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10/03/1997 | FRANCE | N°164645

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 10 mars 1997, 164645


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 janvier 1995 et 3 février 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société anonyme APPLICATION TECHNIQUES DES PLASTIQUES (ATP), dont le siège est situé Place de l'Ancienne Gare, B.P. n° 1, à Chapelle-Royale (28290), représentée par son président-directeur général en exercice ; la société anonyme APPLICATION TECHNIQUES DES PLASTIQUES (ATP) demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 15 novembre 1994 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annul

é la décision du 28 juillet 1993 du ministre du travail et de l'emploi et...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 janvier 1995 et 3 février 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société anonyme APPLICATION TECHNIQUES DES PLASTIQUES (ATP), dont le siège est situé Place de l'Ancienne Gare, B.P. n° 1, à Chapelle-Royale (28290), représentée par son président-directeur général en exercice ; la société anonyme APPLICATION TECHNIQUES DES PLASTIQUES (ATP) demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 15 novembre 1994 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du 28 juillet 1993 du ministre du travail et de l'emploi et de la formation professionnelle qui l'avait autorisée à licencier Mme Josiane X... ;
2°) rejette la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif d'Orléans ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Struillou, Auditeur,
- les observations de Me de Nervo, avocat de la société anonyme APPLICATION TECHNIQUES DES PLASTIQUES (ATP),
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 436-6 du code du travail, relatif au licenciement des représentants du personnel, des délégués syndicaux et des salariés assimilés : "Le ministre compétent peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur recours de l'employeur, du salarié ou du syndicat que ce salarié représente ou auquel il a donné mandat à cet effet ..." ; qu'il résulte de ce texte que la décision de l'inspecteur du travail accordant ou refusant l'autorisation de licencier un salarié protégé est soumise au contrôle hiérarchique dans les conditions du droit commun ; que, dans le cas où l'inspecteur a refusé l'autorisation de licenciement, la décision ainsi prise, qui a créé des droits au profit du salarié intéressé, ne peut être annulée ou réformée que pour des motifs de légalité, compte tenu des circonstances de fait et de droit existant à la date à laquelle s'est prononcé l'inspecteur du travail ; que la légalité de la décision par laquelle le ministre, après avoir annulé la décision de l'inspecteur du travail, statue sur la demande présentée par l'entreprise, doit être appréciée au regard des circonstances de fait et de droit prévalant à la date de la décision ministérielle ; que, pour annuler la décision par laquelle le ministre avait autorisé la société anonyme APPLICATION TECHNIQUES DES PLASTIQUES (ATP) à licencier Mme X..., membre du comité d'entreprise et déléguée du personnel, le tribunal administratif d'Orléans a estimé que le ministre avait commis une erreur de droit, en se fondant principalement sur des propositions de reclassement faites à l'intéressée postérieurement à la décision de l'inspecteur du travail ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour refuser le 28 janvier 1993 à la société APPLICATION TECHNIQUES DES PLASTIQUES (ATP) l'autorisation de licencier Mme X..., l'inspecteur du travail d'Eure-et-Loir, qui s'est abstenu de se prononcer sur le respect par l'employeur de son obligation de reclassement, s'est fondé, à titre principal, sur le caractère discriminatoire de la procédure de licenciement ; que pour annuler cette décision, le ministre ne s'est fondé que sur des motifs de légalité, compte tenu des circonstances qui prévalaient à la date de la décision de l'inspecteur du travail ; que le ministre, qui se trouvait saisi à son tour de la demande présentée par l'employeur, était fondé à tenir compte, à la date à laquelle il a statué, de la proposition de reclassement faite à Mme X... au cours de l'instruction du recours hiérarchique présenté par son employeur ; qu'ainsi, c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le fait que le ministre avait tenu compte de cette proposition de reclassement pour annuler sa décision ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X... devant le tribunal administratif d'Orléans ;

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des délégués du personnel et des membres du comité d'entreprise, qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, est subordonné à une autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ;
Considérant, en premier lieu, qu'aucune disposition n'imposait au ministre de communiquer à Mme X... le texte du recours hiérarchique formé par la société anonyme APPLICATION TECHNIQUES DES PLASTIQUES (ATP) contre la décision de l'inspecteur du travail qui avait refusé d'autoriser son licenciement ; que Mme X... n'est donc pas fondée à soutenir qu'à défaut de cette communication, la décision ministérielle a été prise à la suite d'une procédure irrégulière ;
Considérant, en deuxième lieu, que le fait que les attributions confiées à Mme X..., employée en qualité d'agent de maîtrise, ont été réparties entre plusieurs salariés, ne faisait pas obstacle à lui seul à ce que la réalité de la suppression de son poste de travail soit regardée comme établie ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il n'appartient pas au juge administratif de se prononcer sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 321-1-1 du code du travail, relatives à la fixation des critères de l'ordre des licenciements ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'en proposant à Mme X... de la reclasser dans un emploi à mi-temps d'ouvrière sur presse, la société anonyme APPLICATION TECHNIQUES DES PLASTIQUES (ATP) a satisfait à ses obligations, en l'absence de toute possibilité de reclasser l'intéressée, à l'intérieur de l'entreprise, dans un emploi équivalent à celui qu'elle occupait antérieurement ; que le moyen tiré par Mme X... de ce que la société anonyme APPLICATION TECHNIQUES DES PLASTIQUES (ATP) aurait dû lui faire une proposition de reclassement au sein de la société Gesti-Service, avec laquelle elle entretient des relations étroites, ne peut être accueilli, dès lors que ces deux sociétés ne constituent pas un groupe ;
Considérant, enfin, qu'il n'est pas établi que le licenciement de Mme X... serait en rapport avec l'exercice de ses fonctions représentatives ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société anonyme APPLICATION TECHNIQUES DES PLASTIQUES (ATP) est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du ministre l'autorisant à licencier Mme X... ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 15 novembre 1994 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif d'Orléans est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société anonyme APPLICATION TECHNIQUES DES PLASTIQUES (ATP), à Mme Josiane X... et au ministre du travail et des affaires sociales.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01-04-03-01 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE - OBLIGATION DE RECLASSEMENT -Reclassement à l'intérieur du groupe - Notion de groupe - Absence - Entreprise avec laquelle l'employeur entretient des relations étroites.

66-07-01-04-03-01 Une société n'est pas tenue, pour satisfaire à son obligation de reclassement, de rechercher dans une entreprise avec laquelle elle entretient des relations étroites des emplois équivalents à ceux que le salarié occupait antérieurement, dès lors qu'elle ne forme pas avec cette entreprise un groupe au sens de l'article de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales.


Références :

Code du travail R436-6, L321-1-1


Publications
Proposition de citation: CE, 10 mar. 1997, n° 164645
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Groux
Rapporteur ?: M. Struillou
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Formation : 8 / 9 ssr
Date de la décision : 10/03/1997
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 164645
Numéro NOR : CETATEXT000007949785 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1997-03-10;164645 ?
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