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01/03/1996 | FRANCE | N°174245;174246

France | France, Conseil d'État, Avis section, 01 mars 1996, 174245 et 174246


Vu, enregistrés le 3 novembre 1995 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les jugements du 26 octobre 1995, par lesquels le tribunal administratif de Nice, avant de statuer sur les demandes de la SARL France Finibéton tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1985, 1986 et 1987, a décidé, par application des dispositions de l'article 12 de la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif, de transmettre

les dossiers de ces demandes au Conseil d'Etat, en soumettant à s...

Vu, enregistrés le 3 novembre 1995 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les jugements du 26 octobre 1995, par lesquels le tribunal administratif de Nice, avant de statuer sur les demandes de la SARL France Finibéton tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1985, 1986 et 1987, a décidé, par application des dispositions de l'article 12 de la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif, de transmettre les dossiers de ces demandes au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen les questions suivantes :
1°) l'annulation, quel qu'en soit le motif, par la Cour de cassation de la décision de l'autorité judiciaire autorisant des agents de l'administration fiscale à effectuer une visite domiciliaire et à saisir des documents se rapportant à des agissements mentionnés à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales entache-t-elle d'irrégularité l'ensemble de la procédure de vérification de la comptabilité d'une personne morale entreprise en application de l'article L. 47 du même livre lorsque des documents faisant partie de la comptabilité de cette personne morale ont été saisis ?
2°) dans l'affirmative, s'agit-il d'une irrégularité par voie de conséquence résultant de la mise en oeuvre irrégulière des dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ou bien cette irrégularité découle-t-elle des opérations d'investigation elles-mêmes ?
3°) en cas de réponse négative à la première question, l'annulation de la décision de l'autorité judiciaire par la Cour de cassation est-elle de nature à affecter la valeur probante des documents comptables saisis et à exclure leur utilisation pour justifier les redressements opérés ?
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code général des impôts, et notamment l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, et notamment son article 12 ;
Vu les articles 57-11 à 57-13 ajoutés au décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 88-905 du 2 septembre 1988 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Hourdin ,
- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;

L'article 94 de la loi du 29 décembre 1984 dont les dispositions ont été codifiées à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales institue une procédure de nature fiscale qui habilite les agents de l'administration des impôts, recherchant la preuve d'agissements par lesquels des contribuables cherchent à se soustraire à l'établissement ou au paiement de certains impôts, à effectuer, s'ils sont dûment autorisés à cette fin par l'autorité judiciaire, des visites en tous lieux, même privés, et à saisir les pièces et documents qui se rapportent à ces agissements. Ainsi que le précise le paragraphe VI de cet article, l'administration "ne peut opposer au contribuable les informations qu'elle a recueillies" à cette occasion qu'en engageant à l'égard de l'intéressé un examen contradictoire de l'ensemble de sa situation personnelle ou une vérification de sa comptabilité.
Il en résulte que la procédure de visite et de saisie instituée par cet article doit nécessairement être combinée avec la procédure de vérification concernant le même contribuable, de sorte que ces procédures qui constituent deux étapes de la procédure d'imposition, concourent à la décision d'imposition de l'intéressé qui sera prise par l'administration. L'annulation par la Cour de cassation de l'ordonnance par laquelle le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué par lui a autorisé une opération de visite ou de saisie, qui a pour effet d'interdire à l'administration des impôts d'opposer au contribuable les informations recueillies à cette occasion, affecte donc la régularité de la décision d'imposition de l'intéressé dans la mesure où celle-ci procède de l'exploitation des informations ainsi recueillies. Compte tenu des termes mêmes du paragraphe VI de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, qui ont une portée générale, il en est ainsi même si le contribuable se trouve en situation de taxation ou d'évaluation d'office. Cette annulation demeure, en revanche, sans incidence sur la régularité de la décision d'imposition dans la mesure où celle-ci procède de l'exploitation de renseignements que l'administration n'a pas recueillis à l'occasion de la visite annulée.
La circonstance que l'administration aurait pu, si elle s'était bornée à exercer son droit de communication ou son pouvoir de vérification, accéder régulièrement à certains des documents détenus par le contribuable, tels les documents comptables, demeure sans incidence sur les effets de l'annulation d'une opération de visite et de saisie dès lors que l'administration a pris connaissance de ces documents à cette occasion et avant tout autre contrôle ou investigation.
Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Nice, à la SARL France Finibéton et au ministre de l'économie et des finances.
Il sera publié au Journal officiel de la République française.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

- RJ1 - RJ2 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL - Visites et saisies domiciliaires (article L - 16 B du livre des procédures fiscales) - Conséquences sur l'établissement de l'impôt de l'annulation par le juge judiciaire d'une ordonnance autorisant l'administration à effectuer des visites et saisies domiciliaires - Irrégularité de la décision d'imposition - même en cas de taxation ou d'évaluation d'office (1) (2).

19-01-03-01, 19-01-03-02-01, 19-04-02-01-06-01-02, 54-06-06-02-01 Il résulte des dispositions de l'article L.16 B du livre des procédures fiscales que la procédure de visite et de saisie instituée par cet article constitue, avec la procédure de vérification, l'une des deux étapes de la procédure d'imposition concourant à la décision d'imposition de l'intéressé qui sera prise par l'administration. Par suite, l'annulation par la Cour de cassation de l'ordonnance autorisant une opération de visite ou de saisie, qui a pour effet d'interdire à l'administration des impôts d'opposer au contribuable les informations recueillies à cette occasion, affecte la régularité de la procédure d'imposition de l'intéressé dans la mesure où celle-ci procède des informations ainsi recueillies, même, compte tenu de la portée générale des termes du paragraphe VI de cet article, si le contribuable se trouve en situation de taxation ou d'évaluation d'office (1) (2).

- RJ1 - RJ2 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - REDRESSEMENT - GENERALITES - Impositions établies à partir d'informations recueillies lors de visites et saisies domiciliaires autorisées en vertu de l'article L - 16 B du livre des procédures fiscales - Conséquences de l'annulation de l'autorisation par le juge judiciaire - Irrégularité de la décision d'imposition procédant de l'utilisation de ces informations - même en cas de taxation ou d'évaluation d'office (1) (2).

- RJ1 - RJ2 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - BENEFICE REEL - RECTIFICATION ET TAXATION D'OFFICE - Impositions établies à partir d'informations recueillies lors de visites et saisies domiciliaires autorisées en vertu de l'article L - 16 B du livre des procédures fiscales - Conséquences de l'annulation de l'autorisation par le juge judiciaire - Irrégularité de la décision d'imposition procédant de l'utilisation de ces informations (1) (2).

- RJ1 - RJ2 PROCEDURE - JUGEMENTS - CHOSE JUGEE - CHOSE JUGEE PAR LA JURIDICTION JUDICIAIRE - CHOSE JUGEE PAR LE JUGE CIVIL - Annulation par le juge judiciaire d'une ordonnance autorisant l'administration - en vertu de l'article L - 16 B du livre des procédures fiscales - à effectuer des visites et saisies domiciliaires - Conséquences sur l'établissement des impositions (1) (2).


Références :

CGI Livre des procédures fiscales L16 B
Loi 84-1208 du 29 décembre 1984 art. 94 finances pour 1985

1.

Rappr. Section, n° 174244, Egot, avis du même jour. 2. Comp. Section, 1995-12-06, Navon, p. 426 ;

Section, 1995-12-06, S.A. Samep, n° 126826


Publications
Proposition de citation: CE, 01 mar. 1996, n° 174245;174246
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Gentot
Rapporteur ?: M. Hourdin
Rapporteur public ?: M. Loloum

Origine de la décision
Formation : Avis section
Date de la décision : 01/03/1996
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 174245;174246
Numéro NOR : CETATEXT000007887083 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1996-03-01;174245 ?
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