Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET D'INDRE-ET-LOIRE ; le PREFET D'INDRE-ET-LOIRE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 12 novembre 1994 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 25 octobre 1994 décidant la reconduite à la frontière de Mme Dorothée X... ;
2°) de rejeter la demande présentée devant ledit tribunal par Mme X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée notamment par les lois des 2 août 1989, 10 janvier 1990, 26 février 1992 et 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Rapone, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Tiffreau, Thouin-Palat, avocat de Mme X...,
- les conclusions de M. Chantepy, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduite à la frontière dans les cas suivants ... 3°) si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par l'administration que Mme Dorothée X..., ressortissante comorienne, est entrée et a séjourné régulièrement en France munie d'une carte de séjour d'étudiante de 1988 au 31 octobre 1993 ; qu'elle est mariée à un ressortissant camerounais, étudiant en médecine et titulaire d'une carte de résident de 10 ans ; que deux frères de Mme X..., dont l'un possède la nationalité française, vivent en France ; que la totalité des attaches familiales de Mme X... sont en France ; que dans ces circonstances, la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre sur le fondement de l'article 22-I-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, porte à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cette mesure a été prise ; qu'elle a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET D'INDRE-ET-LOIRE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 25 octobre 1994 ;
Article 1er : La requête du PREFET D'INDRE-ET-LOIRE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET D'INDRE-ET-LOIRE, à Mme Dorothée X... et au ministre de l'intérieur.