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04/03/1996 | FRANCE | N°117884

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 04 mars 1996, 117884


Vu le jugement en date du 28 mai 1990 enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 14 juin 1990, par lequel le tribunal administratif de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R.81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à ce tribunal par la fédération nationale C.G.T. des personnels des secteurs financiers FNST-CGT et Mme Suzanne X... ;
Vu la demande enregistrée au greffe du tribunal administratif de Paris le 18 novembre 1988, présentée par la fédération nationale C.G.T. des perso

nnels des secteurs financiers FNST-CGT et Mme X... ; celles-ci...

Vu le jugement en date du 28 mai 1990 enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 14 juin 1990, par lequel le tribunal administratif de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R.81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à ce tribunal par la fédération nationale C.G.T. des personnels des secteurs financiers FNST-CGT et Mme Suzanne X... ;
Vu la demande enregistrée au greffe du tribunal administratif de Paris le 18 novembre 1988, présentée par la fédération nationale C.G.T. des personnels des secteurs financiers FNST-CGT et Mme X... ; celles-ci demandent l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget a autorisé la Banque de l'Union européenne (B.U.E.) à céder ses cinq succursales à la Westminster Bank ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 86-793 du 2 juillet 1986 ;
Vu la loi n° 86-912 du 6 août 1986 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Gosselin, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Boré, Xavier, avocat de la Banque de l'Union européenne,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu de l'article 34 de la Constitution la loi fixe les règles concernant "les nationalisations d'entreprises et les transferts de propriété d'entreprises du secteur public au secteur privé" ; qu'aux termes de l'article 7 de la loi du 2 juillet 1986 autorisant le Gouvernement à prendre diverses mesures d'ordre économique et social : "I.- Sont approuvés par la loi les transferts au secteur privé de la propriété : - des entreprises dont l'Etat détient directement plus de la moitié du capital social ; - des entreprises qui sont entrées dans le secteur public en application d'une disposition législative. II.- Les opérations ayant pour effet de réaliser un transfert du secteur public au secteur privé de propriété d'entreprises autres que celles mentionnées au paragraphe I ci-dessus sont soumises à l'approbation de l'autorité administrative, dans des conditions fixées par les ordonnances mentionnées à l'article 5. Nonobstant toute disposition législative contraire, toute prise de participation du secteur privé au capital social d'une entreprise dont l'Etat détient directement plus de la moitié du capital social, et qui n'a pas pour effet de transférer sa propriété au secteur privé, est soumise aux conditions d'approbation mentionnées à l'alinéa précédent." ; qu'enfin, aux termes de l'article 21 de la loi du 6 août 1986 relative aux modalités d'application des privatisations décidées par la loi du 2 juillet 1986 : "- Les opérations concernant des entreprises dont l'effectif ne dépasse pas mille personnes et le chiffre d'affaires 500 millions de francs, compte tenu des règles énoncées à cet égard à l'article 20, donnent lieu à déclaration préalable au ministre chargé de l'économie ; elles sont réputées autorisées si le ministre ne s'est pas opposé, dans les dix jours de la réception de cette déclaration, à leur transfert pour un motif tiré de la méconnaissance de l'une des conditions énoncées à l'article 20" ;
Considérant que la Banque de l'Union européenne, qui a été nationalisée en 1982 et placée ultérieurement sous le contrôle de la Compagnie financière de crédit industriel et commercial (C.F.C.I.C.), elle-même nationalisée la même année, a déposé auprès du ministre de l'économie, des finances et du budget le 3 juin 1988 une déclaration préalable en vue de la cession de ses cinq succursales de province à la "National Westminster Bank" ; qu'en l'absence d'opposition du ministre l'opération a été tacitement autorisée le 13 juin 1988 ; que cette opération, compte tenu de la nature des actifs concernés et de la faible part qu'ils représentent par rapport à l'ensemble des activités de l'entreprise au regard notamment des effectifs et du chiffre d'affaires ne constitue pas un transfert de propriété d'entreprise du secteur public au secteur privé au sens des dispositions constitutionnelles et législatives précitées ; qu'ainsi les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que la cession des cinq succursales de la Banque de l'Union européenne à la "National Westminster Bank" était subordonnée à l'intervention d'une loi ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 du décret du 24 octobre 1986 pris pour l'application de la loi du 6 août 1986 susmentionnée : "La procédure des articles 1er et 2 ci-dessus est applicable aux autorisations données par le ministre aux entreprises publiques lorsqu'elles cèdent dans les conditions de l'article 4 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 un ensemble d'actifs pouvant faire l'objet d'une exploitation autonome et réprésentant une part essentielle de l'activité de l'entreprise." ;
Considérant que les succursales que la Banque de l'Union Européenne envisage de céder ne constituent pas "un ensemble d'actifs pouvant faire l'objet d'une exploitation autonome et représentant une part essentielle de l'activité de l'entreprise" au sens des dispositions précitées ; que, par suite, l'autorisation donnée par le ministre à leur cession n'était pas soumise à la procédure instituée par lesdites dispositions ; que dès lors et en tout état de cause les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que cette autorisation aurait été prise à la suite d'une procédure irrégulière et qu'elle serait, pour ce motif, entachée d'illégalité ;
Sur les conclusions de la Banque de l'Union européenne tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner l'organisation syndicale requérante et Mme X... à payer à la Banque de l'Union européenne la somme qu'elle réclame au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête présentée par la fédération nationale C.G.T. des personnels des secteurs financiers FNST-CGT et Mme X... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la Banque de l'Union européenne tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la fédération nationale C.G.T. des personnels des secteurs financiers FNST-CGT, à Mme Suzanne X..., à la compagnie financière de crédit commercial et industriel et de l'Union européenne (anciennement la Banque de l'Union européenne) et au ministre de l'économie et des finances.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

CAPITAUX - MONNAIE - BANQUES - BANQUES - Cession de cinq succursales de la Banque de l'Union européenne au secteur privé - (1) Approbation par la loi requise pour ce transfert au secteur privé - Absence - (2) Ensemble d'actifs pouvant faire l'objet d'une exploitation autonome et représentant une part essentielle de l'activité de l'entreprise - Absence - Conséquences.

13-04(1), 43-02(1) La cession de cinq succursales de province de la Banque de l'Union européenne à la "National Westminster Bank", compte tenu de la nature des actifs concernés et de la faible part qu'ils représentent par rapport à l'ensemble des activités de l'entreprise au regard notamment des effectifs et du chiffre d'affaires, ne constitue pas un transfert de propriété d'entreprise du secteur public au secteur privé au sens de l'article 34 de la Constitution et de l'article 7 de la loi du 2 juillet 1986. Cette cession n'était pas subordonnée à l'intervention d'une loi.

NATIONALISATIONS ET ENTREPRISES NATIONALISEES - PRIVATISATIONS (1) Approbation par la loi requise pour les transferts au secteur privé d'une entreprise - Absence en l'espèce - Cession de cinq succursales de la Banque de l'Union européenne - (2) Procédure de privatisation (articles 1 et 2 du décret n° 86-1140 du 24 octobre 1986) - Applicabilité à la cession par une entreprise publique d'un ensemble d'actifs pouvant faire l'objet d'une exploitation autonome et représentant une part essentielle de l'activité de l'entreprise - Notion.

13-04(2), 43-02(2) Cinq succursales de la Banque de l'Union européenne ne constituent pas un ensemble d'actifs pouvant faire l'objet d'une exploitation autonome et représentant une part essentielle de l'activité de cette entreprise au sens de l'article 3 du décret du 24 octobre 1986. En conséquence, la cession de ces succursales n'était pas soumise à la procédure définie aux articles 1 et 2 de ce décret.


Références :

Constitution du 04 octobre 1958 art. 34
Décret 86-1140 du 24 octobre 1986 art. 3
Loi 86-793 du 02 juillet 1986 art. 7
Loi 86-912 du 06 août 1986 art. 21
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation: CE, 04 mar. 1996, n° 117884
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Labetoulle
Rapporteur ?: M. Gosselin
Rapporteur public ?: M. Bonichot
Avocat(s) : SCP Boré, Xavier, Avocat

Origine de la décision
Formation : 1 / 4 ssr
Date de la décision : 04/03/1996
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 117884
Numéro NOR : CETATEXT000007889243 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1996-03-04;117884 ?
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