Vu le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE LA PECHE ET DE L'ALIMENTATION, enregistré le 27 juillet 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE LA PECHE ET DE L'ALIMENTATION demande au Conseil d'Etat l'annulation du jugement en date du 24 février 1994 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé, à la demande de M. X..., la décision de la commission départementale d'aménagement foncier de la Gironde en date du 6 mai 1991 et a condamné l'Etat à verser à M. X... la somme de 22 184 F ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Arnoult, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Gaeremynck, Commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par M. X... à l'appel du ministre :
Considérant que le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE LA PECHE ET DE L'ALIMENTATION a reçu notification du jugement attaqué le 26 mai 1994 ; que, dès lors, l'appel qui a été enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 27 juillet 1994 n'était pas tardif ;
Sur la légalité de la décision de la commission départementale d'aménagement foncier de la Gironde en date du 6 mai 1991 :
Considérant, d'une part, qu'en vertu de l'article 4 du code rural, dans sa rédaction applicable à la date de la décision de la commission communale, le recours contre les décisions de la commission communale de remembrement "doit être formé dans un délai de 15 jours à dater de la notification ou, au plus tard, et à défaut de notification, dans un délai d'un mois à dater de la publication" ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... a reçu notification le 10 juin 1982 du procès-verbal de remembrement relatif à son compte et a saisi la commission départementale d'aménagement foncier le 26 juin 1982 ; que la circonstance invoquée par le ministre que la clôture des opérations de remembrement dans la commune de Soulac était intervenue le 2 avril 1982 ne faisait pas par elle-même obstacle à la recevabilité de cette réclamation ; qu'en outre si le ministre soutient que M. X... a eu connaissance, comme tout habitant de la commune, de l'affichage de la décision de la commission communale, il n'en établit pas la date ; que, par suite, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, la réclamation de M. X... n'était pas tardive ;
Considérant, d'autre part, qu'il ressort du procès-verbal de remembrement que M. X..., dont les apports, correspondant à des terrains acquis au cours des opérations de remembrement, s'élevaient à 1 ha 24 a 42 ca d'une valeur de 9 954 points a reçu en attributions 1 ha 13 a 50 ca d'une valeur de 9 080 points ; qu'ainsi la règle d'équivalence, fixée par l'article 20 du code rural dans sa rédaction alors en vigueur, a été méconnue ; que si le ministre soutient que la différence de superficie trouve exclusivement son origine dans une discordance entre la surface réelle à remembrer et la superficie cadastrale des apports, il appartenait aux commissions de remembrement d'apporter la preuve de cette discordance et d'en tirer les conséquences dans l'établissement du procès-verbal de remembrement ; qu'en l'absence au dossier de tout élément de nature à étayer cette assertion, le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé la décision par laquelle la commission départementale d'aménagement foncier a rejeté la réclamation de M. X... ;
Sur les conclusions relatives à la réparation accordée à M. X... :
Considérant que si l'annulation de la décision de la commission départementale a pour effet de saisir à nouveau ladite instance de la réclamation de M. X..., cette circonstance ne saurait à elle-seule fonder le versement d'une indemnité dès lors que M. X... ne justifie d'aucun préjudice indemnisable ; que le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE LA PECHE ET DE L'ALIMENTATION est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a condamné l'Etat à lui verser la somme de 22 184 F ; que, par voie de conséquence, les conclusions incidentes de M.Lafforgue tendant à majorer le montant de cette indemnité doivent être rejetées ;
Sur l'application de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat, qui est, pour l'essentiel, la partie perdante, à verser à M. X... la somme de 2 500 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 10 mars 1994 est annulé en tant qu'il condamne l'Etat à verser à M. X... la somme de 22 184 F.
Article 2 : Le surplus des conclusions du recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE LA PECHE ET DE L'ALIMENTATION et le recours incident de M. X... sont rejetés.
Article 3 : L'Etat est condamné à verser à M. X... la somme de 2 500 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation et à M. X....