Vu la requête enregistrée le 28 février 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Mama X..., demeurant ... ; Mme X... demande que le Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir le décret en date du 7 octobre 1994 par lequel le Premier ministre a refusé à Mme X... l'acquisition de la nationalité française ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code civil ;
Vu le code de la nationalité française ;
Vu le décret du 30 décembre 1993 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Mary, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Bouthors, avocat de Mme Mama X...,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité externe :
Considérant que si aux termes de l'article 21-2 du code civil, l'étranger qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut acquérir la nationalité française par déclaration, le premier alinéa de l'article 21-4 du code civil prévoit que : "Le gouvernement peut s'opposer, par décret en Conseil d'Etat, pour indignité ou défaut d'assimilation, à l'acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger dans un délai d'un an à compter de la date du récépissé prévu au deuxième alinéa de l'article 26 ou, si l'enregistrement a été refusé, à compter du jour où la décision judiciaire admettant la régularité de la déclaration est passée en force de chose jugée." ; que le décret du 30 décembre 1993 fixe les modalités de l'instruction des déclaration de nationalité ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le procès-verbal d'assimilation qui fait partie de l'enquête prévue à l'article 15 du décret précité du 30 décembre 1993 a été établi par un fonctionnaire de la sous-préfecture de Sarreguemines dont l'habilitation n'est pas contestée ; que Mme X... a reçu notification du projet de décret lui refusant l'acquisition de la nationalité française et a présenté un mémoire en défense le 10 août 1994 conformément aux dispositions de l'article 24 du décret précité ; que la procédure administrative préparatoire à la décision contestée s'est donc déroulée selon les dispositions législatives et réglementaires en vigueur ;
Sur la légalité interne :
Considérant qu'il ressort, en particulier du procès-verbal en date du 19 août 1994 que la requérante faisait alors preuve d'un degré de compréhension seulement passable de la langue française ; qu'elle ne la parlait pas intelligiblement et qu'elle ne savait ni la lire ni l'écrire ; que Mme X... ne verse au dossier aucun élément de nature à infirmer ces constatations ; que, dès lors, le Premier ministre a pu légalement estimer que Mme X... présentait, à la date de la décision attaquée, un défaut d'assimilation au sens de l'article 21-4 du code civil précité ;
Considérant que Mme X... ne saurait utilement invoquer à l'appui de son pourvoi les dispositions de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatives au droit à un procès équitable en matière civile ; que dès lors Mme X... n'est pas fondée à demander l'annulation du décret du 7 octobre 1994 par lequel le gouvernement s'est opposé à sa déclaration de nationalité ;
Article 1er : La requête de Mme X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Mama X..., au Premier ministre et au ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration.