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30/12/1996 | FRANCE | N°173647

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 30 décembre 1996, 173647


Vu la requête enregistrée le 16 octobre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande au Conseil d'Etat :
1°) l'annulation du jugement du 3 juin 1995 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 31 mai 1995 décidant la reconduite à la frontière de M. Sid X... ;
2°) le rejet de la demande présenté par M. Sid X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Conv

ention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondament...

Vu la requête enregistrée le 16 octobre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande au Conseil d'Etat :
1°) l'annulation du jugement du 3 juin 1995 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 31 mai 1995 décidant la reconduite à la frontière de M. Sid X... ;
2°) le rejet de la demande présenté par M. Sid X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990, la loi du 26 février 1992 et la loi du 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Desrameaux, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 2°) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de validité de son visa ... sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que M. Sid X... s'est maintenu sur le territoire français à l'issue du délai de validité de son visa d'un mois sans être titulaire d'un titre de séjour ; qu'ainsi, il se trouvait dans un des cas prévus par l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précitée où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, où à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant que si M. Sid X... fait valoir qu'à la date de la décision attaquée, il vivait depuis plusieurs mois avec une ressortissante française, qu'il était sur le point d'épouser, il est constant que le mariage n'avait pas encore été prononcé à cette date ; que, compte tenu des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions de séjour en France de M. Sid X..., qui avait conservé des attaches familiales en Algérie, l'arrêté contesté en date du 31 mai 1995 par lequel le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a prononcé la reconduite à la frontière, n'a pas eu égard aux effets de cette mesure porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, ni ainsi méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce que la décision du PREFET DE LA SEINE-SAINTDENIS de reconduite à la frontière en date du 31 mai 1995 porterait une atteinte disproportionnée au respect de la vie familiale de M. Sid X... pour prononcer son annulation ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M. Sid X... devant le tribunal administratif de Paris ;

Considérant que, par un arrêté n° 95-1490 en date du 22 mai 1995, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a donné à Mme Y..., sous-préfet chargé de mission, délégation pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière ; que, dès lors le moyen tiré de ce que Mme Y... n'aurait pas été compétente pour signer l'arrêté attaqué manque en fait ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a procédé à un examen de la situation individuelle de M. Sid X... ; que dans les circonstances de l'espèce telles qu'elles ont été exposées ci-dessus, il n'a pas commis d'erreur manifeste dans son appréciation des conséquences pouvant résulter pour la situation personnelle de M. Sid X... d'une décision de reconduite à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en prenant l'arrêté de reconduite à la frontière, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a voulu mettre fin à la présence irrégulière de M. Sid X... sur le territoire et non contrecarrer le projet de mariage de celui-ci avec une ressortissante française ; que, par suite, M. Sid X... n'est pas fondé à se prévaloir d'une méconnaissance de l'article 12 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que le jugement en date du 3 juin 1995 du tribunal administratif de Paris a annulé sa décision de reconduite à la frontière en date du 31 mai 1995 ;
Article 1er : Le jugement en date du 3 juin 1995 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Sid X... au tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, à M. Sid X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 4 ss
Numéro d'arrêt : 173647
Date de la décision : 30/12/1996
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 30 déc. 1996, n° 173647
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Desrameaux
Rapporteur public ?: Mme Roul

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1996:173647.19961230
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