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28/06/1996 | FRANCE | N°158762

France | France, Conseil d'État, 8 ss, 28 juin 1996, 158762


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 24 mai 1994, présentée par la SOCIETE NATIONALE DES POUDRES ET EXPLOSIFS - SNPE S.A., dont le siège est ... IV à Paris (75181), prise en la personne de son représentant légal en exercice ; la SOCIETE NATIONALE DES POUDRES ET EXPLOSIFS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 24 février 1994 par lequel le tribunal administratif de Marseille a, à la demande de M. Denis X..., annulé la décision du 16 avril 1992 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la formation profess

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Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 24 mai 1994, présentée par la SOCIETE NATIONALE DES POUDRES ET EXPLOSIFS - SNPE S.A., dont le siège est ... IV à Paris (75181), prise en la personne de son représentant légal en exercice ; la SOCIETE NATIONALE DES POUDRES ET EXPLOSIFS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 24 février 1994 par lequel le tribunal administratif de Marseille a, à la demande de M. Denis X..., annulé la décision du 16 avril 1992 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a autorisé la société requérante à licencier M. X..., salarié protégé, pour motif économique ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Marseille ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Musitelli, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L. 420-22 et L. 436-1 du code du travail, les délégués du personnel et les membres du comité d'entreprise bénéficient d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ;
Considérant que, par décision du 31 octobre 1991, l'inspecteur du travail du Vaucluse a refusé d'autoriser la SOCIETE NATIONALE DES POUDRES ET EXPLOSIFS à licencier pour motif économique M. X..., délégué du personnel suppléant, employé dans l'établissement de Sorgues de cette société en qualité d'ouvrier au laboratoire LX ; que, par décision du 16 avril 1992, le ministre du travail a annulé cette décision et autorisé le licenciement de M. X... ; qu'à la demande de celui-ci, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du ministre ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, en particulier, du rapport d'expertise ordonné avant-dire droit par le tribunal administratif, qu'en raison de graves difficultés économiques, la SOCIETE NATIONALE DES POUDRES ET EXPLOSIFS a procédé, à partir de 1987, à plusieurs réductions du personnel et à une restructuration de son établissement de Sorgues où était affecté M. X... ; qu'à la suite de ces réductions, qui ont particulièrement frappé la catégorie des ouvriers, les effectifs de l'établissement ont été réduits de moitié en cinq ans ; qu'ainsi, en raison de l'importance des compressions de personnel, il n'existait aucune possibilité pour l'employeur de proposer à M. X... un reclassement interne à l'établissement de Sorgues sans entraîner l'éviction d'un autre salarié ; que M. X... ne saurait se prévaloir de la circonstance qu'il n'aurait pu bénéficier d'une formation offerte à d'autres agents du laboratoire ; que, malgré les recherches entreprises, il n'existait pas, au sein du groupe, d'emploi disponible correspondant à la qualification et au niveau de rémunération de l'intéressé ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, la SOCIETE NATIONALE DES POUDRES ET EXPLOSIFS ne saurait être regardée comme s'étant soustraite à l'obligation de reclassement qui lui incombait ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur l'existence d'une possibilité de reclassement du salarié au sein de l'entreprise pour annuler la décision du ministre du travail ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Marseille ;

Considérant, d'une part, que la circonstance que M. X... a reçu notification de la décision expresse du ministre, dont il n'est pas établi qu'elle n'ait pas été prise dans les délais, huit jours après l'expiration du délai de quatre mois dans lequel il est tenu de se prononcer, est sans influence sur la légalité de cette décision ;
Considérant, d'autre part, que contrairement à ce que soutient M. X..., il ne ressort pas des pièces du dossier que le licenciement du salarié était en rapport avec l'exercice de ses fonctions représentatives ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE NATIONALE DES POUDRES ET EXPLOSIFS est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du ministre du travail en date du 16 avril 1992 l'autorisant à licencier M. X... ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la SOCIETE NATIONALE DES POUDRES ET EXPLOSIFS qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à M. X... la somme qu'il demande au titre des sommes exposées par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 24 février 1994 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE NATIONALE DES POUDRES ET EXPLOSIFS, à M. Denis X... et au ministre du travail et des affaires sociales.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES.


Références :

Code du travail L420-22, L436-1
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation: CE, 28 jui. 1996, n° 158762
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Musitelli
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Formation : 8 ss
Date de la décision : 28/06/1996
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 158762
Numéro NOR : CETATEXT000007921670 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1996-06-28;158762 ?
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