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21/08/1996 | FRANCE | N°176927

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 21 août 1996, 176927


Vu la requête enregistrée le 17 janvier 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Pierre C..., demeurant ... ; M. C... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 29 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa protestation contre les opérations électorales qui se sont déroulées le 18 juin 1995 en vue de l'élection des membres du conseil municipal de Noyon (Oise) ;
2°) annule ces opérations électorales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code des tribunaux ad

ministratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 ...

Vu la requête enregistrée le 17 janvier 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Pierre C..., demeurant ... ; M. C... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 29 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa protestation contre les opérations électorales qui se sont déroulées le 18 juin 1995 en vue de l'élection des membres du conseil municipal de Noyon (Oise) ;
2°) annule ces opérations électorales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lamy, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, en premier lieu, qu'à supposer même que des journalistes aient pu connaître le sens du jugement avant la date de sa notification aux parties, cette seule circonstance est sans influence sur la régularité du jugement rendu ;
Considérant, en deuxième lieu, que si M. C... soutient que la date de lecture du jugement ne correspondrait à aucune réalité, il n'apporte à l'appui de ses allégations aucun commencement de preuve ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 196 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Après le rapport qui est fait sur chaque affaire par un membre de la formation du jugement, les parties peuvent présenter soit en personne, soit par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, soit par un avocat, des observations orales à l'appui de leurs conclusions écrites" ; que si M. E..., co-listier de M. C..., partie à l'instance, n'a pu prendre la parole à l'audience, il est constant qu'il n'avait pas présenté de conclusions écrites devant le tribunal administratif d'Amiens ; que, dès lors, M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'article R. 196 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel aurait été méconnu ;
Sur les griefs relatifs à la campagne électorale :
Considérant, en premier lieu, que pour contester la validité du second tour des élections municipales qui ont eu lieu le 18 juin 1995 à Noyon (Oise), M. C..., qui dirigeait la liste "Noyon Renaissance" fait valoir que des tracts injurieux et diffamatoires à son égard ont été distribués aux électeurs ;
Considérant que les termes de la lettre diffusée par M. X... et ceux du tract "Appel aux électeurs de Noyon", émanant de M. André R..., n'excédaient pas les limites de la polémique électorale ; que les tracts "Mais qui sont-ils vraiment ?", "Vous le savez bien" et "Barrer la route à l'extrême droite" ne contenaient aucun élément nouveau de polémique électorale ; que M. C... a, en outre, pu apporter un démenti au tract "Alerte", qui laissait entendre qu'en cas de victoire du Front National, la ville de Noyon perdrait le bénéfice des subventions de l'Etat et n'attirerait plus les investisseurs ; que le message du 14 juin 1995 du Premier ministre et du président du conseil général de l'Oise appelant ès qualités, à "faire barrage" à la liste conduite par M. C..., pour regrettable qu'il ait été, n'a présenté aucun caractère injurieux et diffamatoire ; que, compte tenu de sa date de diffusion, M. C... a été, en outre, en mesure d'y répondre ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'un article de presse paru dans "Libération" le 15 juin 1995 cite des propos diffamatoires à l'égard de M. C... tenus par M. P... ; que, toutefois, M. P... a fait publier un démenti à ses propos dans une édition du lendemain du même quotidien ;

Considérant, en troisième lieu, que les inscriptions injurieuses à l'égard de M. C..., apposées sur un panneau de signalisation et des locaux de l'EDF n'ont pas été de nature à fausser les résultats du scrutin ; que, si l'existence d'affiches d'un ton particulièrement polémique est alléguée par M. C..., celui-ci n'apporte aucune précision quant à la durée et à l'importance de cet affichage ;
Considérant, en quatrième lieu, que le chargé de mission cantonal du RPR a invité les adhérents et sympathisants de ce mouvement, le 12 juin 1995, à se réunir le 18 juin 1995 à l'hôtel de ville pour commémorer l'appel du général de Gaulle ; qu'il n'est pas établi que l'organisation de cette réunion publique ait constitué une manoeuvre de nature à altérer les résultats du scrutin ;
Considérant, en cinquième lieu, que le fait, à le supposer établi, qu'un employé municipal aurait fait état de risques de troubles à l'ordre public en cas de victoire de M. C... ne peut être regardé comme un acte de pression sur les électeurs, de nature à vicier les résultats du scrutin ; qu'en admettant même que la directrice de la crèche ait laissé entendre aux parents des enfants qu'elle accueillait, que l'établissement pourrait être fermé en cas d'échec de la liste conduite par M. P..., il résulte de l'instruction que M. C... a répondu par un tract à cette allégation ;
Considérant que les faits susrelatés, pris dans leur ensemble, n'ont pu, compte tenu de l'écart des voix obtenues par les listes en présence, vicier les résultats du scrutin ;
Sur les griefs relatifs au déroulement du scrutin :
Considérant, d'une part, que la présence d'un groupe de personnes à l'entrée du bureau de vote n° 7, ayant une "attitude menaçante", n'est pas mentionnée dans le procès-verbal de recensement des votes de ce bureau et n'est pas corroborée par les pièces du dossier ;
Considérant, d'autre part, que le fait que des incidents se sont produits dès que les résultats du scrutin ont été connus ne peut être utilement invoqué pour contester ces derniers ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa protestation dirigée contre le second tour des élections municipales de Noyon ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner M. C... à payer à M. P... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. P... au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Pierre C..., M. Bertrand P..., M. Pierre XF..., M. René V..., M. M... Deguise, Mme Viviane XB..., M. Pierre I..., M. André XZ..., M. Claude D..., M. Jacques G..., M. Marc T..., Mme Liliane U..., M. Michel XE..., M. Bertrand B..., M. Claude XA..., M. Maurice A..., M. Léonard S..., M. Georges Q..., Mme Nicole XX..., M. Jean-Pierre XC..., M. Jean-Claude Z..., M. Guy XD..., Mme Françoise XY..., M. Gérard K..., M. Bruno XW..., M. Pascal N..., M. Michel E..., M. Jean Y..., Mme Janine J..., M. Bernard O..., Mme Bérangère H..., M. Michel L..., M. Jean-Michel F... et au ministre de l'intérieur.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

- RJ1 ELECTIONS - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - JUGEMENTS - Tenue des audiences - Faculté de présenter des observations orales - Absence - Personnes n'ayant pas présenté de conclusions écrites - Cas du colistier d'un requérant ayant introduit une protestation électorale (1).

28-08-04, 54-06-02 La faculté offerte aux parties par l'article R.196 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel de présenter soit en personne, soit par un avocat, des observations orales à l'appui de leurs conclusions écrites n'est pas ouverte aux personnes n'ayant pas présenté de conclusions écrites devant le tribunal ou la cour. Régularité de l'audience au cours de laquelle le colistier d'un requérant ayant introduit une protestation contestant des élections municipales n'a pu prendre la parole, dès lors qu'il n'avait pas présenté de conclusions écrites devant le tribunal.

- RJ1 PROCEDURE - JUGEMENTS - TENUE DES AUDIENCES - Faculté de présenter des observations orales - Absence - Personnes n'ayant pas présenté de conclusions écrites - Cas du colistier d'un requérant ayant introduit une protestation électorale (1).


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R196
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75

1. Comp. 1888-12-01, Elections municipales de Recoubeau, p. 911


Publications
Proposition de citation: CE, 21 aoû. 1996, n° 176927
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Groux
Rapporteur ?: M. Lamy
Rapporteur public ?: M. Arrighi de Casanova

Origine de la décision
Formation : 8 / 9 ssr
Date de la décision : 21/08/1996
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 176927
Numéro NOR : CETATEXT000007922179 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1996-08-21;176927 ?
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