 février 1996, 145713


Vu la requête enregistrée le 1er mars 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Azzedine Y..., demeurant chez M. X..., ... ; M. Y... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 décembre 1992 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 7 décembre 1992 par lequel le préfet de police de Paris a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'

annuler l'arrêté du 26 décembre 1991 par lequel le préfet de police de Paris a reje...

Vu la requête enregistrée le 1er mars 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Azzedine Y..., demeurant chez M. X..., ... ; M. Y... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 décembre 1992 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 7 décembre 1992 par lequel le préfet de police de Paris a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'annuler l'arrêté du 26 décembre 1991 par lequel le préfet de police de Paris a rejeté sa demande de titre de séjour étudiant ;
4°) de lui communiquer l'intégralité de son dossier administratif ;
5°) de provoquer l'intervention forcée des ministres de l'éducation nationale, de la culture, des sports, de l'intérieur et des affaires étrangères ;
6°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 F au titre des frais irrépétibles ;
7°) d'ordonner la publication de la décision juridictionnelle à venir au JournalOfficiel ou à défaut son affichage dans les centres d'accueil des étrangers de la préfecture de police de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et l'avenant du 22 décembre 1985 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990 et la loi du 26 février 1992 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de M. Delarue, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à l'appui de son recours pour excès de pouvoir contre l'arrêté de reconduite à la frontière pris à son encontre le 7 décembre 1992 par le préfet de police de Paris, M. Y... a soutenu en première instance que cet arrêté était entaché de détournement de procédure ; que le jugement attaqué ne répond pas à ce moyen ; que, dès lors, M. Y... est fondé à en demander l'annulation ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande de première instance de M. Y... ainsi que sur le surplus des conclusions de sa requête d'appel ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière du 7 décembre 1992 :
Considérant, en premier lieu, que ledit arrêté est suffisamment motivé ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, le préfet peut décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière " .... 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour temporaire a été refusé s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un mois à compter de la date de notification du refus" ; que si, aux termes de l'article 6 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 " ... la carte de séjour peut provisoirement être remplacée par le récépissé de la demande de délivrance ou de renouvellement de ladite carte", ces dispositions n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir poureffet de subordonner la légalité d'un arrêté de reconduite à la frontière pris sur le fondement du 3° précité du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 à l'examen préalable d'une nouvelle demande de titre de séjour que l'étranger a pu présenter sur un fondement juridique différent de celui du titre de séjour antérieur dont le renouvellement lui a été refusé ;
Considérant que la décision rejetant la demande de renouvellement de son certificat de résidence en qualité d'étudiant formée par M. Y..., de nationalité algérienne, lui a été notifiée le 26 décembre 1991 ; qu'ainsi à la date de l'arrêté de reconduite à la frontière contesté, le 7 décembre 1992, et alors même que, comme il le soutient, il aurait entre-temps formulé une demande de carte de résident à un autre titre, il entrait dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

Considérant que ni la circonstance que l'administration ait refusé de lui délivrer un récépissé de la nouvelle demande susmentionnée qu'il prétend avoir présentée sans en apporter d'ailleurs aucun commencement de preuve, ni le fait qu'à la date de la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre le 7 décembre 1992, le préfet de police de Paris n'avait pas encore produit ses observations sur le recours pour excès de pouvoir dirigé contre le refus de renouvellement du certificat de résidence en qualité d'étudiant, enregistré au tribunal administratif de Paris le 27 février 1992 ne suffisaient à établir que, comme il le soutient, cette mesure de reconduite à la frontière aurait en réalité eu pour but exclusif de priver d'effet utile ce recours pour excès de pouvoir et d'éviter de traiter sa demande d'un certificat de résidence de dix ans sur le fondement des articles 7 et 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié par l'avenant et le protocole du 22 décembre 1985 ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que l'arrêté de reconduite à la frontière serait entaché de détournements de procédure et de pouvoir ne saurait être accueilli ;
Considérant, il est vrai, que M. Y... soutient, par voie d'exception, l'illégalité de la décision du 26 décembre 1991 refusant de renouveler son certificat de résidence en qualité d'étudiant ;
Considérant, cependant, que l'accord ainsi que l'avenant et le protocole susmentionnés, qui régissent seuls les conditions de séjour en France des ressortissants algériens, n'exigent pas la consultation préalable de la commission du séjour des étrangers prévue par l'article 18 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée en cas de refus de renouvellement d'un certificat de résidence ; qu'il ressort des termes mêmes de l'article 8 du décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 qu'une décision refusant de faire droit à une demande de renouvellement de titre de séjour n'est pas au nombre des décisions auxquelles les prescriptions édictées par cet article sont applicables ; qu'enfin, contrairement à ce que soutient M. Y..., ni l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni le principe général des droits de la défense n'imposaient au préfet de police de Paris de mettre M. Y... à même de présenter ses observations orales et écrites avant d'écarter les pièces justificatives qu'il avait produites à l'appui de sa demande de renouvellement de titre de séjour ; qu'ainsi la légalité externe de la décision de refus prise sur cette demande n'est pas utilement contestée ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de sa demande de renouvellement de son certificat de résidence en qualité d'étudiant le 14 octobre 1991, M. Y..., né en 1963 et entré en France en 1986 était inscrit à une formation professionnelle post universitaire axée sur la technique de gestion commerciale de petite et moyenne entreprise dispensée d'octobre 1991 à juin 1992 par le service de formation continue de l'école normale supérieure de Cachan après avoir suivi l'année précédente une formation de même type dispenséedans le même établissement et axée sur la programmation, l'utilisation et la maintenance des directeurs de commande de machine outil à commande numérique et n'avoir pendant les quatre années universitaires antérieures, obtenu aucun diplôme sanctionnant les études qu'il avait entreprises successivement en mathématiques, physique et mécanique puis en anthropologie ; qu'en déduisant de l'ensemble de ces éléments que l'intéressé ne pouvait plus, en 1991, être regardé comme poursuivant réellement des études sérieuses et, dès lors ne pouvait plus prétendre au bénéfice des stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et du protocole annexé à l'avenant à cet accord du 22 décembre 1985 relatives aux conditions de séjour en France des ressortissants algériens qui y font des études, le préfet de police de Paris, qui avait compétence pour ce faire au vu des pièces fournies par l'intéressé, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'ainsi la légalité interne de la décision du 26 décembre 1991 n'est pas non plus utilement contestée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin, contrairement à ce que soutient M. Y..., de mettre en cause le ministre de l'éducation nationale, le ministre des affaires étrangères et le ministre de l'intérieur, ni d'ordonner la production par le préfet de police de Paris de "l'entier dossier administratif individuel du requérant", les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière du 7 décembre 1992 ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur le surplus des conclusions de la demande et de la requête de M. Y... :
Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, d'une part, le préfet de police de Paris a statué sur la demande de renouvellement de certificat de résidence en qualité d'étudiant et, d'autre part, M. Y... n'a pas apporté le moindre commencement de preuve de ce qu'il aurait formé une demande de certificat de résidence à un autre titre et, notamment, au titre des articles 7 et 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 dans leur rédaction résultant de l'avenant du 22 décembre 1985 ; qu'ainsi ses conclusions tendant à ce que le juge administratif constate que le refus de délivrance d'un récépissé de la demande de certificat de résidence est constitutif d'une voie de fait et enjoigne à l'administration de lui remettre ce récépissé et de procéder à l'examen de cette demande ne sauraient, en tout état de cause, être accueillies ; qu'il en va de même, par voie de conséquence, des conclusions tendant à la publication ou, à défaut, à l'affichage de la présente décision ;

Considérant, en second lieu, que M. Y... succombant dans la présente instance, ses conclusions tendant au paiement d'une somme de 10 000 F au titre des frais irrépétibles ne peuvent qu'être rejetées ;
Article 1er : Le jugement susvisé du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 11 décembre 1992 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Azzedine Y..., au préfet de police de Paris et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 145713
Date de la décision : 28/02/1996
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 5
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 6, art. 18 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 28 fév. 1996, n° 145713
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M LATOURNERIE
Rapporteur public ?: M. Delarue

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1996:145713.19960228
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