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15/01/1997 | FRANCE | N°152873

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 15 janvier 1997, 152873


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 20 octobre 1993 et le 20 décembre 1993, présentés pour M. Bogdan X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 4 octobre 1993 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 1er octobre 1993 par lequel le préfet de police de Paris a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de dé

cider qu'il sera sursis à l'exécution de cet arrêté ;
4°) de condamner l'Etat à lui...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 20 octobre 1993 et le 20 décembre 1993, présentés pour M. Bogdan X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 4 octobre 1993 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 1er octobre 1993 par lequel le préfet de police de Paris a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de décider qu'il sera sursis à l'exécution de cet arrêté ;
4°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 5 930 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Guyomar, Auditeur,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que, pour décider par un arrêté en date du 1er octobre 1993 que M. X... serait reconduit à la frontière, le préfet de police de Paris s'est fondé, d'une part, sur les dispositions du 1°) du I de l'article 22 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, et, d'autre part, sur celles du 6°) du I du même article ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1°) Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et n'est pas contesté par l'administration, que M. X..., qui avait sollicité l'attribution d'une carte de résident en qualité de conjoint d'une Française, s'est vu délivrer à ce titre une autorisation provisoire de séjour ; qu'en l'absence de toute décision de refus intervenue sur la demande de M. X..., cette autorisation provisoire, dont la date d'expiration était postérieure au 1er octobre 1993, faisait, à cette date, de M. X... le titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'il suit de là qu'en se fondant, par son premier motif, sur les dispositions susrappelées de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet de police de Paris a entaché sa décision du 1er octobre 1993 d'une erreur de droit ;
Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que le préfet de police de Paris aurait, s'il n'avait retenu que le second motif, pris la même décision à l'égard de M. X... ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 6°) Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé" ;

Considérant qu'il ressort des termes de la décision litigieuse que le préfet de police de Paris a, par cette même décision, refusé de renouveler les autorisations provisoires de séjour obtenues par M. X... au titre de sa demande de statut de réfugié ; que, toutefois, ce refus de renouvellement n'intervenait que dans le cadre de cette procédure, et n'a eu ni pour objet, ni pour effet de retirer à M. X... l'autorisation provisoire de séjour dont il était titulaire, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, au titre de sa demande de titre de séjour en qualité de conjoint d'une Française ; qu'ainsi, le préfet de police de Paris ne pouvait pas davantage se fonder sur les dispositions du 6°) du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 pour décider la reconduite à la frontière de M. X... ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er octobre 1993 du préfet de police de Paris ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions du I de l'article 75 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner l'Etat à verser à M. X... la somme de 10 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 4 octobre 1993 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris, ensemble l'arrêté du 1er octobre 1993 du préfet de police de Paris sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à M. X... une somme de 10 000 F au titre des dispositions du I de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Bogdan X..., au préfet de police de Paris et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 6 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 152873
Date de la décision : 15/01/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 15 jan. 1997, n° 152873
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guyomar
Rapporteur public ?: M. Lamy

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:152873.19970115
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