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20/03/1996 | FRANCE | N°135167

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 20 mars 1996, 135167


Vu l'ordonnance du 6 mars 1992, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 10 mars 1992, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête présentée à cette cour par la S.A. LE COMPTOIR DU PAIN, représentée par M. Jean-Gilles X..., demeurant ... à La Roche-sur-Yon (85000), agissant en qualité de mandataire-liquidateur ;
Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel

de Nantes, le 27 février 1992, présentée par la S.A. LE COMPTOI...

Vu l'ordonnance du 6 mars 1992, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 10 mars 1992, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête présentée à cette cour par la S.A. LE COMPTOIR DU PAIN, représentée par M. Jean-Gilles X..., demeurant ... à La Roche-sur-Yon (85000), agissant en qualité de mandataire-liquidateur ;
Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Nantes, le 27 février 1992, présentée par la S.A. LE COMPTOIR DU PAIN ; la société demande :
1°) l'annulation du jugement du 3 janvier 1992 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé les décisions du 25 mars 1991 de l'inspecteur du travail de Loire-Atlantique qui l'avait autorisée à licencier MM. Y... et Z... ;
2°) le rejet des demandes présentées par MM. Y... et Z... devant le tribunal administratif de Nantes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Struillou, Auditeur,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions qu'il exerce normalement ni avec son appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte, notamment, des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise, y compris, en vertu des dispositions ajoutées au code du travail par l'article 227 de la loi du 25 janvier 1985, lorsque l'entreprise fait l'objet d'une procédure de redressement ou en cas de liquidation judiciaire, lorsque tout ou partie de l'activité est, en fait, reprise ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;
Considérant que, par un jugement du 7 mars 1991, le tribunal de commerce de La Roche-sur-Yon a prononcé à la liquidation de la S.A. LE COMPTOIR DU PAIN et désigné un liquidateur ; que par une ordonnance du 12 mars 1991, le juge-commissaire à la liquidation a autorisé la cession de certains matériels et de la marque à la société Boulangerie de l'Ouest Atlantique, qui a repris, en fait, l'activité de la précédente société, après réembauchage d'une partie du personnel de celle-ci ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et des motifs mêmes des décisions par lesquelles l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de MM. Y... et Z..., salariés protégés de la S.A. LE COMPTOIR DU PAIN, que celui-ci a entendu tirer les conséquences du jugement du 7 mars 1991 du tribunal de commerce de La Roche-sur-Yon ; que cependant la liquidation judiciaire prononcée par ce jugement ne peut avoir légalement pour effet de faire échec à l'application des dispositions du code du travail relatives à la protection exceptionnelle dont bénéficient certains salariés ; que par suite, il incombe à l'autorité administrative, compte tenu des perspectives de reprise, d'apprécier la réalité de la suppression des postes de travail, ainsi que les possibilités de reclassement, et d'examiner le caractère éventuellement discriminatoire des demandes d'autorisation de licenciement ; que, faute d'avoir procédé à ces vérifications, l'inspecteur du travail a entaché ses décisions d'illégalité ; que, dès lors, la S.A. LE COMPTOIR DU PAIN n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé ces décisions ;
Article 1er : La requête de la S.A. LE COMPTOIR DU PAIN est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Me X..., liquidateur de la S.A. LE COMPTOIR DU PAIN, à M. Y..., à M. Z... et au ministre du travail et des affaires sociales.


Synthèse
Formation : 8 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 135167
Date de la décision : 20/03/1996
Type d'affaire : Administrative

Analyses

- RJ1 ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - MOTIFS - POUVOIRS ET OBLIGATIONS DE L'ADMINISTRATION - COMPETENCE LIEE - Absence - Autorisation de licenciement de salariés protégés d'une entreprise dont la liquidation judiciaire a été prononcée par le tribunal de commerce (1).

01-05-01-03, 66-07-01-03-03, 66-07-01-04-03 La liquidation judiciaire ne peut avoir légalement pour effet de faire échec à l'application des dispositions du code du travail relatives à la protection exceptionnelle dont bénéficient certains salariés. Par suite, il incombe à l'autorité administrative, compte tenu des perspectives de reprise, d'apprécier la réalité de la suppression des postes de travail, ainsi que les possibilités de reclassement, et d'examiner le caractère éventuellement discriminatoire des demandes d'autorisation de licenciement. Illégalité de la décision de l'inspecteur du travail dont les motifs font apparaître qu'il s'est borné à tirer les conséquences du jugement prononçant la liquidation de l'entreprise, sans procéder aux vérifications qui lui incombaient (1).

- RJ1 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - MODALITES DE DELIVRANCE OU DE REFUS DE L'AUTORISATION - POUVOIRS DE L'AUTORITE ADMINISTRATIVE - Compétence liée - Absence - Autorisation de licenciement de salariés d'une entreprise dont la liquidation judiciaire a été prononcée par le tribunal de commerce (1).

- RJ1 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE - Entreprise en liquidation judiciaire - Absence de compétence liée de l'autorité administrative pour accorder l'autorisation de licenciement (1).


Références :

Loi 85-98 du 25 janvier 1985 art. 227

1.

Rappr. 1985-11-30, Garnier, Syndic de la liquidation des biens de la S.A.R.L. Engineering et Ouvrages d'Art, p. 306


Publications
Proposition de citation : CE, 20 mar. 1996, n° 135167
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Groux
Rapporteur ?: M. Struillou
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1996:135167.19960320
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