Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 12 juillet 1995 et 13 novembre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE ANONYME AFFICHAGE GIRAUDY dont le siège est ..., représentée par son président-directeur général en exercice domicilié audit siège ; la SOCIETE ANONYME AFFICHAGE GIRAUDY demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 13 avril 1995 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté ses requêtes tendant à l'annulation, d'une part, du jugement du 15 avril 1993 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 18 juin 1991 du préfet du Calvados lui infligeant des pénalités d'un montant de 11 977 F au motif qu'elle n'a pas respecté dans son établissement de Caen les obligations pesant sur elle en matière d'emploi des handicapés, d'autre part, du jugement du 8 novembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes dirigées contre les décisions en date du 30 octobre 1990 et du 13 novembre 1991 du préfet de la Loire-Atlantique lui infligeant des pénalités d'un montant de 11 216,25 F et 11 977, 50 F pour le même motif au titre de son établissement de Nantes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail, notamment ses articles L. 323-1, L. 323-4 et D. 323-3 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Gervasoni, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Vuitton, avocat de la SOCIETE ANONYME AFFICHAGE GIRAUDY,
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 323-1 du code du travail, issu de la loi du 10 juillet 1987 : "Tout employeur occupant au moins vingt salariés est tenu d'employer, à temps plein ou à temps partiel, des bénéficiaires de la présente section dans la proportion de 6 % de l'effectif total de ses salariés. Pour les entreprises à établissements multiples, cette obligation d'emploi s'applique établissement par établissement ( ...)" ; qu'aux termes de l'article L. 323-4 du même code : "L'effectif total de salariés, visé au premier alinéa de l'article L. 323-1, est calculé selon les modalités définies à l'article L. 431-2 ; toutefois, les salariés occupant certaines catégories d'emplois exigeant des conditions d'aptitude particulières, déterminées par décret, ne sont pas décomptés dans cet effectif ( ...)" ; qu'aux termes de l'article D. 323-3 du code du travail, issu du décret du 22 janvier 1988 : "Ne sont pas pris en compte dans l'effectif total des salariés visé à l'article L. 323-1 (1er alinéa) les salariés occupant les emplois qui relèvent des catégories d'emplois énumérés à la liste annexée au présent décret" ; qu'il résulte de ces dispositions que ne sont pas pris en compte dans l'effectif de l'entreprise ou de l'établissement en fonction duquel s'apprécie l'obligation d'emploi fixée par l'article L. 323-1 précité du code du travail les salariés qui occupent un emploi relevant de l'une des catégories d'emplois limitativement énumérées par la liste annexée à l'article D. 323-3 du code du travail et définies par référence aux rubriques de la nomenclature des professions et catégories socio-professionnelles établie par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que pour inclure les afficheurs monteurs et les attachés technico-commerciaux qu'emploie la société requérante dans ses établissements de Caen et de Nantes, dans l'effectif auquel s'applique l'obligation d'emploi de personnes handicapées, la cour administrative d'appel s'est fondée non sur ce que ces fonctions n'étaient pas elles-mêmes mentionnées sur la liste annexée à l'article D. 323-3 du code du travail mais sur la circonstance qu'elles n'entraient dans aucune des catégories énumérées par ladite liste ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la cour aurait fait une inexacte application des dispositions précitées ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, que la cour administrative d'appel a pu, sans erreur de droit, estimer que le caractère pénible et dangereux des tâches accomplies par les salariés qui occupent ces fonctions ne constituait pas, par lui-même, un motif justifiant qu'ils soient exclus de l'effectif auquel s'applique l'obligation fixée par les articles L. 323-1 et suivants du code du travail dès lors qu'ils n'entrent dans aucune des catégories énumérées dans la liste annexée à l'article D. 323-3 du code du travail ;
Considérant, en troisième lieu, que les moyens tirés de ce que les dispositions de l'article D. 323-3 doivent s'interpréter à la lumière des obligations de sécurité qui, en vertudes articles L. 230-1 et suivants du code du travail, incombent aux employeurs et de ce que, tel qu'interprété, l'article D. 323-3 méconnaîtrait les dispositions des articles L. 323-1 et suivants du code du travail et le principe d'égalité et devrait par suite être regardé comme entaché d'illégalité, sont nouveaux en cassation et ne sont, par suite, pas recevables ;
Considérant, enfin, qu'en estimant que les afficheurs monteurs et les attachés technico-commerciaux de la SOCIETE ANONYME AFFICHAGE GIRAUDY n'entraient dans aucune des catégories d'emplois de la liste annexée à l'article D. 323-3 du code du travail, la cour administrative d'appel s'est livrée, sans les dénaturer, à une appréciation souveraine des faits qui ne peut être utilement discutée devant le juge de cassation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE ANONYME AFFICHAGE GIRAUDY n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt du 13 avril 1995 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté ses requêtes tendant à l'annulation, d'une part, du jugement du 15 avril 1993 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 18 juin 1991 du préfet du Calvados lui infligeant des pénalités d'un montant de 11 977 F au motif qu'elle n'a pas respecté dans son établissement de Caen les obligations pesant sur elle en matière d'emploi des handicapés, d'autre part, du jugement du 8 novembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes dirigées contre les décisions en date du 13 octobre 1990 et du 13 novembre 1991 du préfet de la Loire-Atlantique lui infligeant des pénalités d'un montant de 11 216,25 F et 11 977,50 F pour le même motif au titre de son établissement de Nantes ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE ANONYME AFFICHAGE GIRAUDY est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE ANONYME AFFICHAGE GIRAUDY et au ministre du travail et des affaires sociales.