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08/07/1996 | FRANCE | N°121520

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 08 juillet 1996, 121520


Vu la requête, enregistrée le 6 décembre 1990 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Louis X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 5 juillet 1990 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre les décisions implicites de rejet résultant du silence gardé par le préfet de l'Hérault et le maire d'Agde en réponse aux recours administratifs formés contre l'arrêté préfectoral du 16 mai 1986 autorisant le transfert de la gestion des berges de l'Hérault au profit de

la commune d'Agde, le procès-verbal de remise de la gestion des berge...

Vu la requête, enregistrée le 6 décembre 1990 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Louis X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 5 juillet 1990 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre les décisions implicites de rejet résultant du silence gardé par le préfet de l'Hérault et le maire d'Agde en réponse aux recours administratifs formés contre l'arrêté préfectoral du 16 mai 1986 autorisant le transfert de la gestion des berges de l'Hérault au profit de la commune d'Agde, le procès-verbal de remise de la gestion des berges de l'Hérault et les délibérations municipales qui y sont relatives ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du domaine de l'Etat ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fougier, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Sanson, Commissaire du gouvernement ;

Sur le moyen tiré de l'illégalité de la procédure de transfert de gestion :
Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles L.35 et R.58 du code du domaine de l'Etat, le transfert de gestion des immeubles dépendant du domaine public dont la destination est modifiée est autorisée par le préfet après avis du directeur départemental des impôts chargé du domaine ;
Considérant que par arrêté du 16 mai 1986 pris après avis du directeur des services fiscaux, le préfet de l'Hérault a autorisé au profit de la commune d'Agde le transfert de gestion des dépendances des domaines publics fluvial et maritime de la rivière l'Hérault, sur une surface de onze hectares environ délimités sur un plan joint à l'arrêté ; que par délibération du 27 mars 1986, le conseil municipal de la commune d'Agde a décidé de faire aménager les berges de l'Hérault "pour les rendre plus agréables et plus accueillantes aux promeneurs et d'y créer des postes supplémentaires d'amarrage pour la navigation de plaisance" et a fixé à 40 ans la durée de ce transfert ; que le procès-verbal de remise a précisé dans son article 1 que le transfert était opéré dans le cadre de l'aménagement et de l'utilisation du domaine public fluvial et maritime pour les activités nautiques et touristiques ; qu'un tel projet emportait nécessairement modification de la destination de la partie du domaine public maritime et fluvial en cause ; qu'il s'ensuit que la procédure de transfert de gestion prévue par les articles L.35 et R.58 du code du domaine de l'Etat a pu être légalement utilisée ;
Sur le moyen tiré de l'incompétence du conseil municipal d'Agde pour fixer les redevances pour occupation temporaire du domaine public :
Considérant qu'au nombre des recettes non fiscales de la section de fonctionnement des budgets communaux peuvent figurer, en vertu de l'article L.231-6 du code des communes, le produit des permis de stationnement et de location sur les rivières, ports et quais fluviaux et autres lieux publics" ;
Considérant qu'il appartient à l'autorité chargée de la gestion du domaine public de fixer, tant dans l'intérêt dudit domaine et de son affectation que dans l'intérêt général, les conditions auxquelles elle entend subordonner les permissions d'occupation ; qu'il est constant que l'Etat tout en demeurant propriétaire du domaine public maritime et fluvial transféré et de ses dépendances en a confié la gestion à la commune d'Agde ; que dès lors, le conseil municipal de la commune d'Agde était compétent pour fixer les modalités de la redevance d'usage du domaine public et de ses dépendances pour les bateaux amarrés aux berges de l'Hérault ;

Sur le moyen tiré de l'équivalence entre le service rendu et le montant de la redevance :
Considérant que par délibération du 7 mai 1986 le conseil municipal de la commune d'Agde a décidé de majorer sur une période de six ans à compter du 1er janvier 1987 le montant de la redevance perçue initialement par l'Etat pour occupation temporaire du domaine public due au titre des bateaux amarrés aux berges de l'Hérault selon des barèmes déterminés en fonction de la longueur de ces derniers et non de leur système d'amarrage ; que si le requérant allègue sans en apporter la preuve, que cette majoration des redevances ne correspondait pas à une amélioration du service rendu il ressort des pièces du dossier que cette majoration a eu pour effet de porter le taux de la redevance à un montant qui a permis la réalisation de travaux significatifs d'amélioration des berges de l'Hérault par la commune d'Agde ; que ces travaux ont notamment eu pour effet d'accroître la solidité des berges, de faciliter l'accès des bateaux et d'augmenter le nombre de postes d'amarrage ; qu'ainsi les redevances perçues trouvent leur contrepartie dans les prestations fournies ;
Sur le moyen tiré de l'illégalité de l'assiette de la redevance :
Considérant que pour contester la délibération du conseil municipal de la commune d'Agde en date du 7 mai 1986 décidant d'asseoir la redevance sur la longueur des bateaux amarrés aux berges de l'Hérault, le requérant affirme qu'il s'agit en réalité d'une taxe sur les bateaux alors qu'une redevance d'occupation temporaire du domaine public doit être assise sur la surface occupée du domaine ou de ses dépendances ;
Considérant que la commune d'Agde a pu légalement prendre en compte la longueur des bateaux comme assiette de la redevance d'amarrage ;
Considérant enfin qu'au regard de l'utilisation du domaine public les bateaux de pêche d'une part et de plaisance de l'autre sont placés dans des conditions de fait différentes ; que cette différence de situation justifie une différence de traitement ; qu'ainsi le moyen tiré de la violation du principe d'égalité doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Louis X..., à la commune d'Agde et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme.


Synthèse
Formation : 6 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 121520
Date de la décision : 08/07/1996
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

COLLECTIVITES TERRITORIALES - COMMUNE - ORGANISATION DE LA COMMUNE - ORGANES DE LA COMMUNE - CONSEIL MUNICIPAL - ATTRIBUTIONS - DECISIONS RELEVANT DE LA COMPETENCE DU CONSEIL MUNICIPAL - Compétence pour fixer des redevances d'occupation du domaine public - Dépendances du domaine public fluvial et maritime dont la gestion a été transférée à la commune par application des articles L - 35 et R - 58 du code du domaine de l'Etat.

135-02-01-02-01-02-02, 135-02-04-03-05, 24-01-02-01-01-04(1) Il appartient à l'autorité chargée de la gestion du domaine public de fixer, tant dans l'intérêt dudit domaine et de sa gestion que dans l'intérêt général, les conditions auxquelles elle entend subordonner les permissions d'occupation. Dès lors que l'Etat, tout en demeurant propriétaire de dépendances du domaine public fluvial et maritime de la rivière l'Hérault, en a transféré la gestion à la commune d'Agde, par application des articles L.35 et R.58 du code du domaine de l'Etat, en vue de leur aménagement pour des activités nautiques et touristiques, le conseil municipal de cette commune était compétent pour fixer les redevances dues pour les bateaux amarrés dans cette portion des berges de l'Hérault.

COLLECTIVITES TERRITORIALES - COMMUNE - FINANCES COMMUNALES - RECETTES - REDEVANCES - Redevances pour occupation temporaire du domaine public - Dépendances du domaine public fluvial et maritime dont la gestion a été transférée à la commune - Compétence du conseil municipal pour fixer la redevance - Légalité interne de la décision fixant la redevance - a) Equivalence entre le montant de la redevance et le service rendu - Existence - Redevance majorée pour une période de six ans pour financer des travaux d'aménagement - b) Respect du principe d'égalité - Existence - Différences de traitement justifiées par des différences de situation.

24-01-02-01-01-04(2), 27-01-01-02(2) Délibération du conseil municipal de la commune d'Agde décidant de majorer pour une période de six ans la redevance pour occupation temporaire du domaine public due au titre des bateaux amarrés aux berges de l'Hérault, dans des dépendances du domaine public fluvial et maritime transférées à cette commune en vue de leur aménagement pour des activités nautiques et touristiques. Cette majoration ayant porté le taux de la redevance à un montant qui a permis la réalisation par la commune de travaux qui ont accru la solidité des berges, facilité l'accès des bateaux et augmenté le nombre de postes d'amarrages, les redevances prévues trouvent leur contrepartie dans les prestations fournies. Le conseil municipal a pu légalement faire dépendre le montant de la redevance de la longueur des bateaux. Il n'a pas violé le principe d'égalité en prévoyant des montants différents pour les bateaux de pêche et les bateaux de plaisance, lesquels sont placés dans des situations différentes.

DOMAINE - DOMAINE PUBLIC - REGIME - OCCUPATION - UTILISATIONS PRIVATIVES DU DOMAINE - REDEVANCES (1) Autorité compétente pour fixer les redevances - Autorité chargée de la gestion du domaine public - Cas de dépendances du domaine de l'Etat dont la gestion a été transférée à une commune - Compétence du conseil municipal - (2) Légalité interne de la décision fixant la redevance - a) Equivalence entre le montant de la redevance et le service rendu - Existence - Redevance majorée pour une période de six ans pour financer des travaux d'aménagement - b) Respect du principe d'égalité - Existence - Différences de traitement justifiées par des différences de situation.

24-01-02-02, 27-01-01-02(1) La procédure de transfert de gestion des immeubles du domaine public dont la destination est modifiée, prévue par les articles L.35 et R.58 du code du domaine de l'Etat, a pu légalement être utilisée pour transférer à la commune d'Agde la gestion de dépendances du domaine public fluvial et maritime de la rivière l'Hérault en vue de leur aménagement pour des activités nautiques et touristiques, un tel projet emportant modification de la destination de ces dépendances.

DOMAINE - DOMAINE PUBLIC - REGIME - CHANGEMENT D'AFFECTATION - Procédure de transfert de gestion (articles L - 35 et R - 58 du code du domaine de l'Etat) - Applicabilité - Conditions - Changement de destination - Condition remplie en l'espèce.

EAUX - REGIME JURIDIQUE DES EAUX - REGIME JURIDIQUE DES COURS D'EAU - COURS D'EAU DOMANIAUX (1) Transfert à une commune de la gestion de dépendances du domaine public fluvial et maritime - Applicabilité de la procédure de transfert de gestion prévue par les articles L - 35 et R - 58 du code du domaine de l'Etat - Conditions - Changement de destination - Condition remplie en l'espèce - Berges transférés en vue de leur aménagement pour des activités nautiques et touristiques - (2) Redevance due pour les bateaux amarrés dans un port de plaisance - a) Equivalence entre le montant de la redevance et le service rendu - Existence - Redevance majorée pour une période de six ans pour financer des travaux d'aménagement - b) Respect du principe d'égalité - Existence - Différences de traitement justifiées par des différences de situation.


Références :

Code des communes L231-6
Code du domaine de l'Etat L35, R58


Publications
Proposition de citation : CE, 08 jui. 1996, n° 121520
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: M. Fougier
Rapporteur public ?: M. Sanson

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1996:121520.19960708
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