Vu la requête enregistrée le 14 décembre 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme KADRI, épouse Y..., demeurant ... ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 3 novembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé l'avis émis le 26 mai 1993 par la commission de séjour des étrangers favorable à la délivrance d'un titre de séjour ;
2°) de rejeter la demande du préfet des Alpes-Maritimes devant le tribunal administratif de Nice ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Errera, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la circonstance que Mme X... était entrée irrégulièrement en France et ne remplissait donc pas les conditions prévues par l'article 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et l'article 11 du décret du 30 juin 1946 dans leur rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée, ne faisait pas, à elle seule, obstacle à ce que fussent examinés par la commission de séjour des étrangers les titres de l'intéressée à bénéficier d'une carte de résident en application de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice s'est fondé sur cette seule circonstance pour annuler l'avis du 26 mai 1993 ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat saisi de l'ensemble du litige, d'examiner l'autre moyen soulevé devant le tribunal administratif de Nice par le préfet des Alpes-Maritimes ;
Considérant qu'eu égard à la durée du séjour en France de la requérante et à celle qui s'était écoulée depuis son mariage avec un ressortissant français, le refus du titre de séjour sollicité par elle aurait porté une atteinte excessive au droit au respect de sa vie familiale ; que dès lors, le motif retenu par la commission de séjour des étrangers et tiré de la "situation familiale" de l'intéressée était de nature à justifier légalement son avis favorable à la délivrance d'un titre de séjour ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Article 1er : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Nice du 3 novembre 1993 est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Nice par le préfet des AlpesMaritimes est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Bouchra X... et au ministre de l'intérieur.