Vu le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR enregistré le 7 mars 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 29 décembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé ses deux arrêtés en date du 2 mars 1993 prononçant l'expulsion du territoire français de M. Nasserdine X... et astreignant l'intéressé à résider dans le département du Rhône ;
2°) rejette la demande de M. X... devant le tribunal administratif de Lyon ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Nallet, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "I. - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant que M. X..., ressortissant algérien, n'a aucune attache familiale avec le pays dont il possède la nationalité, qu'il réside depuis sa naissance en 1962 en France où demeurent sa famille, sa compagne et sa fille ; que si l'intéressé s'est rendu coupable de septembre 1981 à avril 1989, de faits de proxénétisme, de vol, d'extorsion de fonds ainsi que d'infractions en matière de stupéfiants, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de son comportement, postérieurement aux condamnations prononcées à raison de ces faits, la mesure d'expulsion prise à l'encontre de M. X... a, eu égard à la gravité de l'atteinte portée à sa vie familiale, excédé ce qui était nécessaire à la défense de l'ordre public ; que, dans ces conditions, elle a été prise en violation des stipulations précitées de l'article 8 de la convention ; que, par suite, le MINISTRE DE L'INTERIEUR n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par un jugement en date du 29 décembre 1993, le tribunal administratif de Lyon a annulé ses deux arrêtés du 2 mars 1993 prononçant l'expulsion du territoire français de M. X... et astreignant l'intéressé à résider dans le département du Rhône ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. Nasserdine X....