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20/03/1996 | FRANCE | N°162927

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 20 mars 1996, 162927


Vu la requête enregistrée le 18 novembre 1994 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE CAUSSE-WALON, dont le siège social est situé ..., représentée par son président directeur général en exercice ; la SOCIETE CAUSSE-WALON demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 17 octobre 1994 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 19 août 1993 du ministre de l'équipement, des transports et du tourisme qui, après avoir annulé la décision de l'inspecteur du travail du 24 février 1993, l'avait autorisée

à licencier M. X... ;
2°) rejette la demande présentée par M. X... deva...

Vu la requête enregistrée le 18 novembre 1994 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE CAUSSE-WALON, dont le siège social est situé ..., représentée par son président directeur général en exercice ; la SOCIETE CAUSSE-WALON demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 17 octobre 1994 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 19 août 1993 du ministre de l'équipement, des transports et du tourisme qui, après avoir annulé la décision de l'inspecteur du travail du 24 février 1993, l'avait autorisée à licencier M. X... ;
2°) rejette la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif d'Amiens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Struillou, Auditeur,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SOCIETE CAUSSE-WALON ;
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que, par une ordonnance du 20 avril 1994, le vice-président du tribunal administratif d'Amiens a fixé au 10 mai 1994 la date de clôture de l'instruction de la demande présentée par M. X... ; qu'en raison de la production par la SOCIETE CAUSSEWALON d'un mémoire en réplique, enregistré le 10 mai 1994 au greffe du tribunal, celui-ci a, par un jugement du 9 juin 1994, décidé de rouvrir l'instruction ; que, par une nouvelle ordonnance, du 5 septembre 1994, la date de clôture de l'instruction a été fixée au 27 septembre 1994 ; que le mémoire en réponse de M. X..., enregistré le 22 septembre 1994 au greffe du tribunal, se bornait à répondre aux observations présentées par la société et ne comportait aucun élément nouveau ; que, par suite, les premiers juges ont pu, sans méconnaître le caractère contradictoire de la procédure, ne pas donner suite à la demande de la SOCIETE CAUSSE-WALON qui tendait à un nouveau report de la date de clôture de l'instruction afin de pouvoir présenter un nouveau mémoire ; qu'ainsi, et contrairement à ce que soutient la société, le jugement attaqué n'a pas été rendu à l'issue d'une procédure irrégulière ;
Sur la légalité de la décision du 19 août 1993 du ministre de l'équipement, des transports et du tourisme qui a autorisé la SOCIETE CAUSSE-WALON à licencier M. X... :
Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail le licenciement des représentants du personnel, qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, doit être autorisé par l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement, en tenant compte, notamment, de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ;

Considérant que, pour autoriser la SOCIETE CAUSSE-WALON à licencier pour motif économique M. X..., qui était employé en qualité de conducteur hautement qualifié et exerçait, notamment, les fonctions de délégué syndical d'établissement et d'entreprise, de représentant syndical au comité d'établissement et au comité central d'entreprise et de délégué du personnel, le ministre du travail a estimé que la société avait satisfait à ses obligations en matière de reclassement ; que la société établit certes avoir effectué des démarches en vue du reclassement externe de M. X... en dehors de l'entreprise, notamment, en diffusant des listes d'emplois disponibles au sein du groupe auquel elle appartenait et en mettant en place une "antenne-emploi" ayant pour objet d'aider les membres du personnel dans leur orientation professionnelle et leur recherche d'emploi ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que la société ait, préalablement, examiné les possibilités de reclassement de M. X... au sein même de l'entreprise ; que faute d'avoir procédé à cet examen prioritaire, la SOCIETE CAUSSE-WALON ne peut être regardée comme ayant, par les seules actions menées en vue de faciliter le reclassement de l'intéressé à l'extérieur de l'entreprise, satisfait à l'obligation qui lui incombait ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision ministérielle susmentionnée ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE CAUSSE-WALON est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE CAUSSE-WALON, à M. X... et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01-04-03-01,RJ1 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE - OBLIGATION DE RECLASSEMENT -Caractère prioritaire du reclassement interne - Employeur s'étant abstenu d'examiner les possibilités de reclassement au sein de l'entreprise d'un salarié avant de lui proposer des offres de reclassement externe - Conséquences - Obligation de reclassement non satisfaite (1).

66-07-01-04-03-01 Pour autoriser la société C. à licencier pour motif économique M.T., salarié protégé, le ministre du travail a estimé que la société avait satisfait à ses obligations en matière de reclassement. Mais si la société établit avoir effectué des démarches en vue du reclassement de M. T. en dehors de l'entreprise, notamment au sein du groupe auquel elle appartenait, elle n'a pas, préalablement, examiné les possibilités de reclassement de ce salarié au sein même de l'entreprise. Faute d'avoir procédé à cet examen prioritaire, la société ne peut être regardée comme ayant satisfait à l'obligation qui lui incombait. Illégalité de la décision autorisant le licenciement (1).


Références :

1.

Cf. 1995-12-29, Société européenne pour l'équipement ménager, n° 109626


Publications
Proposition de citation: CE, 20 mar. 1996, n° 162927
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Groux
Rapporteur ?: M. Struillou
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Formation : 8 / 9 ssr
Date de la décision : 20/03/1996
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 162927
Numéro NOR : CETATEXT000007897035 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1996-03-20;162927 ?
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