Vu, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 28 juillet 1993, la requête présentée pour Mme Brunette X..., domiciliée ... ; Mme X... demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt du 6 mai 1993 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a, sur le recours du ministre du budget, d'une part, réformé le jugement du 2 avril 1992 du tribunal administratif de Cayenne qui l'avait déchargée des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels elle avait été assujettie au titre des années 1982 à 1983, d'autre part, remis à sa charge ces impositions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Boulard, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Lesourd, Baudin, avocat de Mme Brunette X...,
- les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : "Les bases où les éléments servant aux calculs des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions au moyen d'une notification ...." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme X... exploite, depuis 1973, à Saint-Laurent-du-Maroni (Guyane), un fonds de boulangerie à l'adresse duquel elle a eu également son domicile personnel jusqu'au 25 mai 1987 ; que, cependant, la notification de ses bases d'impositions, arrêtées d'office, pour les années 1982 et 1983, que l'administration des impôts lui a adressée le 29 juillet 1986 a été retournée à cette dernière par le service postal avec la mention : "n'habite pas à l'adresse indiquée" ; que, dans ses observations, enregistrées le 12 avril 1990 au greffe du tribunal administratif de Cayenne, le directeur des services fiscaux de Guyane a lui même confirmé à propos du retour du pli, que Mme X..., bien connue à Saint-Laurent-du-Maroni, exploite son fonds de boulangerie depuis 1973 et continue présentement d'y opérer ; que, par suite, la cour administrative d'appel de Paris n'a pu, sans dénaturer les pièces dont elle était saisie, estimer que Mme X... n'habitait plus à l'adresse indiquée et que ses bases d'impositions pour les années 1982 et 1983 lui avaient été régulièrement notifiées, alors qu'elle n'avait signalé aucun changement d'adresse ; que l'arrêt attaqué doit donc être annulé ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler immédiatement l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la notification à Mme X... des bases de son imposition à l'impôt sur le revenu, arrêtées d'office au titre des années 1982 et 1983, n'a pas été régulièrement faite ; que, par suite, le ministre du budget n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 2 avril 1992, le tribunal administratif de Cayenne a, pour ce motif, déchargé Mme X... de l'impôt sur le revenu auquel elle avait été assujettie au titre des années 1982 et 1983 ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 6 mai 1993 est annulé ;
Article 2 : Le recours présenté par le ministre du budget devant la cour administrative d'appel de Paris est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Brunette X... et au ministre de l'économie et des finances.