La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/05/1996 | FRANCE | N°145755

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 22 mai 1996, 145755


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 3 mars 1993 et 5 juillet 1993, présentés pour la SOCIETE DACHEUX PERE ET FILS, dûment représentée par son dirigeant en exercice, dont le siège est ... ; la société demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 décembre 1992 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de l'association Picardie Nature, annulé l'arrêté en date du 28 février 1992 par lequel le préfet de la Somme a accordé à la société DACHEUX une autorisat

ion d'exploiter une carrière de graves silico-calcaires sur le territoire d...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 3 mars 1993 et 5 juillet 1993, présentés pour la SOCIETE DACHEUX PERE ET FILS, dûment représentée par son dirigeant en exercice, dont le siège est ... ; la société demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 décembre 1992 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de l'association Picardie Nature, annulé l'arrêté en date du 28 février 1992 par lequel le préfet de la Somme a accordé à la société DACHEUX une autorisation d'exploiter une carrière de graves silico-calcaires sur le territoire de la commune de Fremontiers ;
2°) de rejeter la demande présentée par l'association Picardie Nature devant ledit tribunal ;
3°) de lui allouer à titre d'indemnité la somme de 10 000 F ;
4°) de la dédommager de la perte d'exploitation consécutive à l'annulation de l'arrêté par l'octroi d'une somme de 300 000 F ;
5°) de lui allouer les intérêts de droit sur ces sommes à compter du 20 février 1992 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code minier ;
Vu la loi n° 93-3 du 4 janvier 1993 relative aux carrières ;
Vu le décret n° 79-1108 du 20 décembre 1979 relatif aux autorisations de mise en exploitation des carrières ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Touraine-Reveyrand, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Rouvière, Boutet, avocat de SOCIETE DACHEUX PERE ET FILS,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;

Sur la compétence du Conseil d'Etat :
Considérant que la loi n° 93-3 du 4 janvier 1993 susvisée est entrée en vigueur, ainsi que le prévoit son article 31, au plus tard le 6 juillet 1993 ; que le II de l'article 30 de ladite loi dispose que : "Les décisions relatives à l'ouverture et à l'exploitation de carrières, intervenues antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi, ne peuvent être déférées à la juridiction administrative que dans le délai de deux mois à compter de leur notification ou de leur publication dans les conditions définies au titre des dispositions du code minier" ; qu'il résulte de ces dispositions, en tout état de cause, que les recours formés contre les arrêtés d'autorisation d'ouverture de carrières intervenus avant le 6 juillet 1993 continuent à relever du contentieux de l'excès de pouvoir nonobstant la publication du décret n° 94-485 du 9 juin 1994 inscrivant les carrières à la nomenclature des installations classées ; qu'ainsi, le ministre de l'environnement n'est pas fondé à soutenir que l'appel formé contre le jugement du 23 septembre 1993 du tribunal administratif d'Amiens devrait être renvoyé à la cour administrative d'appel de Nancy ;
Sur la légalité de la décision contestée :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que le quatrième alinéa de l'article 106 du code minier dispose que l'autorisation d'exploiter une carrière "ne peut être refusée que si l'exploitation est susceptible de faire obstacle à l'application d'une disposition d'intérêt général. Le refus intervient par arrêté motivé. Le décret prévu au premier alinéa détermine les modalités d'application du présent alinéa" ; qu'aux termes de l'article 22-1° du décret du 20 décembre 1979 pris pour l'application de l'article 106 du code minier, l'autorisation peut être refusée lorsque : "1°) L'exploitation envisagée est susceptible de faire obstacle à l'application d'une disposition d'intérêt général, et notamment si les dangers et inconvénients qu'elle présente en particulier au regard des intérêtsvisés par l'article 84 du code minier ne peuvent être prévenus, compensés, réduits ou supprimés par des mesures appropriées" ; que parmi les intérêts visés à l'article 84 du code minier figurent "les caractéristiques essentielles du milieu environnant" ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les terrains intéressés par l'exploitation autorisée d'une carrière de graves silico-calcaires sur le territoire de la commune de Fremontières au lieu dit "Le marais d'Unzenneville" sont situés dans une zone caractéristique de la vallée des Evoissons dont l'écosystème présente, du point de vue faunistique et floristique, un intérêt particulier et auquel l'exploitation, notamment eu égard au type de réaménagement envisagé, causerait un dommage irréversible ; qu'eu égard à l'atteinte particulièrement grave qui serait ainsi portée aux caractéristiques essentielles de cette zone, qui est d'ailleurs couverte par le schéma d'exploitation et de réaménagement de la vallée des Evoissons, établi en 1984, lequel recommande que les terrains concernés par la demande soient préservés des exploitations de granulats, et par le schéma départemental de vocation piscicole de la Somme approuvé par arrêté préfectoral du 27 mai 1991 et qui fait partie de la zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) de la vallée des Evoissons établie en 1981 dans laquelle l'exploitation des carrières est à proscrire, le préfet de la Somme a commis une erreur manifeste d'appréciation en autorisant par son arrêté du 28 février 1992 l'exploitation de la carrière dont il s'agit ; que dès lors, la société DACHEUX n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé ledit arrêté ;
Sur les conclusions de la société DACHEUX tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui allouer, à titre d'indemnité, 10 000 F, et à la dédommager à hauteur de 300 000 F avec capitalisation des intérêts :
Considérant que de ce qui précède il résulte que ces conclusions doivent en tout état de cause être rejetées ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE DACHEUX PERE ET FILS est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE DACHEUX PERE ET FILS, à l'association PICARDIE NATURE et au ministre de l'environnement.


Synthèse
Formation : 6 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 145755
Date de la décision : 22/05/1996
Type d'affaire : Administrative

Analyses

40 MINES ET CARRIERES.


Références :

Code minier 106, 84
Décret 79-1108 du 20 décembre 1979 art. 22
Décret 94-485 du 09 juin 1994
Loi 93-3 du 04 janvier 1993 art. 31, art. 30


Publications
Proposition de citation : CE, 22 mai. 1996, n° 145755
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Touraine-Reveyrand
Rapporteur public ?: M. Piveteau

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1996:145755.19960522
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award