Vu la requête, enregistrée le 12 janvier 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA GIRONDE ; le PREFET DE LA GIRONDE demande que le Conseil d'Etat annule le jugement en date du 9 décembre 1994 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé son arrêté du 7 décembre 1994 décidant la reconduite à la frontière de M. Abderrahim X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990, la loi du 26 février 1992 et la loi du 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Vestur, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'il résulte de l'examen de la minute du jugement du 9 décembre 1994 que le mémoire en défense du PREFET DE LA GIRONDE du 7 décembre 1994 a bien été visé ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux aurait omis de viser ledit mémoire manque en fait ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'il n'est pas contesté que M. X... se trouvait dans l'un des cas où, en application de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, le préfet peut ordonner la reconduite à la frontière d'un étranger ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., ressortissant marocain, né en 1960, est entré sur le territoire français avec un visa de court séjour en février 1992 et y a épousé le 20 juillet 1992 une compatriote séjournant en France depuis l'âge de 4 ans, titulaire d'une carte de résident, occupant un emploi stable et dont il a eu un enfant en octobre 1993 ; que l'état de santé de Mme X..., qui a été victime en mars 1994 d'un accident ayant entraîné un arrêt de travail de sept mois, requérait à la date de l'arrêté du 7 décembre 1994 la présence de M. X... auprès d'elle ; que, dans ces circonstances, l'arrêté du PREFET DE LA GIRONDE ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... a porté au droit au respect dû à la vie familiale de M. X... une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il en résulte que le PREFET DE LA GIRONDE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 9 décembre 1994, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux a prononcé l'annulation ;
Article 1er : La requête du PREFET DE LA GIRONDE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA GIRONDE, à M. Abderrahim X... et au ministre de l'intérieur.