Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés le 29 avril 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Paulin X..., demeurant ... ; M. X... demande l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le Président de la République sur le recours gracieux qu'il lui a adressé et tendant à ce que soit rapporté le décret d'amnistie du 19 mars 1991 rendu au bénéfice de M. Jacques Y... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 88-828 du 20 juillet 1988 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de L'Hermite, Auditeur,
- les observations de la SCP Lesourd, Baudin, avocat de M. Paulin X...,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Sur la compétence :
Considérant que si les décrets pris par le Président de la République en exécution de l'article 13 de la loi du 20 juillet 1988 portant amnistie et admettant au bénéfice de l'amnistie les délinquants appartenant aux catégories définies audit article interviennent, eu égard à leur objet, à la suite de poursuites exercées ou de condamnations prononcées par l'autorité judiciaire, cette circonstance n'est pas de nature à faire obstacle à l'exercice par la juridiction administrative de son pouvoir de contrôle sur leur légalité ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête :
Considérant que le décret individuel d'amnistie du 19 mars 1991 dont a bénéficié M. Y... est une décision administrative ; que le moyen tiré de ce qu'il serait intervenu en violation des dispositions de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lesquelles sont relatives aux contestations devant des juridictions, est dès lors inopérant ;
Considérant que l'appréciation à laquelle se livre le Président de la République lorsqu'il décide d'accorder le bénéfice de l'amnistie ne saurait être utilement discutée devant le juge de l'excès de pouvoir ;
Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle le Président de la République a rejeté son recours gracieux tendant à ce que soit rapporté le décret du 19 mars 1991 ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Paulin X..., et au garde des sceaux, ministre de la justice.